Acquisition de véhicules de démonstration : Inscription en immobilisations (vs. stocks)

Le Conseil d’État juge qu’un véhicule de démonstration acquis par un prestataire de services qui exerce une activité de promotion d’une marque automobile, pour les besoins de cette activité, constitue un élément de l’actif immobilisé, alors même que ce véhicule serait revendu à l’issue de son utilisation.

Rappel

Du point de vue comptable, un stock est un actif détenu pour être vendu dans le cours normal de l’activité, ou en cours de production pour une telle vente, ou destiné à être consommé dans le processus de production ou de prestations de services dont la fourniture interviendra ultérieurement.

Il n’y a pas de divergence entre la comptabilité et la fiscalité à ce titre. L’Administration précise que seuls les biens qui, eu égard à l’objet de l’entreprise, sont destinés à être revendus en l’état ou après exécution d’opérations de fabrication ou de transformation et dont la vente permet la réalisation d’un bénéfice d’exploitation, peuvent être considérés comme des stocks. Le critère d’immobilisation ou sa comptabilisation en stock doit s’apprécier eu égard à l’objet de l’entreprise et non à la nature des produits (BOI-BIC-PDSTK-20-10 n°190, 12/09/2012).

L’histoire

La filiale française d’un constructeur automobile européen, dont l’activité principale consiste à promouvoir et développer la marque en France, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité au titre des exercices 2012 et 2013. A l’issue des opérations de contrôle, l’administration fiscale a notamment remis en cause, pour les besoins de l’IS, l’inscription en stock des véhicules de démonstration acquis par la société auprès de sa société mère italienne. Elle a considéré que ces véhicules auraient dû être comptabilisés en immobilisations et a donc remis en cause la déductibilité des provisions pour dépréciation comptabilisées.

L’affaire est portée devant les juridictions. Les juges du fond ayant rejeté la demande de la société, celle-ci se pourvoit en cassation.

Décision

Le Conseil d’État vient à trancher du litige au fond et se positionne en faveur de l’Administration.

A ce titre, il rappelle que :

  • Par application des dispositions de l’article 38 quater de l’annexe III au CGI, les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le PCG, dès lors que celles-ci ne sont pas incompatibles avec les règles applicables pour l’assiette de l’impôt.
  • Selon l’article R. 123-181 du Code de commerce : « Les éléments du patrimoine de l’entreprise sont classés à l’actif et au passif du bilan suivant leur destination et leur provenance. Les éléments destinés à servir de façon durable à l’activité de l’entreprise constituent l’actif immobilisé. »
  • Aux termes de l’article 211-1 du règlement n°99-03 du 29 avril 1999 du Comité de la réglementation comptable relatif au plan comptable général, dans sa version issue du règlement n°2004-06 du 23 novembre 2004 relatif à la définition, la comptabilisation et l’évaluation des actifs : (…)
    • « 2 – Une immobilisation corporelle est un actif physique détenu, soit pour être utilisé dans la production ou la fourniture de biens ou de services, soit pour être loué à des tiers, soit à des fins de gestion interne et dont l’entité attend qu’il soit utilisé au-delà de l’exercice en cours. » (…)
    • « 4 – Un stock est un actif détenu pour être vendu dans le cours normal de l’activité, ou en cours de production pour une telle vente, ou destiné à être consommé dans le processus de production ou de prestation de services, sous forme de matières premières ou de fournitures. (…). »

Par conséquent, il juge qu’il résulte de ces dispositions combinées qu’un véhicule de démonstration acquis par un prestataire de services qui exerce une activité de promotion d’une marque automobile, pour les besoins de cette activité, constitue non pas un élément de stock mais un élément de l’actif immobilisé, quand bien même ce véhicule serait revendu à l’issue de son utilisation. Il estime qu’il n’en va pas différemment lorsque cette cession intervient moins de 12 mois après l’acquisition.

Il rejette ainsi l’argument du contribuable tenant à ce que la société exerce une activité de négoce parallèlement à son activité de promotion de marque et que les véhicules de démonstration en cause ont vocation à être revendus dès leur acquisition au terme d’une courte période d’utilisation – dès lors que les véhicules acquis par la société française sont affectés à son activité de promotion de la marque dès leur acquisition.

Il conclut que l’administration fiscale était justifiée à remettre en cause, au titre des exercices considérés, les provisions et reprises de provisions afférentes à la dépréciation du stock de ces véhicules de démonstration et à tirer les conséquences de cette requalification sur les variations de l’actif net/résultats déclarés par la société.

 

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Myriam Mouloudj

Myriam, Avocate, possède une expérience de près de 15 ans en fiscalité. Arrivée chez Deloitte Société d’Avocats en 2006, elle réintègre le cabinet en 2019 pour rejoindre le Comité Scientifique […]