Notification d’une proposition de rectification via une société de messagerie

Le TA de Paris rappelle que si une proposition de rectification peut régulièrement être notifiée à un contribuable via une société de messagerie (Chronopost en l’espèce), c’est à la condition que l’Administration puisse apporter la preuve de la régularité de cette notification.

Eléments de contexte

En principe, la proposition de rectification doit être adressée par l’Administration au contribuable par voie postale, sous pli fermé (LPF, art. R.103-1), en recommandé avec avis de réception.

L’Administration précise, à cet égard, que l’avis de réception postal permet, non seulement de prouver que le contribuable a bien reçu la proposition de rectification, mais encore de déterminer le point de départ du délai de réponse prévu à l’article R. 57-1 du LPF (BOI-CF-IOR-10-30, 27 février 2014, § 120).

Le Conseil d’État a déjà fait preuve de souplesse par le passé s’agissant du formalisme de la notification d’une proposition de rectification.

Il a ainsi jugé qu’en l’absence de dispositions le lui imposant, il n’est pas fait obligation à l’Administration de recourir exclusivement à l’envoi d’une notification de redressement par lettre recommandée avec accusé de réception, mais qu’elle doit, si elle utilise d’autres voies, notamment celle d’une société de messagerie (Chronopost en l’espèce), établir la date de présentation des plis, et si le pli n’a pas été retiré, la distribution d’un avis de passage par des modes de preuve « offrant des garanties équivalentes » (CE, 8 février 2012, n°326125, Beladina, plus récemment, CE, 25 mai 2018, n°408443).

La CAA de Paris est récemment allée un cran plus loin, en jugeant régulière – sous les mêmes réserves – la proposition de rectification notifiée à un contribuable via un courriel, contenant un lien vers l’application « Escale » (CAA Paris, 28 juin 2024, n°22PA05281).

L’histoire

Une société a fait l’objet d’une vérification de comptabilité (exercices 2017 à 2019), à l’issue de laquelle l’Administration lui a adressé une proposition de rectification, via la société de messagerie Chronopost.

La société a contesté la régularité de la procédure d’imposition, faisant valoir qu’elle n’avait jamais reçu notification de la proposition de rectification.

La décision du TA de Paris

Le TA de Paris reprend d’abord le considérant de principe dégagé par le Conseil d’État dans sa décision Beladina précitée.

Il juge, au cas d’espèce, que l’Administration n’apportait pas la preuve de la régularité de la notification au contribuable de la proposition de rectification litigieuse.

L’Administration se prévalait d’une vignette apposée sur le contrat conclu avec Chronopost portant la mention « Destinataire avisé. Non réclamé dans les délais ».

Le Tribunal souligne que l’historique du suivi de l’expédition du pli litigieux fait, au contraire, apparaître que :

  • Le contribuable était absent lors de la première présentation et qu’il avait été impossible de laisser un avis de passage ;
  • Aucune autre présentation n’avait eu lieu avant que le pli ne soit retourné à l’Administration.

Cette décision bienvenue rappelle que si l’Administration choisit de déroger à l’envoi d’une proposition de rectification par lettre recommandée avec accusé de réception, il lui incombe d’établir la régularité de la notification.

Rappelons enfin qu’un décret du 22 novembre 2024 est venu assouplir les modalités de notification des AMR, pour permettre notamment à l’administration fiscale de recourir à une société de messagerie, ou à une remise sous forme dématérialisée – en précisant le formalisme devant alors être respecté en pareille hypothèse.

  • TA Paris, 7 janvier 2025, n°2224433
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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.