Cour de cassation n° 23-20.716, chambre sociale, 11 décembre 2024
Rappel des faits
Un salarié a été licencié pour faute lourde en raison de son refus de collaborer avec la nouvelle direction et de ses propos critiques et dénigrants visant la société et ses dirigeants, tenus lors d’échanges électroniques et par SMS envoyés au moyen de son téléphone portable professionnel. Il a saisi la juridiction prud’homale, arguant qu’il n’avait pas abusé de sa liberté d’expression et qu’une conversation constituée de SMS échangés par le biais de son téléphone professionnel et qui n’était pas destinée à être rendue publique ne constituait pas un manquement à ses obligations découlant de son contrat de travail et constituait une conversation privée.
En l’espèce, le salarié avait détourné l’appellation « EPD » (entretien progrès développement) en répondant à son collègue en ces termes « on peut vraiment dire : le PD » pour désigner le directeur général. Les propos avaient été tenus par le salarié par messages SMS envoyés au moyen de son téléphone professionnel à d’autres salariés.
Rappel de la règle
Chaque salarié bénéficie dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression. Seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent y être apportées (Cour de cassation n°19-17.871 B, chambre sociale, 16 février 2022). Ainsi, si un salarié tient des propos injurieux, ou excessifs, il peut faire l’objet d’une sanction qui peut revêtir la forme d’un licenciement.
Décision
La cour d’appel considérait que le licenciement était justifié par une faute grave, en raison du caractère injurieux et excessif des propos tenus par le salarié, constituant un abus de sa liberté d’expression, peu importe le caractère restreint de la diffusion de ces propos.
La Cour de cassation suit la position de la cour d’appel et considère que la cour d’appel a exactement déduit que le licenciement était justifié, considérant qu’il ressortait que les messages litigieux, qui bénéficiaient d’une présomption de caractère professionnel pour avoir été envoyés par le salarié au moyen du téléphone mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail et dont le contenu était en rapport avec son activité professionnelle, ne revêtaient pas un caractère privé. La cour d’appel a donc exactement déduit que, peu important que ces échanges n’étaient pas destinés à être rendus publiques, qu’ils pouvaient être retenus au soutien d’une procédure disciplinaire.
La Cour de cassation rappelle que la liberté d’expression du salarié fait l’objet de limites, quand bien même la conversation n’était pas destinée à être rendue publique.