Association : la liberté n’exclut pas le contrôle

La liberté est un principe fondateur du droit des associations consacré par la loi du 1er juillet 1901. Cependant, cette liberté reste encadrée, notamment lorsqu’il s’agit de bénéficier de dispositifs de faveur mobilisant des fonds publics, tel que le dispositif du mécénat.

Ainsi, seules les associations respectant les conditions strictes d’éligibilité fixées par la loi, peuvent émettre des reçus fiscaux permettant à leurs donateurs de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu pour les particuliers, ou d’impôt sur les sociétés pour les entreprises. C’est également ce dispositif qui permet à certaines associations de percevoir des dons exonérés de droits de mutation à titre gratuit (à défaut un droit égal à 60 % du montant du don pourrait être perçu par l’administration fiscale).

On comprend bien l’enjeu du dispositif pour les associations, mais également le potentiel manque à gagner pour l’Etat en cas d’application non justifiée par les structures de ce régime fiscal de faveur…

Il ne suffit pas d’être une association dite « loi 1901 » à but non lucratif pour pouvoir émettre ce fameux reçu fiscal… mais il n’est pas non plus indispensable de disposer d’un agrément de l’administration fiscale (« rescrit »).

La Cour des comptes, dans un référé du 8 décembre 2020 adressé au Premier Ministre et récemment rendu public, pointe la singularité française de ce dispositif en principe applicable sous la seule responsabilité de l’association sans autorisation préalable de l’Administration. Elle relève ensuite que les contrôles réalisés par l’administration fiscale demeurent peu nombreux et peu approfondis en la matière avant de recommander expressément que le nombre et la portée des contrôles de la DGFiP soient renforcés sur les associations.

En pratique, de nombreuses associations pensent être dans leur droit en accordant à leurs donateurs une réduction d’impôt par la remise d’une attestation. Cependant, les conditions d’éligibilités au dispositif mécénat sont souvent mal connues ce qui créé un risque non identifié par les structures concernées qui porteront seules la sanction en cas de contrôle.

Dans un contexte où le mécénat peut être une source de financement alternative à la baisse des subventions publiques, précieuse pour la pérennité des projets associatifs, la sécurisation en amont du caractère non lucratif de la structure bénéficiaire ainsi que du respect de l’ensemble des conditions requises pour percevoir des dons « défiscalisés » est une précaution indispensable lorsque l’on connait la sanction attachée à la remise en cause du dispositif.

En effet, l’administration fiscale serait notamment en droit de condamner l’association bénéficiaire au paiement d’une amende égale à la réduction d’impôt correspondant au montant du don pour lequel elle aurait émis un reçu fiscal non justifié. A cette amende peuvent s’ajouter toutes les conséquences de la remise en cause de l’exonération du don aux droits de mutation à titre gratuit ainsi que du caractère non lucratif de l’organisme, le cas échéant.

Pour se sécuriser, la tentation peut être forte de présenter spontanément un rescrit non suffisamment préparé, avec le risque d’aboutir soit au rejet de la demande, soit à un accord dont la portée serait contestable. En effet, une éventuelle réponse positive ne vaudrait que pour la situation décrite par la structure. Ainsi seul un rescrit favorable rendu sur la base d’une présentation réelle et objective de l’association est susceptible d’engager l’administration et protège la bénéficiaire jusqu’au jour où une évolution remet en cause la situation de fait sur laquelle l’Administration a pris sa position (développement d’une nouvelle activité, restructuration, etc.).

Dans ce contexte, la sécurisation juridique doit passer par la réalisation en amont d’un diagnostic d’éligibilité au regard des dispositions des articles 200 et 238 bis du Code Général des impôts à la lumière de la doctrine administrative applicable, pour une mise en conformité préalable au dépôt éventuel d’une procédure de rescrit documentée et exhaustive, si nécessaire.

Ce signal fort invite à la vigilance renforcée les dirigeants d’associations à qui nous ne pouvons que recommander de mener cette analyse avant d’accepter un don manuel.

Mikael Eveno

Mikaël est en charge du développement de l’activité sur la Région Occitanie et la zone Méditerranée. Fort de 14 années en tant qu’Associé et de son expérience à la tête […]

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Stéphanie Vandalle

Stéphanie Vandalle, Avocat Associée, titulaire d’une mention de spécialisation en droit fiscal, est responsable du bureau de Lille et anime une équipe pluridisciplinaire. Stéphanie conseille ses clients français et étrangers […]

Elise Fromonot

Elise a rejoint le bureau de Montpellier de Deloitte Société d’Avocats en tant qu’avocate-manager au sein du département tax. Elle intervient depuis une dizaine d’années auprès des particuliers, des entreprises […]