La CAA de Toulouse retient l’existence d’une erreur comptable délibérée au titre de l’inscription d’une dette au mauvais poste de bilan.
Rappel
Les erreurs (de droit ou de fait) constatées dans chacun des bilans clos durant la période ouverte au droit de vérification de l’Administration peuvent être rectifiées, tant par celle-ci lorsqu’elles jouent au profit du contribuable, que par ce dernier lorsqu’elles ont joué à son détriment (BOI-BIC-BASE-40-10, § 20, 13 mai 2013).
A cet égard, est considérée comme une erreur, toute irrégularité, inexactitude ou omission qui résulte d’une « appréciation purement objective de faits matériels » par un contribuable de bonne foi (par exemple, omission en comptabilité de frais déductibles ou d’éléments d’actif ou de passif, ou encore comptabilisation pour une valeur inexacte).
Ces erreurs ne peuvent toutefois donner lieu à rectification que dans la mesure où elles ont été commises de bonne foi.
A l’inverse, une erreur comptable délibérée (omission volontaire de recettes ou déduction de charges fictives, par exemple) n’est opposable qu’au contribuable, et non à l’Administration, peu important d’ailleurs que le but dans lequel l’écriture erronée a été délibérément réalisée n’ait pas été d’éluder l’impôt (CE, 12 mai 1997, n°160777).
On rappellera que le Conseil d’Etat a tout récemment jugé que la mauvaise identification d’un créancier en comptabilité peut constituer une erreur comptable délibérée, alors même qu’une telle erreur n’a emporté aucun préjudice pour le Trésor (CE, 22 mars 2024, n°471089, Sté Jet Foncière). Il considérait, auparavant, qu’une erreur comptable, qu’elle soit rectifiable ou délibérée, qui n’entraîne pas de variation de l’actif net, n’a pas de conséquence fiscale (dette d’une société transférée par erreur d’un compte de passif à un autre compte de passif, CE, 24 mars 2013, n°355035).
L’histoire
A l’issue d’une vérification de comptabilité, l’Administration a constaté qu’au cours de l’exercice clos en 2018, une société avait comptabilisé à son passif des factures de loyers dus à une SCI, par application d’un bail conclu pour des locaux dans lesquels elle exerçait son activité, au crédit du compte-courant d’associé de son gérant et principal associé.
Elle a considéré que la société avait commis 2 erreurs distinctes :
- L’inscription délibérée à son passif d’une dette non justifiée envers son gérant et principal associé ;
- Une omission – corrélative – également délibérée, d’inscrire à son passif l’existence d’une dette identique à l’égard de la SCI, à hauteur des sommes inscrites au crédit du compte-courant d’associé.
L’Administration a rectifié la 1re erreur et opposé la 2nde au contribuable, ce qui a eu pour conséquence une augmentation de l’actif net au cours de l’exercice considéré.
La décision de la CAA de Toulouse
Devant la Cour, la société tentait de faire valoir qu’il s’agissait d’une erreur comptable involontaire.
Elle se prévalait, à cet égard :
- de l’absence de cession de créance entre la SCI et son gérant et principal associé ;
- de la circonstance que la SCI était soumise au régime des sociétés de personnes, et que son gérant et associé se trouvait également être, à hauteur de 90 %, l’associé de la SCI ;
- de la déclaration par la SCI de l’ensemble des loyers perçus ou à percevoir.
La CAA de Toulouse juge que ces éléments n’établissent pas la réalité d’une erreur comptable involontaire et confirme le redressement.
Elle semble ainsi faire sienne la position stricte dégagée par le Conseil d’Etat dans sa récente décision Sté Jet Foncière précitée.
On observera toutefois qu’ici, l’Administration ne semble pas avoir fait application des pénalités de 40 % pour manquement délibéré.