Les groupements autonomes de personnes (GAP) dont les membres exercent une activité économique dans le domaine des services financiers ne peuvent bénéficier de cette exonération dès lors qu’il ne s’agit pas d’une activité d’intérêt général.
Les prestations de services réalisées par des groupements autonomes de personnes (GAP) sont exonérées de TVA sous certaines conditions.
Trois questions préjudicielles ont permis à la CJUE de préciser le champ d’application de cette exonération. Elle juge ainsi que les activités financières, notamment bancaires et d’assurance, ne peuvent en bénéficier. Pour ce faire, elle se fonde sur le contexte et les objectifs poursuivis par la règlementation dont l’article en cause fait partie (CJUE, 21 septembre 2017, aff. C-326/15, DNB Banka, C-605/15, Commission c/ Allemagne).
S’agissant du contexte, elle juge que l’article 132, 1, f) de la Directive s’inscrit dans le chapitre 2 du Titre IX de la Directive TVA, relatif aux « Exonérations en faveur de certaines activités d’intérêt général », quand le chapitre 3 est intitulé « Exonérations en faveur d’autres activités ». Les dispositions prévues au premier ne s’appliquent ainsi pas au second. La Cour relève, à ce propos, que certaines opérations relevant du domaine des services financiers bénéficient également d’une exonération de TVA (art. 135) et en déduit que les GAP dont les membres sont actifs dans le domaine financier ne peuvent bénéficier de celle accordée aux activités d’intérêt général. L’objectif de la disposition en cause consiste à exonérer certaines activités d’intérêt général afin de faciliter l’accès à certaines prestations ainsi que la fourniture de certains biens en évitant les surcoûts liés à l’assujettissement à la TVA.
Par suite, l’exonération en cause ne saurait bénéficier aux GAP dont les membres n’exercent pas l’une des activités d’intérêt général expressément prévues par le texte. Lorsque les membres d’un GAP exercent une activité économique dans le domaine des services financiers qui ne constitue pas une telle activité, le GAP en question ne peut ainsi espérer bénéficier de cette exonération.
La CJUE rappelle néanmoins que les autorités nationales ne sauraient rouvrir des périodes fiscales définitivement clôturées pour diligenter des contrôles afin de remettre en cause des exonérations prévues dans le droit national. De même, elles ne sauraient invoquer la nouvelle interprétation donnée afin de refuser ladite exonération aux GAP constitués.
Bon nombre de questions restent en suspens, notamment sur les conditions d’application de l’article 132, 1, f), qui n’a pas été uniformément mis en œuvre par les Etats membres, mais aussi sur les critères d’appréciation de la distorsion de concurrence. Si la France est favorable à la réécriture de cet article, il ne faudra pas moins de 2 ans à la Commission pour réviser le texte. En France, il est urgent qu’un moratoire soit décrété afin de sécuriser les structures en place jusqu’à l’adoption d’un nouveau texte au niveau européen. L’avenir de ce mécanisme dépend de l’attitude que prendra la Commission, sachant que celle-ci a défendu ce point de vue devant la Cour. Néanmoins, afin de ne pas « dépendre » de la position de la Commission européenne, la reconstruction devrait également se faire autour d’un autre instrument : le groupe TVA. La mise en place d’un tel instrument ne dépend que de la volonté du gouvernement français dans la mesure où cela ne requiert pas l’aval de la Commission, celle-ci est simplement informée (consultation du Comité de la TVA). On pourrait aussi imaginer dans un premier temps un groupe TVA restreint aux services financiers, comme cela se fait dans certains Etats membres.
Toutefois, s’il existe certains points incontournables du groupe TVA (un seul assujetti pour le groupe composé d’entités établies au regard de la TVA, option exercée pour le régime, neutralité de la TVA, respect des règles de territorialité, préservation des numéros individuels de TVA des membres, neutralisation au regard de la TVA des opérations internes au groupe pour l’essentiel), il reste encore pas mal de modalités à déterminer (critère d’éligibilité des membres, exercice des droits à déduction au sein du groupe TVA, impact au regard de taxes annexes, comme la C3S, la Taxe sur les salaires ou les autres taxes déclarées comme en matière de TVA). C’est tout un chantier nouveau qui s’ouvre en France, avec d’autant plus d’effervescence qu’il intervient en pleine turbulence de Brexit et de mise en concurrence des Etats membres.