La CAA de Toulouse juge que le montant des droits retenus pour l’application de la pénalité de 40 % prévue à l’article 1728 du CGI doit être minoré du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) que la société était en droit d’imputer sur son IS au titre de l’exercice considéré.
Rappel
Le défaut ou le retard de production d’une déclaration ou d’un acte comportant des éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt entraîne l’application, « sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l’acte déposé tardivement », d’une majoration dont le taux varie de 10 % à 80 % en fonction de la gravité du manquement constaté (CGI, art. 1728).
Dans ses commentaires au BOFiP, l’Administration se borne à indiquer que la base de calcul de ces majorations est en principe identique à celle de l’intérêt de retard (BOI-CF-INF-10-20-10, 8 mars 2017, n°20), c’est-à-dire « le montant des droits en principal qui n’ont pas été acquittés dans les délais » (BOI-CF-INF-10-10-20, 7 juillet 2021, n°30 et s.).
Le Conseil d’État a tout récemment indiqué, dans un avis rendu en matière d’impôt sur le revenu, que le montant des droits mis à la charge du contribuable ayant manqué à ses obligations déclaratives, pour la détermination de l’assiette des majorations prévues à l’article 1728, correspond au montant des droits dû tel que mentionné au rôle, sans déduction des éventuels acomptes et retenues déjà versés (avis du 4 janvier 2024, n°488915 et 488916).
L’histoire
A l’issue d’une vérification portant sur l’exercice 2017, l’Administration a remis en cause la déductibilité de provisions comptabilisées par une société et lui a réclamé des rappels d’IS assortis de la majoration de 40 % prévue à l’article 1728 du CGI.
La société a contesté l’assiette de la majoration retenue par l’Administration, laquelle avait été calculée sur le montant de son IS dû avant imputation de sa créance de CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, codifié à l’article 244 quater C ancien du CGI, et supprimé à compter du 1er janvier 2019).
Elle considérait, au contraire, que la majoration devait être déterminée sur une assiette correspondant aux droits effectivement éludés mis à sa charge, c’est-à-dire après imputation de sa créance de CICE.
La décision de la CAA de Toulouse
La CAA reprend d’abord les principes dégagés par le Conseil d’Etat dans son avis de janvier 2024 précité, et rappelle qu’en instaurant les pénalités prévues à l’article 1728 du CGI, le législateur a entendu améliorer la prévention et renforcer la répression des défauts ou retards volontaires de déclaration de base d’imposition ou des éléments retenus pour la liquidation de l’impôt. Ainsi, l’assiette de ces pénalités correspond au montant des droits dû, sans déduction des éventuels acomptes déjà versés (transposition implicite de l’avis en matière d’IS).
Elle juge ensuite que, dès lors que le CICE a pour effet de diminuer le montant d’IS dû par le contribuable (i.e. crédit d’impôt imputé sur l’IS dû par les entreprises lorsqu’elles s’acquittent spontanément de leurs obligations de déclaration et de liquidation de l’impôt), celui-ci ne constitue pas une simple modalité de paiement de l’impôt, mais intervient dans le calcul de l’impôt, dans la mesure où il a pour effet de diminuer le montant des droits dus par le contribuable.
La Cour en conclut que la pénalité de 40 % devait, au cas d’espèce, être appliquée sur le montant des droits mis à la charge de la société, déduction faite du CICE figurant sur son relevé de solde et qu’elle était en droit d’imputer sur le montant de l’IS au titre de l’exercice considéré.
Notons que cette solution a été rendue sur conclusions contraires du rapporteur public, qui arguait que le CICE n’avait aucune incidence sur la cotisation d’IS, dès lors qu’il n’intervenait qu’au stade du paiement de celui-ci.
Cette décision – qui aurait mérité d’être confirmée par le Conseil d’Etat (aucun pourvoi ne semble avoir été formé) – devrait être étendue à l’imputation de tout autre crédit d’impôt.