La CAA de Bordeaux juge que le défaut de réponse motivée aux observations du contribuable entraîne la décharge de l’imposition, lorsqu’il porte sur un caractère essentiel et déterminant du bien-fondé de l’imposition.
Rappel
Dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, l’Administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (LPF, art. L. 57 al. 1).
Lorsque l’Administration rejette les observations que le contribuable lui a adressées, sa réponse doit également être motivée (LPF, art. L. 57 al. 5).
Le Conseil d’Etat est venu encadrer la portée de cette obligation et préciser les conséquences découlant de son non-respect.
Il a ainsi jugé que l’absence de réponse de l’Administration aux observations du contribuable constitue une irrégularité de procédure – de nature à entraîner la décharge des impositions supplémentaires – lorsqu’elle prive le contribuable de la possibilité de connaître les motifs sur lesquels elle s’appuie pour justifier le bien-fondé des rectifications maintenues. Il en est de même lorsque le défaut de réponse prive le contribuable, en cas de persistance du désaccord, de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (CE, 11 avril 2014, n°349719).
L’histoire
En 2015, une société de participation financière de professions libérales à responsabilité limitée (SPFPL-SARL) a souscrit à l’augmentation du capital d’une SELARL exploitant une pharmacie, en contrepartie d’un apport en numéraire et a inscrit les parts sociales de cette SELARL à son actif.
A l’issue d’une vérification de comptabilité portant sur l’exercice 2015, l’Administration a adressé une notification de redressement à la société remettant en cause la valeur unitaire des parts de la SELARL, qu’elle a considérée comme très substantiellement sous-estimée.
La société a alors formulé des observations, dans le cadre desquelles elle a contesté les modalités d’évaluation retenues par l’Administration, et notamment la combinaison de la méthode mathématique et de la méthode de productivité.
Dans la réponse à ces observations, l’Administration – après avoir rappelé les observations formulées par la société – s’est bornée à répondre sur la raison du maintien de la détermination de la valeur mathématique ; en revanche, elle s’est abstenue de répondre aux observations relatives à l’application de la méthode de la valeur par la productivité.
Elle a ensuite confirmé le redressement.
La décision de la CAA de Bordeaux
Devant les juges d’appel, la société se prévalait de l’insuffisance de motivation de la réponse de l’Administration à ses observations.
La CAA rappelle d’abord que, lorsque l’Administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit, en application de l’article L. 57 du LPF, être motivée et intervenir avant la mise en recouvrement des impositions. Elle souligne toutefois qu’une telle irrégularité demeure sans conséquence sur le bien-fondé de l’imposition s’il est établi que, n’ayant privé le contribuable d’aucune garantie, elle n’a pas pu avoir d’influence sur la décision de redressement.
Elle juge ensuite que tel n’était pas le cas en l’espèce.
La Cour considère, en effet, qu’en s’abstenant de répondre aux observations du contribuable relatives à l’application de la méthode de la valeur par la productivité, lesquelles revêtaient un caractère essentiel et déterminant, dès lors que, c’est par combinaison de cette méthode avec la valeur mathématique, que l’Administration avait fixé la valeur unitaire finale fondant le redressement, l’Administration avait bien privé le contribuable d’une garantie.
Elle prononce en conséquence la décharge des impositions litigieuses.