Contribution sociale sur l’IS : Inclusion des produits financiers dans le chiffre d’affaires s’ils s’inscrivent dans le modèle économique de l’entreprise

Le Conseil d’Etat juge que, pour l’application des dispositions de l’article 235 ter ZC du CGI, le chiffre d’affaires s’entend du montant des recettes tirées de l’ensemble des opérations réalisées par le redevable dans le cadre de son activité professionnelle normale et courante, ainsi que des produits financiers, s’ils s’inscrivent dans son modèle économique.

Rappel

Pour mémoire, sont exonérées de la contribution sociale sur l’IS prévue à l’article 235 ter ZC du CGI, les entreprises ayant réalisé un chiffre d’affaires de moins de 7,63 m€ au cours de l’exercice concerné.

Si la loi ne donne pas de définition de cette notion de « chiffre d’affaires », l’Administration indique, dans ses commentaires au BOFiP, que le chiffre d’affaires à retenir s’entend « du montant hors taxes des recettes réalisées par le redevable dans l’accomplissement de son activité professionnelle normale et courante » (BOI-IS-AUT-10-10, 1er août 2018, n°20). En pratique, cette définition correspond à celle retenue par le Code de commerce et le PCG pour l’établissement du compte de résultat (PCG, art. 512-2).

L’Administration précise, en outre, qu’il n’est pas tenu compte des produits financiers, sauf dans les cas où la règlementation particulière propre à certains secteurs d’activité le prévoit, ni des recettes revêtant un caractère exceptionnel, telles que les produits provenant de la cession d’éléments de l’actif immobilisé.

On notera que ces précisions sont en tous points identiques à celles apportées par l’Administration quant aux modalités d’appréciation du seuil de chiffre d’affaires de 10 m€ pour l’application du taux réduit d’IS en faveur des PME (BOI-IS-LIQ-20-10, 3 mars 2021, n°40).

L’histoire

Une société holding de droit néerlandais détenait, entre 2013 et 2015, diverses SCI et SNC en France, soumises au régime de l’article 8 du CGI, auxquelles elle avait consenti des prêts. Les résultats des SCI et SNC ainsi que les intérêts perçus au titre des prêts ont été assujettis à l’IS en France entre les mains de la société néerlandaise.

Un litige s’est cependant noué autour de la question de la prise en compte des intérêts ainsi perçus pour l’appréciation de son chiffre d’affaires au regard de la contribution sociale sur l’IS : les produits financiers correspondants devaient-ils être retenus, alors même que la société n’était soumise à aucune réglementation comptable spécifique ?

La décision du Conseil d’Etat

Si le Conseil d’Etat confirme que, pour l’application des dispositions de l’article 235 ter ZC du CGI, le chiffre d’affaires doit s’entendre du montant des recettes réalisées par le redevable dans le cadre de son activité professionnelle normale et courante, il juge qu’il convient également de tenir compte des produits financiers, dès lors qu’ils s’inscrivent dans son modèle économique.

Rappelons qu’il avait déjà jugé, pour l’appréciation du chiffre d’affaires de 250 m€ déclenchant l’application de l’ancienne contribution exceptionnelle d’IS (en vigueur entre 2011 et 2016, CGI, art. 235 ter ZAA ancien), que la prise en compte de plus-values de cession d’immobilisations dépendait du modèle économique de l’entreprise (CE, 10 juillet 2019, n°412968).

Jugeant ensuite l’affaire au fond, il relève qu’au cours des années considérées, la société néerlandaise avait eu pour seule activité la détention de participations dans les SCI et SNC françaises, et l’octroi à celles-ci de prêts, lesquels produisaient des intérêts dont la perception constituait pour elle « l’une des modalités courantes et normales de la poursuite du profit, caractérisant son modèle économique ».

Aussi confirme-t-il que les produits financiers litigieux faisaient bien partie du chiffre d’affaires de la société néerlandaise – de sorte qu’elle ne pouvait bénéficier de l’exonération de la contribution sociale sur l’IS.

Dans ses conclusions, la rapporteure publique indique que, selon elle, la solution aurait vocation à être transposée « aux sociétés appartenant à un groupe exerçant, pour les comptes des autres membres d’un groupe, une activité de centralisation de trésorerie (« cash pooling »), qu’il s’agisse de la holding ou d’une simple filiale ».

La solution devrait, en outre, valoir pour d’autres dispositifs se référant à la notion de « chiffre d’affaires ».

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.