La CAA de Douai rappelle que les salariés intérimaires doivent être inclus dans l’effectif d’une entreprise de travail temporaire pour l’appréciation des seuils PME au sens du droit communautaire. Elle précise en outre qu’il convient de prendre en compte les données comptables agrégées et les effectifs cumulés de l’ensemble des sociétés qui lui sont liées pour lui refuser le remboursement immédiat de sa créance de CICE.
Le CICE a été institué en faveur des entreprises imposées à l’IS ou à l’IR d’après leur bénéfice réel, au titre des rémunérations qu’elles versent à leur personnel salarié dans la limite de certains plafonds. Dans la mesure où il est calculé à partir des rémunérations versées, en pratique, peuvent donc seulement en bénéficier les entreprises qui emploient du personnel salarié.
L’entreprise de travail temporaire peut bénéficier du CICE au titre des rémunérations versées aux salariés mis à disposition temporaire d’entreprises utilisatrices en application de l’article L. 1251-2 du Code du travail (BOI-BIC-RICI-10-150-10 04/04/2018 n°90).
En application de l’article 199 ter C du CGI, les entreprises peuvent imputer ce crédit d’impôt sur l’impôt dû. L’excédent de crédit d’impôt non imputé constitue une créance sur l’État d’égal montant. Cette créance peut être utilisée pour le paiement de l’impôt dû au titre des 3 années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s’il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l’expiration de cette période. Un remboursement immédiat de l’excédent est prévu pour certaines catégories d’entreprises, parmi lesquelles on retrouve les PME au sens du droit communautaire.
L’histoire
Une société exerçant une activité d’agence de travail temporaire a sollicité par voie de réclamation le remboursement immédiat du CICE obtenu au titre de l’année 2014.
L’Administration a rejeté cette réclamation, au motif qu’elle ne pouvait être regardée comme une PME communautaire au sens du règlement n°800/2008 de la commission européenne du 6 août 2008. L’affaire est portée au contentieux. En première instance, le TA de Rouen suit l’Administration, la société décide donc d’interjeter appel devant la CAA de Douai.
La décision
Dans ce contexte, la Cour rappelle que le II de l’article 199 ter C du CGI autorise le remboursement immédiat de cette créance lorsqu’elle est, notamment, constatée par une entreprise satisfaisant à la définition des « micro, petites et moyennes entreprises » au sens de l’annexe I au « règlement général d’exemption par catégorie » (antérieurement le règlement n°800/2008 de la Commission du 6 août 2008 et à ce jour le règlement n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014).
Dès lors, la Cour précise que :
- Selon ce règlement, la catégorie des PME est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le CA annuel n’excède pas 50 m€ ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 m€
- Sur l’effectif, par application de l’article L. 1251-1 du Code du travail, les personnes mises à la disposition d’une entreprise utilisatrice par une entreprise de travail temporaire sont liées à cette dernière par un contrat de travail, elles ont ainsi la qualité de salarié de cette entreprise de travail temporaire au sens du règlement. Elles doivent, par suite, être prises en compte pour la détermination de l’effectif de cette entreprise de travail temporaire pour l’appréciation de la qualification de micro, petite et moyenne entreprise, de même qu’elles sont prises en compte dans l’assiette du CICE (voir en ce sens CE 16 avril 2019 n°422868, min. c/ Sté Interaction Tertiaire).
- Sur la prise en compte des entreprises liées, à la lumière des dispositions de l’article 3 de l’annexe I au règlement (CE) n°800/2008, elle précise qu’il convient de prendre en compte les données comptables agrégées et les effectifs cumulés de l’ensemble des sociétés liées à cette entreprise (voir en ce sens BOI-BIC-RICI-10-150-30-10 01/06/2016 n°60 et s.).
La CAA de Douai en conclut que la société de travail temporaire visée ne satisfait pas à la définition des micro, petites et moyennes entreprises prévue par le règlement européen, dans la mesure où la prise en compte des données comptables agrégées et des effectifs cumulés de l’ensemble des sociétés qui lui sont liées ne lui permettent pas de respecter les seuils précités. Par conséquent, elle juge que cette dernière n’est pas fondée à demander la restitution immédiate de la créance de CICE en application de l’article 199 ter C, II du CGI.
Pour rappel, pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2019, le CICE est supprimé et remplacé par un allègement de cotisations sociales (Loi 2017-1837 du 30-12-2017 art. 86), sauf à Mayotte où il est maintenu. La grille d’analyse de la CAA relative à la notion de PME communautaire qui reprend en partie la position récente du Conseil d’État (CE 8e-3e ch. 16 avril 2019 n°422868, min. c/ Sté Interaction Tertiaire) et la doctrine administrative (BOI-BIC-RICI-10-150-30-10 01/06/2016 n°60 et s.) précitées est néanmoins susceptible d’être reprise pour d’autres dispositifs.
- Voir CAA Douai, 4e ch. du 12 nov. 2019, n°17DA01857, Sté Alternative travail temporaire