République du Congo : analyse des principales mesures de la loi de finances pour 2024

La Loi n°39-2023 du 29 décembre 2023 portant loi de finances pour l’année 2024 contient des mesures importantes pour les entreprises et les personnes. Voici notre analyse des principales nouveautés et modifications.

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Impôts directs

Dispositions diverses

Dans un premier temps, le nouvel article 115 D du Code Général des Impôts (CGI) prévoit que les provisions constituées par les établissements de crédits et autres entités juridiques du même secteur d’activité, conformément à la règlementation COBAC, sont désormais déductibles du résultat fiscal.

Par ailleurs, la loi de finances restaure le taux de 2 % en matière de Taxe Spéciale sur les Sociétés (TSS) pour les contribuables dont le résultat est resté déficitaire durant deux exercices consécutifs. Lorsque la taxe est perçue au taux de 2 %, elle n’est pas déductible de l’impôt sur le bénéfice des sociétés. Cependant, au cours du premier exercice dont le résultat devient positif, la moitié de la taxe payée au taux de 2 % devient déductible (article 171 du CGI).

Notons que la base d’imposition de cette TSS est constituée du chiffre d’affaires brut réalisé au cours du dernier exercice clos. Le taux de cette taxe s’élève en principe à 1 % de la base imposable avec un minimum de 1 million de francs CFA. Pour les sociétés dont le chiffre d’affaires est inférieur à 10 millions de francs CFA, ce minimum est de 500 000 francs CFA.

Enfin, la loi de finances restaure l’amende de 100 % et l’intérêt de retard de reversement de 5 % par mois, ou fraction de mois, en matière de retenue à la source de 10 %.

Procédures fiscales

Aménagement du dispositif relatif au défaut de présentation des pièces justificatives pendant la phase contradictoire

L’article 373 du CGI dispose désormais en son alinéa 6 que la production après la réception de la lettre de confirmation des redressements, des documents et autres pièces justificatives régulièrement demandées au cours de la phase contradictoire du contrôle fiscal est nulle. Il n’est donc plus possible de fournir ces pièces après la réception du courrier confirmant les redressements par l’autorité compétente.

Relèvement du seuil de compétence en matière de réclamation contentieuse

Le nouvel article 424 du CGI prévoit que la réclamation contentieuse doit être adressée à la Direction Générale des Impôts et des Domaines. C’est la date de réception par la Direction qui est opposable au contribuable et à l’administration fiscale. Lorsque le montant des droits contestés est supérieur à 1 milliards de francs CFA, le contribuable doit déposer une copie de la réclamation au Ministre des Finances.

De plus, de nouveaux seuils de compétence ont été introduits quant à l’autorité qui a compétence pour statuer sur ces réclamations. L’article 430 bis du CGI, issu de la loi de finances pour 2024 dispose que :

  • le Directeur Départemental des impôts et des domaines statue lorsque le montant de la réclamation est inférieur à 50 millions de francs CFA,
  • le Directeur Général des Impôts et des Domaines statue lorsque les droits et pénalités contestés sont inférieurs ou égaux à 1 milliard de francs CFA, mais supérieurs au seuil précédent, et
  • le Ministre chargé des Finances est compétent au-delà de 1 milliard de francs CFA.

Droits d’enregistrement

Plusieurs dispositifs afférents aux droits d’enregistrement ont été mis en place.

Extension du droit proportionnel de 1 % à certains actes

La loi de finances pour 2024 permet d’enregistrer au droit proportionnel de 1 % les conventions de cautionnement, de garanties et de contre-garanties autonomes, les lettres de droit de rétention, les contrats de gages, les actes de nantissements authentiques ou sous-seing privés, ainsi que les actes constatant des privilèges et hypothèques prévus par l’Acte Uniforme portant organisation des sûretés, d’une part, et toutes les sûretés non prévues par le droit OHADA et admises en République du Congo, d’autre part.

Enregistrement gratuit des contrats de prêts sous certaines conditions

Le nouvel article 226 du CGI dispose que les contrats de prêts qui visent l’investissement sont enregistrés gratuitement. Pour cela, les parties doivent présenter un plan d’investissement et le procès-verbal de l’Assemblée Générale ou de tout autre organe compétent ayant décidé du prêt.

À défaut de pouvoir présenter les documents précédents, le droit de 1 % prévu à l’article 237 du CGI s’applique.

Instauration d’un droit fixe de 100 000 francs CFA pour l’enregistrement des conventions de trésoreries intra-groupe

Le nouvel article 237 quinquies du CGI instaure un droit fixe de 100 000 francs CFA pour l’enregistrement des conventions de trésoreries passées entre sociétés de groupe, sous réserve de certaines conditions. L’enregistrement de cette convention doit se faire dans un délai de 3 mois.

Les conditions à respecter sont les suivantes :

  • Communiquer l’identité des entités du groupe et parties à la convention
  • Communiquer l’objet de la convention
  • Indication des liens capitalistiques entre les sociétés et parties prenantes
  • Mécanisme interne de financement indiquant l’option de financement choisie
  • Les conditions de rémunération interne, le rôle de la société « pivot » et la durée de la convention

Enfin, sont enregistrées au droit fixe de 1 % les conventions de trésorerie alternativement :

  • Entre sociétés n’appartenant pas au même groupe
  • Entre sociétés de groupe qui ne sont pas présentées à l’enregistrement ou présentées après le délai de 3 mois
  • Entre sociétés de groupe ne comportant pas les informations obligatoires mentionnées ci-dessus

TVA

Transposition de la directive CEMAC du 10 novembre 2022, portant harmonisation des législations des États membres en matière de TVA

La loi de finances a transposé en droit interne la directive n°11/22-CEMAC-UEAC-010A-38 du 10 novembre 2022, qui a pour objectif d’harmoniser la TVA entre les États membres de la CEMAC, dont fait partie la République du Congo.

En vertu de ce nouveau régime harmonisé, sont soumises à la TVA les opérations accomplies par les assujettis dans le cadre d’une activité économique et réalisée, à titre onéreux, sur le territoire du Congo. L’activité économique se défini comme l’ensemble des activités de livraison de biens, d’importation et de prestations de services, y compris les activités commerciales, agricoles, extractives, industrielles, forestières, artisanales, et celles des professions libérales ou assimilées.

Un assujetti à la TVA est défini comme une personne physique ou morale qui réalisent, à titre habituel ou occasionnel, de façon indépendante, des opérations imposables qui entrent dans le champ de la TVA et qui sont accomplies dans le cadre d’une activité économique réalisée à titre onéreux sur le territoire du Congo.

Il est précisé que les personnes morales sont assujetties de plein droit à la TVA tandis que les personnes physiques sont assujetties lorsque leur chiffre d’affaires, hors taxe, est supérieur à 100 millions de francs CFA. Certaines opérations sont expressément exonérées de TVA, notamment lorsqu’elles sont soumises à des taxations spécifiques exclusives. C’est le cas par exemple des ventes de produits des activités extractives ou des opérations ayant pour objet la transmission d’immeubles par des personnes autres que les promoteurs immobiliers et passibles des droits d’enregistrement.

Le taux général de TVA est de 18 %, mais il existe également un taux à 0 % applicable aux exportations de produits taxables ayant fait l’objet de certaines déclarations en douane. Enfin, il existe un taux réduit de 5 % applicable à certains biens de consommation courante, à la vente et à l’importation de certains produits tels que certains produits laitiers, les produits de boulangerie ou encore le riz.

Joe Pépin Foundoux

Joe est Directeur Tax & Legal à Deloitte Congo. Il a plus de 15 ans d’expérience.

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