Pilier 1 & Pilier 2 : l’OCDE publie de nouveaux documents d’importance

Le 17 juin 2024, le Cadre inclusif OCDE/G20 a publié plusieurs documents d’importance pour la mise en musique des Piliers 1 & 2.  

Pilier 1 – Poursuite des travaux sur le Montant B

Pour mémoire, le Pilier 1 est composé de 3 ensembles de règles :

  • Les règles relatives au Montant A qui visent à établir une nouvelle règle de partage de la base taxable des multinationales de grande envergure entre les États,
  • Les règles relatives au Montant B qui visent à instaurer une rémunération standard pour les activités de distribution et marketing de routine,
  • Les règles relatives aux Règlements des différends.

L’OCDE a publié le 19 février 2024 un rapport sur le Montant B proposant aux pays une approche simplifiée et rationalisée de l’application du principe de pleine concurrence aux activités de distribution et de marketing de routine.

En pratique, il s’agit de fournir des taux de rémunération « standard » pour ces activités, ce qui permettrait aux groupes d’éviter la réalisation de benchmarks et les débats sans fins avec les administrations fiscales quant à la pertinence de ceux-ci.

Les objectifs affichés sont donc la réduction des litiges en matière de prix de transfert, des coûts de mise en conformité et le renforcement de la sécurité juridique tant pour les administrations fiscales que pour les contribuables.

Le contenu du rapport a été intégré dans les Principes directeurs de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert en tant qu’annexe au chapitre IV.

L’OCDE vient de publier 2 instructions complémentaires.

Elles apportent des précisions sur les notions de « pays qualifiés » et de « pays concernés » et dressent à cet égard la liste des pays entrant dans ces catégories (listes qui feront l’objet de mises à jour tous les 5 ans) :

  • Pays « qualifiés » aux fins de l’application de l’approche simplifiée et rationalisée :
  • Pour l’application du mécanisme de vérification par recoupement des charges d’exploitation visant à tenir compte des niveaux d’intensité fonctionnelle élevés ou faibles (art. 5.2 du rapport de février) – Seront considérés comme des pays « qualifiés » les pays considérés par la Banque mondiale comme étant « à faibles revenus », « à revenus intermédiaires de la tranche inférieure » et « à revenus intermédiaires de la tranche supérieure » (la liste à ce jour est incluse dans l’instruction) ;
  • Pour l’application du mécanisme de disponibilité des donnés (art. 5.3 du rapport de février) – Mécanisme d’ajustement susceptible de s’appliquer lorsque l’ensemble des données globales ne contient pas de données ou des données insuffisantes pour un pays particulier de la partie testée – Seront considérés comme des pays « qualifiés » les pays (hors pays de l’EU) qui ont reçu une notation attribuée à leurs dettes souveraines par une agence de notation indépendante reconnue inférieure ou égale à BBB+ et qui disposent de moins de 5 comparables dans l’ensemble des données globales (la liste à ce jour est incluse dans l’instruction).  
  •  Pays « couverts » dans le cadre de la mise en œuvre de l’approche simplifiée et rationnalisée – Pour mémoire, comme pour toutes les approches optionnelles des principes directeurs en prix de transfert de l’OCDE, le résultat issu de l’approche simplifiée retenue par un pays (réputé être un résultat de pleine concurrence) n’est pas contraignant pour le pays de la contrepartie. Cependant, les pays membres du Cadre Inclusif se sont engagés à respecter le résultat de l’approche simplifiée lorsque cette approche a été appliquée par un pays à « faible capacité ».
    La nouvelle instruction substitue, de manière plus neutre, à cette notion de pays à « faible capacité » celle de pays « couvert », et assouplit les critères initiaux. Y sont notamment inclus l’Argentine, le Brésil, le Costa Rica, le Mexique et l’Afrique du Sud (la liste complète figure dans l’instruction). Toute inclusion d’un nouveau pays sera soumise à approbation préalable du Cadre Inclusif. La liste fera l’objet d’un réexamen tous les 5 ans.  

Rappelons, s’agissant du Montant A de Pilier 1, que les coprésidents du Cadre inclusif OCDE/G20 ont également annoncé fin mai être sur le point d’achever les négociations sur le texte de Convention multilatérale, avec l’objectif de l’ouvrir à la signature d’ici la fin du mois de juin.

Pilier 2

Publication de nouveaux commentaires explicatifs (144 pages)

L’OCDE vient de publier de nouveaux commentaires relatifs à la mise en œuvre de Pilier 2. Ils ont vocation à être incorporés à la version consolidée des commentaires sur les règles modèles (la précédente version consolidée de tous les précédents commentaires date d’avril 2024).

Sont abordés les points suivants :

  • Impôts différés : Mode opératoire simplifié du suivi des impôts différés passifs permettant aux Groupes de regrouper plusieurs catégories d’IDP dans le cadre du suivi obligatoire du reversement de certains IDP dans un délai de 5 ans – ces règles sont illustrées avec des exemples (p. 6-29) ;
  • Impôts différés : Prise en compte des divergences entre la valeur comptable et la valeur GloBE des actifs/passifs des entités constitutives, pour la détermination de leurs impôts couverts ajustés (p. 30-49) ;
  • Méthode d’allocation des impôts courants aux Etablissements Stables/Entités hybrides/Entités hybrides inversées/CFC en cas de crédits d’impôt étrangers « fongibles » (« cross crediting ») – ces règles sont illustrées avec des exemples (p. 50-90) ;
  • Allocation des impôts différés aux Etablissements Stables/Entités hybrides/Entités hybrides inversées/CFC (p. 91-110) ;
  • Méthode d’allocation des résultats et des impôts aux structures transparentes en cas de divergence de qualification entre le pays de l’entité et celui de ses associés et de détentions multiples – ces règles sont illustrées avec des exemples (p. 111-138) ;
  • Possibilité donnée aux Etats d’appliquer un régime dérogatoire aux véhicules de titrisation – exonération de QDMTT ou prise en charge de l’impôt complémentaire du véhicule par une autre EC dans le pays (p. 139-144).

Mécanisme de « certification » de la conformité des règles mises en place par les différents Etats – FAQ (6 pages)

L’OCDE annonce son intention de mettre en place un processus permettant de certifier qu’un pays a correctement mis en place les règles Pilier 2 (et notamment, que les règles IIR, UTPR et QDMTT peuvent être regardées comme « qualifiées »).

Il reposerait sur un système de « peer review », et sur une analyse très détaillée des règles nationales mises en place. L’instauration de ce processus d’évaluation étant toutefois susceptible de prendre un certain temps, l’OCDE propose, dans l’intervalle, des règles transitoires.

Le système transitoire reposerait sur une auto-évaluation par chaque Etat de ses propres règles de transposition, qui serait ensuite transmise à l’ensemble des membres du Cadre Inclusif (y compris aux Etats n’ayant pas eux-mêmes mis en place les règles Pilier 2), lesquels auraient la faculté de formuler des observations. En l’absence d’observations (ou si l’Etat répond de manière satisfaisante aux demandes qui lui sont formulées), alors il sera regardé comme disposant de règles « qualifiées » – au plus tard 12 mois après leur entrée en vigueur. En principe, dans les 2 ans suivant l’entrée en vigueur de ces règles, le processus de « peer review » formel devrait ensuite débuter.

L’OCDE indique qu’elle reprendra, au fil de l’eau, sur son site, la liste des Etats réputés disposer de règles « qualifiées » en application de cette procédure transitoire.

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Thierry Morgant

Thierry Morgant, Avocat, Diplômé de l’IEP Paris et titulaire d’un Master en Droit fiscal de l’Université Paris II Panthéon Assas, accompagne depuis 25 ans les multinationales françaises dans la détermination […]

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Marine Gadonneix

Marine conseille les groupes français dans gestion du taux effectif d’imposition, la mise en place de reporting fiscaux, l’amélioration de la fonction fiscale, notamment dans le contexte de Pilier 2. […]