Dette senior et financement syndiqué : de quoi parle-t-on ?

Cet article a été publié pour la première fois sur La Lettre M, et est reproduit sur ce blog avec l’autorisation de ses auteurs.

Acquisition de société rime avec dette senior et financement syndiqué. Derrière cette sémantique se trouvent bien des crédits bancaires (un taux, une durée, des garanties), mais aussi un peu plus que cela. Le point avec Christophe Duberry, avocat directeur, Département Corporate M&A, chez Deloitte Société d’Avocats.

Comment acquérir une société ?

L’opération d’acquisition des titres d’une société – la cible – est généralement réalisée par une holding créée à cet effet. Après la réalisation d’audits financiers, juridiques et fiscaux et la négociation du prix d’acquisition, elle signera un protocole d’acquisition et une convention de garantie d’actif et de passif (la GAP). Elle centralisera toutes les ressources nécessaires au financement de l’acquisition : le crédit bancaire, mais aussi des fonds propres (apports de titres de la cible, augmentation de capital) et/ou quasi-fonds propres (emprunt obligataire), avec l’intervention éventuelle de fonds d’investissement.

Quelle est la particularité de ce financement ?

Le crédit bancaire, miroir de l’acquisition, sera calibré en fonction de la projection des dividendes de la cible sur sa durée ; dividendes dont la remontée annuelle sur la holding en permettra le remboursement. La cible rembourse ainsi le crédit bancaire ayant servi à l’acquisition de ses titres, générant un effet de levier financier. Soumis à un taux d’intérêt révisable, il sera divisé en deux tranches : une tranche A, amortissable annuellement, d’une durée de six à sept ans, adossée sur les dividendes ; et une tranche B, amortissable in fine, à horizon six à huit ans. Une clause de remboursement anticipé obligatoire partiel du crédit sera même prévue en cas de mise en jeu de la GAP postérieurement à l’acquisition. La pratique parle de dette senior car son remboursement intégral est prioritaire à celui des autres sources de financement du prix d’acquisition, notamment en présence d’un emprunt obligataire.

Pourquoi parler de financement syndiqué ?

Plusieurs banques vont participer à ce crédit selon un standard international édicté par la Loan Market Association : une convention de crédit unique sera commune à l’ensemble des banques. Les banques auront la possibilité de syndiquer, c’est-à-dire « céder » à une autre banque leur participation au crédit. Un pool bancaire sera mis en place, avec à sa tête un arrangeur et agent du crédit qui en fluidifiera le fonctionnement. L’arrangeur et agent du crédit deviendra l’intermédiaire entre l’emprunteur et les banques pendant la vie du crédit et jouera le rôle de chef d’orchestre du pool bancaire. Il recevra les remboursements de l’emprunteur, à charge pour lui de reverser à chaque banque sa quote-part. Il sera également le destinataire des différentes informations provenant de l’emprunteur. Il animera le pool bancaire lorsque celui-ci devra prendre certaines décisions selon des règles de majorité prévues dans la convention de crédit.

 

Christophe Duberry

Christophe est avocat  du département M&A du cabinet Deloitte Société d’Avocats. Il a rejoint le cabinet en 2020. Il intervient principalement dans les domaines suivants : Corporate & Structured Finance […]