Transfert de déficits sur agrément dans le cadre d’une opération de restructuration : importance du caractère préalable de la demande

La CAA de Bordeaux rappelle que la demande d’agrément tendant au transfert des déficits reportables dans le cadre d’une TUP doit impérativement être sollicitée antérieurement à l’expiration du délai d’opposition des créanciers.

Rappel

En cas de fusion bénéficiant du régime de faveur, les déficits antérieurs non encore déduits supportés par la société absorbée et qui ne bénéficient pas du transfert de plein droit (<200 k€), peuvent être reportés sur les bénéfices ultérieurs de la société absorbante si un agrément est obtenu à ce titre (CGI, art. 209, II).

L’agrément est de droit sous réserve du respect des conditions suivantes :

  • l’opération est placée sous le régime de l’article 210 A du CGI ;
  • elle est justifiée du point de vue économique et obéit à des motivations principales autres que fiscales ;
  • l’activité à l’origine des déficits n’a pas subi de changement significatif pendant la période de constatation des déficits ;
  • l’activité à l’origine des déficits dont le transfert est demandé doit être poursuivie pendant un délai minimum de 3 ans, sans faire l’objet, pendant cette période, de changement significatif ;
  • les déficits ne proviennent ni de la gestion d’un patrimoine mobilier par des sociétés holdings, ni de la gestion d’un patrimoine immobilier.

La demande d’agrément doit être déposée préalablement à la réalisation de l’opération qui la motive (CGI, art. 1649 nonies).

L’Administration précise que, s’agissant d’une TUP, la date de réalisation de l’opération s’entend non pas de la date de décision de la dissolution, mais de la date de transmission du patrimoine, c’est-à-dire à l’expiration d’un délai de 30 jours à compter de la publication de celle-ci dans un journal d’annonces légales (délai d’opposition des créanciers, art. 8 du décret du 3 juillet 1978).

Si une opposition a valablement été formée dans ce délai, il convient alors de retenir la date où cette opposition a été rejetée en 1re instance ou celle à laquelle le remboursement des créances a été effectué, ou les garanties constituées (BOI-SJ-AGR-20-30-10-10, § 260, 13 février 2019).

L’affaire

Une société avait décidé, par une AG du 31 décembre 2019, la dissolution de sa filiale à 100 % et la transmission universelle du patrimoine de cette dernière à son profit.

Cette dissolution a donné lieu à publication dans un journal d’annonces légales le 23 janvier 2020.

La société a présenté une demande d’agrément afin de bénéficier du transfert des déficits de la société confondue le 28 février 2020.

L’Administration a considéré que cette demande était tardive, dès lors qu’elle est intervenue après l’expiration du délai d’opposition des créanciers (le 23 février 2020).

La Cour indique que l’Administration pouvait légalement, pour le seul motif qu’elle était tardive, décider de rejeter cette demande d’agrément.

Nous comprenons, en outre, que les critères de délivrance de l’agrément n’étaient de toutes façons pas satisfaits ici.

Point d’attention

Un décret du 7 juillet 2024 (n°2024-751) prévoit qu’à compter du 1er octobre 2024, la publication de la dissolution donnant lieu à une procédure de TUP devra être effectuée au seul BODACC et non plus au sein d’un journal d’annonces légales.

C’est donc à compter de cette publication au BODACC que débutera désormais le délai d’opposition des créanciers de 30 jours.

Notons que cette modification des modalités de publication de la dissolution pourrait être plus contraignante pour les sociétés, la publication d’une annonce au BODACC se faisant nécessairement par l’entremise du greffe du tribunal de commerce (sans doute moins de souplesse/moins de rapidité).

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.