À la question de savoir si les dons consentis en 2018, alors que les revenus de cette année ne seront pas taxés (année blanche), produiront un effet fiscal pour le donateur, on peut répondre favorablement en précisant par ailleurs que les dispositifs de plafonnement ne seront pas impactés.
Le mode opératoire du prélèvement à la source implique que les réductions d’impôt relatives aux dons effectués en 2018 seront versées en cash en septembre 2019. Bien évidemment, pour les contribuables disposant de revenus exceptionnels, ces réductions d’impôt pourront s’imputer sur l’impôt correspondant, mais pour la grande majorité des contribuables qui n’auront aucun impôt à payer au titre de leurs revenus 2018, le montant de la réduction d’impôt leur sera restitué.
Sur un plan juridique, voici l’analyse sur laquelle repose cette solution.
Pour les revenus de 2018
Tout d’abord, il faut avoir bien à l’esprit que la première année du prélèvement à la source, la technique mise en place pour éviter aux contribuables de devoir supporter ce prélèvement sur leurs revenus contemporains et l’impôt dû au titre des revenus de l’année précédente, consiste en un crédit d’impôt exceptionnel. Pour autant, ni les règles de calcul de l’IR, ni l’obligation de déposer une déclaration des revenus de l’année N en N+1, ne sont modifiées.
Le solde de l’IR sera ainsi recouvré au vu de cette déclaration après imputation des réductions et crédits d’impôt, prélèvements, retenues à la source et acomptes.
Cela étant, en application du H du II de l’article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, modifié par le 6° de l’article 2 de l’ordonnance n° 2017-1390 du 22 septembre 2017, le crédit d’impôt modernisation du recouvrement (CIMR) accordé au titre de l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2018 s’impute sur l’impôt sur le revenu dû à raison des revenus 2018, après imputation de toutes les réductions d’impôt, de tous les crédits d’impôt et de tous les prélèvements ou retenues non libératoires. Ce même texte dispose que l’excédent éventuel sera restitué.
En pratique, la liquidation de l’impôt sur les revenus déclarés en 2019 au titre de 2018 se fera de la façon suivante :
- Application du barème progressif de l’impôt sur l’ensemble des revenus déclarés (exceptionnels et non exceptionnels)
- Imputation des réductions d’impôt afférentes aux dons consentis en 2018
- Puis imputation du CIMR correspondant à l’IR afférent aux revenus non exceptionnels
Donc pour un contribuable qui n’a pas de revenus exceptionnels, le CIMR sera d’un montant supérieur à l’impôt dû après imputation des réductions d’impôt et il apparaitra un solde négatif. Comme la loi prévoit le remboursement de l’excédent de CIMR non imputé, le contribuable se verra restituer un montant d’impôt correspondant à ses réductions d’impôt.
Application chiffrée
Hypothèses
- Un contribuable ne dispose pas de revenus exceptionnels en 2018
- Ces revenus déclarés au titre de 2018 l’exposent à un impôt théorique de 10 000 €
- Ce contribuable a consenti 300 € de dons en 2018, soit une réduction d’impôt de 100 €
Traitement fiscal
- Déclaration des revenus en 2019
- Eté 2019, liquidation de l’IR dû au titre des revenus de 2018 :
- Impôt théorique brut : 10 000 €
- Réduction d’impôt pour dons : 100 €
- Imputation du CIMR : – 10 000 €
- Solde de liquidation : 10 000 – 100 (RI mécénat) – 10 000 (CIMR) =- 100 €
- Septembre 2019 : restitution de 100 €
Pour les revenus de 2019
Les revenus perçus en 2019 donneront prise au prélèvement à la source à un taux déterminé en fonction des revenus de 2017 dans un premier temps.
Après déclaration des revenus de 2018, ce taux sera éventuellement ajusté.
Enfin, en 2020, après déclaration des revenus de 2019, une liquidation définitive de l’impôt aura lieu. Elle tiendra compte des effets des variations de revenus sur la tranche marginale d’imposition et des modifications éventuelles du quotient familial et pour ce qui nous occupe plus particulièrement, des réductions d’impôt correspondant aux dons consentis en 2019. Si le montant des prélèvements opérés est supérieur, l’excédent sera restitué.
Difficulté persistante
L’effet trésorerie du don est loin d’être contemporain de la date à laquelle il a été consenti comme des prélèvements effectués sur les revenus.
Une mesure a été adoptée pour limiter l’effort de trésorerie mais seulement pour les crédits d’impôt afférents aux frais de service à la personne et de garde des jeunes enfants pour lesquels il sera versé au plus tard le 1er mars de l’année de liquidation de l’impôt, un acompte de 30 %.
On peut néanmoins espérer qu’un geste supplémentaire sera fait dans le cadre des projets de lois de finances de fin d’année. En effet, à l’occasion du comité de pilotage sur le prélèvement à la source qui s’est tenu, le 11 juin, dans l’Eure, le Ministre Gérald Darmanin a annoncé que pour renforcer cette mesure :
- L’avance inclurait également la réduction d’impôt pour les personnes en EHPAD
- et qu’elle serait versée dès le 15 janvier, et non en mars comme il était initialement prévu