Le Conseil des Ministres du 30 septembre 2009 restera une date d’importance dans l’histoire de la fiscalité française. En effet, à l’occasion de ce Conseil, il a été décidé de soumettre au Parlement, dans le projet de loi de finances initiale pour 2010, la suppression dès 2010 de la taxe professionnelle créée en 1976 sur les fondations d’un des impôts révolutionnaires, la patente.
Comme nous l’écrivions sur ce blog il y a quelques semaines, la taxe professionnelle a, dès sa naissance, suscité de vives critiques. Cet impôt pèse en effet sur les équipements et biens mobiliers, ce qui pénalise l’investissement et, par voie de conséquence, la compétitivité des entreprises implantées en France.
La taxe professionnelle sera remplacée dès 2010 par la cotisation économique territoriale composée d’une cotisation locale d’activité et d’une cotisation complémentaire.
La cotisation locale d’activité sera assise sur la valeur locative des biens immobiliers. Mais la vraie nouveauté réside dans la cotisation complémentaire qui sera, quant à elle, assise sur la valeur ajoutée. Cette assiette rappelle l’IRAP que nous évoquions sur ce même site dans un précédent article. Le taux sera national et variera en fonction du chiffre d’affaires de la société redevable, il sera ainsi de 0% en-dessous de 500.000 € de chiffre d’affaires par an pour atteindre 1,5% pour les entreprises générant un chiffre d’affaires de plus de 50 millions par an.
La somme de ces deux cotisations sera plafonnée à 3% de la valeur ajoutée au lieu des 3,5 % du plafond actuel de la taxe professionnelle.
De cette réforme, le Premier Ministre dit attendre un « choc de compétitivité » en favorisant une restauration de la capacité d’investissement des entreprises. Selon le projet de loi de finances, la réforme devrait se traduire par un allégement de l’ordre de 11,7 milliards € sur la trésorerie des entreprises en 2010, et de 7 milliards les années suivantes. Les gains seront les plus importants pour les entreprises industrielles les plus exposées aux vents de la concurrence internationale.
Toutefois, toutes les entreprises ne bénéficieront pas de la même façon de cette réforme. Ainsi, les entreprises du secteur tertiaire qui emploient une main d’œuvre importante, comme le secteur du commerce de détail, ne seront pas les plus favorisées par la réforme. En effet, sous l’empire des textes actuels, plus la masse salariale d’une entreprise est élevée, plus cette entreprise a une valeur ajoutée élevée. La masse salariale n’est pas actuellement considérée comme étant un élément venant en déduction de la valeur ajoutée prise en compte pour la détermination de l’assiette imposable.
Certes, il nous sera rétorqué que la neutralité d’un impôt est toujours un concept délicat à manier. Il nous sera également rétorqué que s’il s’agit de retoucher le dispositif pour faire plaisir aux uns et aux autres (aux entreprises industrielles et aux entreprises commerciales), on tombera rapidement dans l’ornière, dans laquelle est tombée la République de Socratie, de la parabole de l’impôt sur les parapluies citée dans l’ouvrage de René Macard, « Garde à vous, Fisc ! » (Le Seuil 1955, p. 107).
Toutefois, la question qui est posée ici est d’abord celle de l’emploi, question éminemment importante, et pas seulement en période de crise, pour être posée avec insistance. La cotisation complémentaire pourrait renchérir le coût du travail en France dans des secteurs créateurs d’emplois faiblement qualifiés, emplois pour lesquels le facteur coût constitue un frein à l’embauche.