Coup d’accordéon : le prix d’acquisition des titres cédés ne peut être majoré de celui des titres annulés

Pour le calcul de la plus-value imposable en cas de cession par une personne physique de titres souscrits à l’issue d’un coup d’accordéon, le prix d’acquisition de ces titres ne peut être majoré des sommes acquittées pour acquérir les titres annulés.

En l’espèce, un contribuable personne physique avait acquis, entre 2000 et 2002, 6 618 des 20 000 actions d’une SA pour un prix total de 72 900 €. En 2003, la société a décidé de procéder à un « coup d’accordéon ». Elle a donc réduit son capital social à zéro par apurement des pertes, sous la condition suspensive d’une augmentation dudit capital. Le contribuable a ainsi acquis (sans bénéficier d’un droit préférentiel de souscription), dans un premier temps, 2 100 des 10 300 actions émises à l’occasion de cette augmentation de capital réalisée en 2003, puis, dans un second temps, 7 983 actions supplémentaires entre 2003 et 2007, pour enfin céder la totalité de ses 10 083 actions le 28 mai 2008. Pour la détermination de la plus-value imposable, l’Administration s’est opposée à ce que le prix d’acquisition des titres cédés soit augmenté des sommes acquittées par le contribuable pour l’acquisition des titres annulés.

Le Conseil d’Etat confirme cette analyse en jugeant que la plus-value soumise à l’impôt sur le revenu doit être strictement déterminée par différence entre le prix de cession des titres, le cas échéant diminué des frais inhérents à la cession, et leur prix d’acquisition, éventuellement augmenté des frais et taxes acquittés à cette occasion. Dans le cas où les titres cédés ont été souscrits après réduction du capital de la société, il n’y a ainsi pas lieu d’ajouter à leur prix d’acquisition, les sommes qui ont été engagées pour acquérir les titres annulés. Le Conseil d’Etat ne partage pas la position plus ouverte de la CAA de Versailles de retenir comme prix effectif d’acquisition des actions la valeur totale des contreparties que le cédant a dû fournir pour en devenir propriétaire (7 décembre 2017, n° 17VE00081).

Ce faisant, le juge prend pour l’imposition des plus-values des particuliers une position différente de celle qu’il retient pour les plus-values des sociétés pour le calcul desquelles il admet que le coût d’acquisition des titres cédés puisse être majoré des suppléments d’apport versés par l’actionnaire dans le cadre d’une opération de coup d’accordéon (CE, 22 janvier 2010, n° 311339, Prédica).

Selon le rapporteur public, si « le terme « prix effectif d’acquisition » est un peu plus précis que celui de « coût d’acquisition » figurant à l’article 38 quinquies de l’annexe III au CGI », cette différence ne paraissait pas faire obstacle à l’application de la même solution aux personnes physiques. Toutefois, on retiendra qu’il soulevait deux éléments au soutien de la thèse inverse :

  • L’article 150-0 D, 12 du CGI prévoit une liste limitative de cas dans lesquels les pertes constatées en cas d’annulation de titres sont assimilables à des moins-values imputables sur les plus-values de même nature. Or, ne figurent pas sur cette liste les opérations de coup d’accordéon
  • Par deux fois, le législateur a rejeté un amendement prévoyant qu’en cas de cession à titre onéreux de titres reçus lors d’un coup d’accordéon, la durée de détention des titres aurait été décomptée, pour l’application de l’abattement pour durée de détention, à partir de la date de souscription ou d’acquisition des titres annulés – suggérant ainsi une continuité – (loi du 6 août 2015 dite loi Macron et PLFR 2015)

Pour autant la solution retenue par le Conseil d’Etat est très sévère pour le contribuable.

L’analyse aurait pu être différente si le contribuable avait bénéficié d’un droit préférentiel de souscription des actions, et s’il avait été fait application de la règle du prix moyen pondéré (CGI, art. 150-0 D, 3), puisqu’en ce cas, les suppléments d’apport réalisés lors de l’augmentation de capital auraient augmenté le prix d’acquisition initial des titres annulés.

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Patrick Fumenier

Patrick Fumenier a été avocat associé en charge de développer le knowledge management au sein de Deloitte Société d’Avocats de septembre 2016 jusqu’à son départ du Cabinet en janvier 2020. […]