Le Conseil d’Etat juge qu’une vérification de comptabilité peut être tenue en dehors des locaux de l’entreprise vérifiée lorsque la comptabilité ne s’y trouve pas ou lorsque les opérations de vérification ne peuvent s’y dérouler dans des conditions matérielles satisfaisantes (précision nouvelle).
Rappel
En principe, les vérifications de comptabilité doivent se dérouler sur place, c’est-à-dire dans les locaux de l’entreprise vérifiée (LPF, art. L. 13).
La jurisprudence a toutefois ménagé des exceptions à ce principe, en particulier lorsque la comptabilité ne se trouve pas dans les locaux de l’entreprise, à la condition que la possibilité d’un débat oral et contradictoire avec le vérificateur demeure ouverte (CE, 26 février 2003, n°23841 et 23842, Morera, délocalisation intervenant d’un commun accord entre le contribuable et l’Administration).
De plus, la loi de finances pour 2024 est venue amender l’article L. 13 du LPF, pour indiquer qu’à compter du 01.01.2024, la vérification de comptabilité peut se tenir ou se poursuivre en tout autre lieu déterminé d’un commun accord entre le contribuable et l’Administration. A défaut d’accord, l’Administration pourra décider de tenir ou de poursuivre la vérification dans ses propres locaux (LF, art. 117, mesure applicable aux contrôles engagés à compter du 1er janvier 2024 et aux contrôles déjà en cours à cette date).
La décision du Conseil d’Etat
Une société a contesté l’issue d’une vérification de comptabilité dont elle a fait l’objet, portant sur les exercices 2014 et 2015, au motif que la vérification ne s’était pas déroulée dans ses locaux, mais dans ceux de l’Administration.
Le Conseil d’Etat complète sa jurisprudence relative aux dispositions de l’article L. 13 du LPF (pré-LF 2024), et juge que la vérification de comptabilité peut se tenir dans un autre lieu que les locaux de l’entreprise vérifiée, lorsque sa comptabilité ne s’y trouve pas, ou que les opérations de contrôle ne peuvent s’y dérouler dans des conditions matérielles satisfaisantes – à la condition, bien entendu, que le contribuable ne soit pas privé d’un débat oral et contradictoire avec le vérificateur.
Il relève, au cas d’espèce, que :
- Le siège de l’entreprise vérifiée se situait au domicile de ses principaux associés ;
- La comptabilité ne s’y trouvait pas, mais était intégralement détenue par son conseil, domicilié à Malte ;
- Une copie du fichier des écritures comptables avait été remise au vérificateur sous forme dématérialisée en début de vérification ;
- En tout état de cause, le représentant de la société avait accepté que la vérification de comptabilité se poursuive dans les locaux de l’Administration ;
- La vérification avait donc pu valablement être effectuée dans les bureaux de l’Administration.
Compte-tenu des aménagements opérés par la LF 2024, la portée pratique de cette décision nous semble devoir être tempérée.
Rappelons néanmoins qu’il a été expressément indiqué, au cours des travaux parlementaires, que le principe devait rester le contrôle sur place, et que les délocalisations, à l’initiative de l’Administration, ne devaient pas devenir la norme (Rapport Sénat, n°128, Tome II).