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Affaire « Société Planet » : suite et fin 

Statuant en 2nde cassation, le Conseil d’État vient mettre un point final au contentieux « Société Planet », et confirme la qualification de « redevances » des sommes en litige, ainsi que l’application de la convention fiscale conclue entre la France et l’État du bénéficiaire effectif de ces revenus (alors même qu’ils avaient, au préalable, été versés à une entité intermédiaire/bénéficiaire apparent).

Rappel du contentieux

En 2011, une société française a versé à une société belge, puis de 2012 à 2014, à une société maltaise, des redevances en contrepartie de la sous-distribution de programmes sportifs à destination de clubs de fitness, élaborés par une société installée en Nouvelle-Zélande.

À l’issue d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a considéré que ces versements devaient être soumis à la retenue à la source prévue à l’article 182 B du CGI, mais a ramené cette retenue au taux de 10 % prévu par la convention entre la France et la Nouvelle‑Zélande, estimant que le bénéficiaire réel des sommes versées était, en réalité la société néo-zélandaise (il semblerait qu’avant 2011, les paiements étaient directement effectués en faveur de cette société). Précisons, à cet égard, que la convention franco-belge prévoit, elle, l’élimination totale de l’imposition des redevances dans l’Etat de la source (art. 8).

Le litige a fait l’objet d’un premier pourvoi en cassation. Dans une décision très remarquée, le Conseil d’État est venu poser le principe de l’applicabilité de la convention fiscale conclue entre la France et l’État du bénéficiaire effectif des revenus, y compris dans l’hypothèse où ces revenus ont, au préalable, été versés à une entité intermédiaire/bénéficiaire apparent (CE, 20 mai 2022, n° 444451, S Planet).

L’affaire a ensuite été renvoyée devant la CAA de Marseille, laquelle a jugé que :

  • Les sommes litigieuses constituaient bien des redevances et non des prestations de services pour l’application des conventions fiscales bilatérales considérées ;
  • La société requérante n’apportait aucun élément de nature à remettre en cause la qualification de bénéficiaire effectif de la société néo-zélandaise.

La décision du Conseil d’État en 2nde cassation 

Sur la qualification des sommes en litige

Le Conseil d’État confirme la qualification de « redevances », tant au regard du droit interne qu’au regard du droit conventionnel.

À cet égard, les juges d’appel avaient souligné qu’il résultait des contrats de sous-distribution conclus avec les sociétés belge et maltaise, que les droits concédés à la société française portaient sur la commercialisation auprès des clubs de fitness de programmes sportifs comprenant des cours vidéo mis en musique, un logiciel de gestion de ces cours, l’accès à une banque d’images, la formation des instructeurs de fitness, ainsi que la possibilité d’utiliser la marque néo-zélandaise et les marques des programmes sportifs associés.

Aussi, les sommes en litige ne rémunéraient pas seulement un droit exclusif de sous-distribution, mais également l’usage ou la concession de l’usage d’une marque, d’un savoir-faire, et d’informations demeurant la propriété de la société néo-zélandaise (solution en ligne avec les commentaires OCDE sur l’article 12, 10.1).

Sur la qualité de bénéficiaire effectif de la société néo-zélandaise

Le Conseil d’État souligne que la société requérante ne produisait, en l’absence de toute précision quant aux liens contractuels unissant les sociétés belge et néo-zélandaise et aux mouvements financiers entre toutes les sociétés du groupe, aucun élément « qu’elle seule était en mesure d’apporter », de nature à établir que la société belge aurait été en droit d’utiliser les sommes litigieuses et d’en jouir sans être limitée par une quelconque obligation, notamment de nature contractuelle, de céder les paiements reçus à la société néo-zélandaise.

Il confirme, dès lors, l’application des dispositions de la convention néo-zélandaise.

  • Photo de Alice de Massiac

    Alice de Massiac

    Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à…

  • Clara Maignan

    Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique…