Documents obtenus de tiers : portée de l’obligation de communication de l’Administration

La CAA de Versailles se prononce sur la portée de l’obligation de communication de l’Administration, prévue à l’article L. 76 B du LPF, dans l’hypothèse plus particulière de documents bancaires.

Rappel

En cas d’utilisation d’informations contenues dans des documents obtenus auprès de tiers en application de l’article L. 76 B du LPF, l’Administration est tenue (BOI-CF-PGR-30-10, 30 octobre 2019, n°200) :

  • d’informer le contribuable de la teneur et de l’origine des renseignements et documents obtenus auprès de tiers, sur lesquels elle s’est fondée pour établir l’imposition ;
  • de communiquer, sur demande du contribuable avant la mise en recouvrement des impositions, les documents qu’elle a ainsi invoqués.

Ces 2 obligations sont distinctes mais liées.

Le non-respect par l’Administration de l’une ou l’autre des garanties prévues par l’article L. 76 B du LPF, qui sont attachées au respect des droits de la défense dans le cadre des opérations de contrôle, constitue une erreur substantielle qui entache la procédure d’irrégularité et entraîne la décharge des impositions fondées sur l’utilisation de ces renseignements et documents (BOI-CF-PGR-30-10, 30 octobre 2019, n°210).

L’histoire

Une société a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2014 et 2015, à l’issue de laquelle l’Administration lui a adressé une proposition de rectification réhaussant le montant de l’impôt sur les sociétés dû.

La société a contesté le redressement, estimant notamment que l’Administration ne s’était pas conformée à son obligation de communication au sens des dispositions de l’article L. 76 B du LPF.

La décision de la CAA de Versailles

Le litige portait sur le défaut de communication à la société de copies de chèques qu’elle avait elle-même émis, et que l’Administration avait obtenues auprès de l’établissement bancaire où la requérante disposait d’un compte bancaire.

La Cour rappelle, en 1er lieu, les contours de l’obligation de communication prévue à l’article L. 76 B du LPF, et la dispense dont bénéficie l’Administration s’agissant des documents qui, à la date de la demande de communication, « sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu’à l’Administration » (CE, 27 juin 2019, n°421373, repris au BOI CF-PGR-30-10, 30 octobre 2019, n°350.

Au cas d’espèce, elle juge que l’Administration ne pouvait pas bénéficier d’une telle dispense.

Elle souligne, en effet, que la société n’était plus en possession des chèques émis au bénéfice de tiers, et que si elle pouvait en demander une copie à son établissement bancaire, une telle démarche ne lui aurait, pour autant, pas permis de vérifier la teneur et l’authenticité des documents obtenus par l’Administration.

Aussi, l’Administration ne pouvait pas faire valoir que les documents litigieux étaient directement et effectivement accessibles à la société requérante dans les mêmes conditions qu’à elle-même.

La Cour conclut, en conséquence, à la méconnaissance de la garantie prévue à l’article L. 76 B du LPF et prononce la décharge des impositions supplémentaires.

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.