Dans la lignée des dispositifs déjà existants en matière d’échange automatique d’informations (FATCA, CRS, CbCR), la Commission européenne a déposé en juin 2017 une proposition de modification de la Directive européenne sur l’échange d’information (Directive 2011/16/UE) afin d’y inclure les schémas dits de « planification fiscale agressive ».
Le 13 mars 2018, le texte de la Directive visant à contraindre les intermédiaires fiscaux à déclarer ces schémas a été adopté par les ministres des finances de l’UE lors du Conseil ECOFIN. L’adoption formelle de la Directive s’est faite lors de la réunion du 25 mai et est entrée en vigueur le 25 juin dernier.
Les intermédiaires concernés
L’objectif principal de cette proposition de directive est de permettre une notification en amont des dispositifs de planification fiscale et de permettre leur échange automatique entre les administrations fiscales européennes. Ainsi, la nouvelle directive vise toute personne qui conçoit, commercialise, met en place, promeut, participe ou gère la mise en œuvre d’un dispositif transfrontalier devant faire l’objet d’une déclaration. Elle s’imposera donc notamment aux conseillers fiscaux, comptables, banques et juristes.
Mais la proposition cherche également à élargir plus encore son champ d’application en prévoyant que « toute personne qui, au vu des faits et circonstances pertinents et sur la base d’informations disponibles ainsi que de l’expertise et de la compréhension nécessaires en la matière, sait ou pourrait raisonnablement être sensé savoir qu’elle s’est engagée à fournir, directement ou indirectement par l’intermédiaire d’autres personnes, une aide, une assistance ou un conseil concernant la conception, commercialisation, organisation d’un dispositif transfrontalier déclarable ».
En cas de pluralité d’intermédiaires, chacun doit satisfaire à l’obligation de déclaration (sauf à prouver que la même information a déjà été déclarée). Lorsque l’intermédiaire est soumis dans sa juridiction au secret professionnel (ce qui couvre le cas des avocats en France), l’obligation de déclaration est reportée sur le contribuable lui-même.
Les dispositifs visés
L’obligation de déclarer un dispositif ne signifierait pas que celui-ci est dommageable, mais simplement qu’il mérite un examen approfondi. Les marqueurs des schémas visés sont plus limités que dans la proposition d’origine mais couvrent toujours un périmètre très large. En effet, certains Etats membres, comme la France, l’Allemagne ou l’Espagne souhaitent utiliser cette directive comme un outil de collecte de données, plutôt que comme un moyen de dissuasion.
Parmi les marqueurs retenus, seuls certains d’entre eux ne seront amenés à jouer que si le dispositif en cause vise principalement à l’obtention d’un avantage fiscal (clause de confidentialité de non-divulgation du dispositif aux autorités fiscales, transfert de pertes, transformation d’une catégorie de revenus en une autre catégorie moins taxée ou exonérée, etc.). Les autres joueront de façon autonome (dispositifs permettant que les mêmes actifs bénéficient des règles d’amortissement dans plusieurs pays, permettent aux mêmes revenus de bénéficier d’une réduction d’impôt dans plusieurs juridictions, ne respectent pas les principes internationaux et de l’Union en matière de prix de transfert). Le marqueur relatif aux transactions transfrontalières avec les juridictions dont le taux d’impôt sur les sociétés est inférieur à 35 % du taux d’impôt statutaire moyen dans l’UE, a été finalement rejeté.
Les sanctions
La Directive laisse aux Etats membres dans leur texte de transposition le soin de fixer les sanctions et de s’assurer qu’elles soient « effectives, proportionnées et dissuasives ».
Le calendrier de mise en œuvre
Les nouvelles obligations de déclaration s’appliqueront à partir du 1er juillet 2020 et le premier échange automatique d’informations devrait intervenir le 31 octobre 2020 au plus tard (les Etats membres seront obligés d’échanger les informations tous les trois mois, dans un délai d’un mois à compter de la fin du trimestre durant lequel les informations ont été transmises). Toutefois, la date d’entrée en vigueur de la Directive marque le point de départ de l’obligation déclarative dans la mesure où toutes les opérations visées intervenues entre le 25 juin 2018 et le 1er juillet 2020 devront être déclarées entre le 1er juillet 2020 et le 31 août 2020.