La consultation publique relative au régime d’imposition des gains réalisés dans le cadre des management packages s’est achevée le 22 octobre 2025 (article 163 bis H du code général des impôts (CGI) issu de l’article 93 de la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025). Dans l’attente de la publication de la version définitive du BOFiP, nous vous proposons une série d’articles dédiés, mettant en lumière, certains aspects spécifiques de ce texte et de ses implications pour les contribuables.
Les premiers commentaires du projet de BOFiP pour consultation sur le nouveau régime des management packages (article 163 bis H du CGI) marquent un tournant pour leur fiscalité. Se pose néanmoins toujours la question du traitement fiscal de l’avantage à l’entrée. Ce point, parfois négligé dans les schémas d’actionnariat salarié et d’investissement, est pourtant un enjeu central pour les DRH, dirigeants et investisseurs.
L’avantage à l’entrée : quel signal de l’Administration ?
Une chose est certaine : le nouveau régime fiscal des management packages exclut expressément les avantages résultant de l’acquisition ou de la souscription de titres à un prix inférieur à leur valeur réelle à leur date d’acquisition ou de souscription.
Si ce principe semble clair, son application en pratique laisse place à de nombreuses incertitudes.
La règle semble posée par la doctrine fiscale[1] : lorsque les titres sont souscrits ou acquis à un prix inférieur à leur valeur réelle par un salarié ou un dirigeant, la différence constitue un avantage imposable dès l’entrée. Cet avantage est alors assimilé à une rémunération et relève de l’impôt sur le revenu, selon les règles applicables aux traitements et salaires.
Ce principe s’appliquerait à tous les titres éligibles au régime (actions ordinaires, actions de préférence, BSA, OCA, etc.), sans distinction de nature ou de structure du package, mais hors régimes légaux dits qualifiés (AGA, BSPCE ou stock-options).
L’avantage à l’entrée peut d’ailleurs être jusqu’à 100 % de la valeur des titres, comme dans certains plans étrangers d’actionnariat salarié non qualifié (RSU, PSU, etc.).
Ainsi, l’Administration précise que l’entrée dans le champ d’application du régime spécifique d’imposition ne dépend pas des modalités d’attribution, d’acquisition ou de souscription des titres. Elle réside dans les conditions de réalisation du gain net lors de la disposition, la cession, la conversion ou la mise en location de ces titres permettant d’établir que ce gain net est acquis, non à raison de la qualité d’investisseur du cédant, mais en contrepartie de ses fonctions de salarié ou de dirigeant.
Par ailleurs, elle ajoute que l’acquisition des titres à un prix inférieur à leur valeur réelle à la date d’acquisition ou de souscription ne permet pas de conclure que le gain réalisé ultérieurement, notamment lors de la cession des titres, a été acquis en contrepartie des fonctions de salarié ou de dirigeant du bénéficiaire (BOI-RSA-ES-20-60-20250723 §170 et 180).
L’Administration s’appuie ici sur la jurisprudence du Conseil d’État du 13 juillet 2021 qui distinguait explicitement la taxation de l’avantage à l’entrée du traitement du gain à la sortie.
Une valorisation qui engage
La doctrine fiscale insiste sur la notion de « valeur », ce qui implique la nécessité d’une valorisation rigoureuse et parfaitement documentée des titres à la date d’acquisition ou de souscription. Toute approximation expose à un risque potentiel de redressement, d’autant que cette valorisation sert de référence pour déterminer l’avantage imposable à l’entrée.
Pour les entreprises, cela implique :
- de justifier la méthodologie retenue (comparables, flux futurs, expertises indépendantes, etc.) ;
- de consigner l’ensemble des éléments ayant conduit à la fixation du prix ; et
- d’informer précisément les bénéficiaires sur les conséquences fiscales immédiates.
Quel impact sur le calcul du gain net réalisé à la cession ?
Dans le cadre du nouveau régime des management packages, le gain net est déterminé en déduisant le « prix payé pour la souscription ou l’acquisition ».
La doctrine fiscale précise, d’ailleurs, que le prix payé pour l’acquisition ou la souscription des titres correspond au prix effectivement payé à cette fin par le bénéficiaire.
Cela étant, une question reste en suspens : le prix d’acquisition retenu pour le calcul est-il le prix effectivement payé ou bien la valeur réelle à l’entrée ?
Si l’Administration retient, pour le calcul du gain net de cession ou de disposition, le prix « effectivement payé » sans prendre en considération un avantage déjà imposé lors de l’attribution (à l’entrée), une telle méthode conduirait à une double imposition.
En effet :
- d’une part, l’avantage attribué à l’entrée serait soumis à l’impôt sur le revenu au titre des traitements et salaires ; et
- d’autre part, le gain net de cession comprendrait à nouveau le montant de cet avantage initialement imposé, aboutissant ainsi à une imposition redondante sur la même base imposable.
On pourra espérer que l’Administration apportera plus de précisions à ce sujet dans la prochaine version de sa doctrine.
Un enjeu de sécurité et d’anticipation
Pour les bénéficiaires, la charge fiscale immédiate de l’avantage à l’entrée peut surprendre : elle intervient avant même toute liquidité perçue, bien que la question d’une éventuelle prescription pourrait trouver à se poser.
Pour les entreprises, c’est la robustesse de la valorisation et la qualité de la documentation qui permettront de sécuriser le schéma et d’éviter les risques de redressements, également sur les gains réalisés à la sortie.
Les équipes de Deloitte Société d’Avocats se tiennent à votre disposition pour vous accompagner dans la sécurisation et la structuration de vos politiques de rémunération et d’investissement dans ce nouvel environnement réglementaire en pleine évolution.
À lire également
[1] Lecture combinée du BOI-RSA-ES-20-60-20250723 §180 et du BOI-RSA-ES-20-10-20-50-20250723 §20.
