Nouvelle convention franco-belge : Les dispositions phares

Aperçu des mesures les plus significatives de la convention signée entre la France et la Belgique le 9 novembre 2021. La date d’entrée en vigueur n’est pas encore fixée.

La nouvelle convention se substituera à la convention du 10 mars 1964, actuellement en vigueur, telle que modifiée par le MLI.

Cette nouvelle convention est, dans les grandes lignes, conforme à la convention modèle OCDE, et très inspirée du texte du MLI (instrument multilatéral visant à mettre en musique les actions issues du plan BEPS en modifiant les conventions bilatérales conclues).

Selon nos informations , le projet de loi de ratification est prêt côté français, même s’il ne figure pas encore à l’ordre du jour des travaux parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Convention franco-belge et MLI

Dès lors que la nouvelle convention fiscale a été signée postérieurement au dépôt par la France et la Belgique de leurs instruments de ratification au titre du MLI, elle ne sera pas regardée en tant que telle, comme couverte par le MLI.

En revanche, elle intègre un certain nombre de dispositions phares du MLI, à l’instar de la clause générale anti-abus du « Principal Purpose Test » (art. 7 du MLI), qui y est reprise à l’identique (art. 28).

La convention inclut, en son article 5 relatif à l’établissement stable, la nouvelle notion d’agent dépendant, susceptible de conduire à la caractérisation d’un établissement stable (personne qui conclut habituellement des contrats, ou joue habituellement le rôle principal menant à la conclusion de contrats, qui de façon routinière, sont conclus sans modification importante par l’entreprise étrangère). Elle comporte également la clause visant à éviter artificiellement le statut d’établissement stable par des accords de commissionnaires.

En revanche, s’agissant des exceptions en faveur d’activités spécifiques (présence d’un établissement stable écarté, par exemple, pour des activités, de stockage, d’exposition, ou de livraison de marchandises), la convention n’ajoute pas, de manière systématique pour chacune des activités listées, la condition qu’elle présente un caractère préparatoire ou auxiliaire (et retient donc « l’option B » offerte par l’article 13 du MLI).

S’agissant des dividendes, la convention instaure une période de détention minimale et ininterrompue de 365 jours (cf. art. 8 du MLI), qui, couplée à une détention minimale directe de 10 % de la société distributrice, permettra de bénéficier d’une exonération de retenue à la source (art. 10).

La convention prévoit qu’en cas de double résidence d’une personne morale, celle-ci sera considérée comme un résident seulement de l’État où son siège de direction effective est situé (art. 4.3 de la convention, inspiré de l’art. 4 du MLI, au titre duquel la France avait formulé une réserve).

Par ailleurs, la convention contient, à l’article 1.2, des stipulations spécifiques s’agissant des entités transparentes, inspirées de l’article 3 du MLI – sur lequel la France avait pourtant émis une réserve.

Enfin, la convention comprend dans son article 9 relatif aux entreprises associées, l’ajustement prévu par le MLI dans l’hypothèse où un État contractant inclut dans les bénéfices d’une entreprise résidente, des bénéfices sur lesquels une entreprise de l’autre État contractant a déjà été imposée (art. 17 du MLI).

Points d’attention

Si la nouvelle convention est, dans les grandes lignes, conforme au modèle OCDE, nous attirons votre attention sur les points suivants :

  • Résident ( 4 et protocole [4]) : Si la définition de « résident d’un État contractant » est conforme à celle du modèle OCDE, la convention précise que seront considérés comme résidents de France, les sociétés de personnes, groupements de personnes ou autres entités analogues :
    • dont le siège de direction effective est en France ;
    • qui sont assujettis à l’impôt en France ; et
    • dont tous les porteurs de parts, associés ou membres sont, en application de la législation fiscale française, personnellement soumis à l’impôt à raison de leur quote-part dans les bénéfices de cette société de personnes ou de cette autre entité analogue.
  • Etablissement stable – chantier de construction ( 5. 3) : La convention prévoit que les chantiers de construction d’une durée supérieure à 9 mois seront considérés comme des établissements stables. Si cette durée dépasse celle prévue par la convention actuellement en vigueur (6 mois), elle demeure toutefois inférieure à la durée prévue par la convention modèle OCDE (12 mois).
  • Dividendes ( 10) : La nouvelle convention prévoit que les dividendes sont imposables dans l’État de résidence de leur bénéficiaire ainsi que dans l’État de source.

Toutefois, aucune RAS ne pourra être appliquée si le bénéficiaire effectif des dividendes est une société qui détient directement tout au long d’une période de 365 jours au moins 10 % de la société qui verse les dividendes. La RAS sera plafonnée à 12,8 % dans tous les autres cas.

Notons que la convention actuellement en vigueur prévoit également une répartition du droit d’imposer les dividendes. Conformément à l’instrument multilatéral par lequel la convention est couverte, les dividendes perçus par une entité détenant au moins 10 % du capital de la société distributrice tout au long d’une période de 365 jours sont soumis à une RAS de 10 %, la RAS étant de 15 % dans les autres cas.

Par ailleurs, la définition des dividendes est élargie (revenus soumis au régime des distributions par la législation fiscale française).

  • Intérêts ( 11) : Le droit d’imposer les intérêts sera exclusivement attribué à l’État de résidence du bénéficiaire effectif.

Notons que la convention actuellement en vigueur prévoit un partage du droit d’imposer, avec une RAS maximale de 15 %.

  • Redevances ( 12) : Les redevances provenant d’un État contractant et dont le bénéficiaire effectif est un résident de l’autre État contractant seront exclusivement imposables dans cet autre État.

La convention actuellement en vigueur réserve également le droit d’imposer à l’Etat de résidence du bénéficiaire des redevances.

  • Clauses de bénéficiaire effectif ( 10, 11 et 12) : Conformément au modèle de convention fiscale de l’OCDE, la nouvelle convention intègre au sein de ses articles relatifs aux dividendes, intérêts et redevances, des clauses de « bénéficiaire effectif ». Notons que la notion de bénéficiaire effectif n’apparaît pas dans la version actuellement en vigueur de la convention.
  • Gains en capital ( 13) : La convention comprend des dispositions spécifiques aux gains en capital tirés de l’aliénation d’actions, de droits ou de participations dans des entités tirant leur valeur principalement de biens immobiliers. Il est ainsi précisé que les gains qu’un résident d’un État contractant tire de l’aliénation d’actions ou de droits ou participations similaires, sont imposables dans l’autre État contractant si ces actions, droits ou participations similaires tirent directement ou indirectement plus de 50 % de leur valeur de biens immobiliers situés dans cet autre État. Contrairement à ce que prévoit l’instrument multilatéral, cette définition conventionnelle ne comprend pas de durée pour apprécier la prépondérance immobilière.
  • Par ailleurs, l’article 13.4 comprend, de manière nouvelle, une clause de participation substantielle applicable aux cédants personnes physiques qui attribue le droit d’imposer les gains tirés de l’aliénation d’actions ou de parts à l’Etat de résidence de la société dont les titres sont cédés sous certaines conditions.
  • Non-discrimination ( 23) : Le contenu de l’article est classique. On notera juste que la convention ne prévoit pas de clause de la nation la plus favorisée.
  • Applicabilité de dispositions françaises spécifiques (protocole [16]) : La nouvelle convention préservera la possibilité pour la France d’appliquer un certain nombre de ses dispositions de droit interne. Ainsi, demeureraient applicables les articles 123 bis, 115 quinquies, 209 B, 212 du CGI, ou d’autres dispositions analogues qui amenderaient ou remplaceraient les dispositions de ces articles.
  • Enfin on peut relever que la convention nouvelle inclut l’IFI (impôt sur la fortune immobilière) dans le champ des impôts français couverts.

Entrée en vigueur de la nouvelle convention franco-belge (art. 29)

Avant de pouvoir entrer en vigueur, la nouvelle convention doit être soumise à approbation parlementaire et ratification par la France et la Belgique, lesquelles devront ensuite mutuellement se notifier l’accomplissement de ces procédures.

La convention entrera en vigueur à la date de réception de la dernière de ces notifications, et ses dispositions s’appliqueront [i.e. remplaceront les dispositions prévues par la convention franco-belge de 1964, actuellement en vigueur] :

En France :

  • en ce qui concerne les impôts sur le revenu perçus par voie de RAS, aux sommes imposables après l’année civile au cours de laquelle la convention est entrée en vigueur ;
  • en ce qui concerne les impôts sur le revenu qui ne sont pas perçus par voie de RAS, aux revenus afférents à toute année civile/tout exercice commençant après l’année civile au cours de laquelle la convention est entrée en vigueur ;
  • en ce qui concerne les autres impôts, aux impositions dont le fait générateur interviendra après l’année civile au cours de laquelle la convention est entrée en vigueur.

En Belgique :

  • en ce qui concerne les impôts dus à la source, aux revenus attribués ou mis en paiement à partir du 1er janvier de l’année qui suit immédiatement celle de l’entrée en vigueur de la convention ;
  • en ce qui concerne les autres impôts sur le revenu, aux revenus de périodes imposables commençant à partir du 1er janvier de l’année qui suit immédiatement celle de l’entrée en vigueur de la convention ;
  • en ce qui concerne les autres impôts, aux impôts dus au titre d’événements imposables se produisant à partir du 1er janvier de l’année qui suit immédiatement celle de l’entrée en vigueur de la convention.
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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.