L’extension de la couverture AGS à la prise d’acte et à la résiliation judiciaire du contrat de travail

Cour de cassation n° 23-11.417, chambre sociale, 8 janvier 2025

Rappel des faits 

La salariée introduit une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur, en raison des retards dans le paiement de ses salaires.

En mai 2019, la liquidation judiciaire de la société est prononcée et le liquidateur désigné notifie à la salariée son licenciement pour motif économique.

En juillet 2020, le conseil de prud’hommes prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur, prenant effet à la date du licenciement. La salariée sollicite l’inscription au passif de la société de l’ensemble des sommes dues au titre de la décision prud’homale de résiliation judiciaire de son contrat.

Les juridictions de fond, s’appuyant sur la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation (Cass. Soc., 19 avr. 2023, n° 21-20.651 ; Cass. Soc., 14 juin 2023, n° 20-18.397), rejettent sa demande, au visa de l’article L. 3253-8 du Code du travail

Rappel de la règle

L’article L. 3253-8 du Code du travail prévoit que :​

  • La garantie AGS couvre les ruptures du contrat intervenant au plus tard dans les 15 jours suivant le jugement de liquidation judiciaire, ​
  • La garantie AGS couvre uniquement les sommes dues au titre du licenciement économique prononcé par le liquidateur dans ce délai.

Décision

La Cour de cassation opère un revirement de sa jurisprudence en conséquence des précisions apportées par la CJUE. Le 22 février 2024, la CJUE avait énoncé que la directive 2008/94/CE du 22 octobre 2008 relative à la protection des travailleurs salariés en cas d’insolvabilité de l’employeur s’oppose à ce qu’une réglementation nationale exclue de la couverture des créances les sommes dues lorsque le travailleur a pris acte de la rupture de son contrat de travail. (CJUE, 22 févr. 2024, n° C-125/23)

La Cour de cassation juge désormais que la garantie AGS couvre « les créances impayées résultant de la rupture d’un contrat de travail, lorsque le salarié obtient la résiliation judiciaire de celui-ci en raison de manquements suffisamment graves de son employeur empêchant la poursuite dudit contrat ».

Notre avis

Il convient d’inscrire au passif de la société l’ensemble des sommes dues au titre de la décision prud’homale de résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié, si la rupture intervient pendant l’une des périodes visées à l’article L. 3253-8, 2° du même code. 

 

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Malik Douaoui

Malik Douaoui, Avocat Associé, possède une expérience de plus de 20 ans en droit social. Il conseille ses clients dans la gestion des relations individuelles et collectives de travail ainsi […]

Sara Braten

Stagiaire au sein du département Droit Social de Deloitte Société d’Avocats.