Détention d’immeubles en France par l’intermédiaire d’une société de droit suisse : Taxation par recours à la « méthode de l’assimilation »

Le Conseil d’État complète sa décision Artémis et confirme la taxation à l’impôt sur les sociétés d’une société de droit suisse au titre de la renonciation à recette correspondant à la mise à la disposition gratuite de biens immobiliers détenus en France au profit de son unique associé.

L’histoire

Une société de droit suisse, ayant mis gratuitement à la disposition de son associé des biens immobiliers dont elle était propriétaire sur le sol français, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité, portant sur les exercices 2011 et 2012, à l’issue de laquelle l’administration fiscale a estimé :

  • que la société suisse était passible de l’IS en France,
  • à hauteur des loyers qu’elle aurait dû recevoir de son associé à raison des biens immobiliers mis à sa disposition et constitutifs d’un acte anormal de gestion.

La société a contesté sans succès le redressement au titre de l’impôt sur les sociétés, les retenues à la source et les pénalités tant devant l’administration que devant les juges du fond.

La décision

Suivant le raisonnement adopté par la CAA , le Conseil d’État reprend les principes issus de sa décision Artémis (CE 24 novembre 2014 n°363556 plén., Sté Artémis SA – voir également Conseil d’État, arrêt du 2 février 2015, n°370385), selon lesquels « […] il appartient au juge de l’impôt, saisi d’un litige portant sur le traitement fiscal d’une opération impliquant une société de droit étranger, d’identifier dans un premier temps, au regard de l’ensemble des caractéristiques de cette société et du droit qui en régit la constitution et le fonctionnement, le type de société de droit français auquel la société de droit étranger est assimilable. » – i.e. recours à la méthode dite « de l’assimilation ».

Puis, il précise que pour déterminer si une société de droit étranger est assimilable à une société par actions de droit français, le juge de l’impôt n’a pas à tenir compte de l’objet de cette société, un tel critère n’étant pas au nombre des caractéristiques définissant ce type de sociétés. De la même façon, la circonstance que le droit étranger en cause ne prévoirait pas de structure comparable aux types de sociétés de droit français mentionnés à l’article 8 du CGI est sans incidence.

Par conséquent, le Conseil d’État confirme l’arrêt de la Cour d’appel en ce qu’il a :

  • identifié les caractéristiques propres de la société en cause, au regard du droit suisse, et notamment sa nature de société de capitaux et la responsabilité de son associé limitée au montant de ses apports,
  • s’est exclusivement fondé sur l’assimilation de cette société à une société anonyme de droit français, sans s’interroger sur le caractère lucratif de son exploitation ou de ses opérations, ni sur le caractère civil ou commercial de son objet, ni même encore sur l’absence en droit suisse de structure sociale comparable aux sociétés civiles françaises,
  • puis a considéré que cette société suisse devait être assimilée à une société anonyme de droit français pour l’application des dispositions de l’article 206 du CGI.

Enfin, le Conseil d’État retient l’existence d’un acte anormal de gestion consistant en la mise à disposition de son associé de biens immobiliers en France sans contrepartie. Il confirme, au regard des dispositions de la convention fiscale franco-suisse (article 6 afférent aux biens immobiliers), la taxation à l’IS en France de la société suisse sur la base des revenus correspondant au prix normal de location que la société aurait pu tirer de ses biens français durant la période d’occupation gratuite par son associé.

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Myriam Mouloudj

Myriam, Avocate, possède une expérience de près de 15 ans en fiscalité. Arrivée chez Deloitte Société d’Avocats en 2006, elle réintègre le cabinet en 2019 pour rejoindre le Comité Scientifique […]