Les renseignements obtenus dans le cadre d’une enquête préliminaire ayant fait l’objet d’un classement sans suite ne peuvent être transmis à l’administration fiscale dans le cadre de son droit de communication auprès des tribunaux (LPF, art. L. 101).
Avant la LFR pour 2015, en vertu de l’article L. 101 du LPF, l’autorité judiciaire devait communiquer aux agents des impôts toute indication qu’elle recueillait dans le cadre « d’une instance civile ou commerciale ou d’une information criminelle ou correctionnelle, même terminée par un non-lieu », de nature à faire présumer soit une fraude fiscale soit une simple manœuvre ayant eu pour objet ou résultat de frauder ou de compromettre un impôt.
Dans ses commentaires au BOFiP (inchangés depuis 2012), l’Administration considère qu’il peut s’agir d’informations obtenues « dans le cadre d’une enquête préliminaire ou de flagrance (…) même terminée par un non-lieu » (BOI-CF-COM-10-50, n° 40).
Dans l’affaire CS Aviation se posait la question de savoir si le ministère public pouvait transmettre à l’administration fiscale des informations issues d’une enquête préliminaire ayant fait l’objet ultérieurement d’un classement sans suite.
Le Conseil d’État apporte, de manière inédite, une réponse négative. Il juge qu’il résulte des dispositions de l’article L. 101 du LPF, dans leur rédaction antérieure à la LFR 2015, que les renseignements recueillis dans le cadre d’une procédure judiciaire « ne pouvaient être transmis à l’administration fiscale que dans le cadre d’une instance civile ou commerciale ou lorsqu’une information judiciaire avait été ouverte par un juge d’instruction », et non dans le cadre d’une enquête préliminaire ayant fait l’objet d’un classement sans suite.
La solution est parfaitement cohérente avec celle récemment retenue pour l’application de l’article L. 188 C du LPF (CE, 27 juillet 2018, n° 411301, confirmant CE 30 décembre 2014, n° 371652). Elle s’inscrit par ailleurs dans le droit fil de la jurisprudence de la Cour de cassation sur ce point (Cass. com. 28-11-2018 n° 16-26.446 F-D, min. c/ Sté Pharmacie Balteau). Même si la rédaction de l’article L. 101 du LPF a été modifiée depuis lors par la LFR 2015 (désormais, ces dispositions visent « toute procédure judiciaire »), la solution rendue par le Conseil d’État nous semble devoir conserver sa portée.
En effet, conformément à l’article 81 du Code de procédure pénale, les actes d’une enquête préliminaire, menée par des officiers de police judiciaire, deviennent, en cas d’ouverture d’une information judiciaire, un élément de cette dernière procédure. En revanche, ils ne s’incorporent pas à une procédure judiciaire en cas de classement sans suite.
En outre, il ressort des travaux parlementaires relatifs à la LFR 2015 que l’emploi de l’expression de « toute procédure judiciaire » avait simplement pour objet d’étendre le champ de l’obligation de communication aux procédures douanières.