Dans un arrêt Osteopathie Van Hauwermeiren BV du 5 octobre 2023 (CJUE C355/22, 5 octobre 2023), la CJUE vient rappeler la primauté absolue du droit communautaire sur le droit interne des États membres, réaffirmant ainsi le principe selon lequel les juridictions nationales ne peuvent pas se prévaloir de dispositions nationales les autorisant à maintenir les effets d’une réglementation nationale jugée incompatible avec la Directive TVA.
Au cas particulier, l’affaire concernait l’exonération de TVA applicable aux professions médicales et paramédicales en Belgique, laquelle avait été déclarée par le juge national, à la suite du juge communautaire, incompatible avec la Directive TVA.
La principale question était de savoir si un juge national pouvait maintenir, pour le passé, sur la base d’une disposition interne, et pour des « considérations importantes de sécurité juridique » relevant de difficultés administratives et pratiques, les effets d’une disposition nationale annulée en raison de son incompatibilité avec la Directive TVA.
La Cour y répond de manière négative et rappelle, à cet effet, que :
- les autorités d’un État membre qui constatent l’incompatibilité d’une réglementation nationale avec la Directive TVA doivent veiller à ce que, dans les meilleurs délais, le droit national soit mis en conformité avec cette dernière
- seul le juge communautaire peut, à titre exceptionnel et pour des considérations impérieuses de sécurité juridique, accorder un moratoire, lequel ne peut être accordé que dans l’arrêt même qui statue sur l’interprétation sollicitée
- à cet égard, ne constituent pas des considérations impérieuses de sécurité juridique la simple évocation de difficultés budgétaires et administratives qui pourraient résulter de l’annulation des dispositions en cause
A la suite de cet arrêt, on ne peut s’empêcher de penser à la récente affaire Icade Promotion concernant la France, dans laquelle le Conseil d’Etat (12 mai 2022, n°416727), à la suite du juge communautaire (CJUE C-299/20, 30 septembre 2021, Icade Promotion SAS), avait déclaré les dispositions relatives au calcul de la TVA sur la marge de l’article 268 du CGI, incompatibles avec la Directive TVA.
On s’interrogera, à cet égard, sur le fait de savoir si le juge national ne serait pas tenu d’écarter les commentaires administratifs publiés (BOI-TVA-IMM-10-20-10-20200513, point 30), contrairement à ce qu’indique la réponse ministérielle Grau du 1er février 2022 (Assemblée nationale, n°42486), l’article L. 80A du LPF ne pouvant pas, en application de l’arrêt susmentionné, servir de fondement au maintien de l’application de principes jugés incompatibles avec la Directive TVA.