Le droit des entreprises en difficulté a été réformé en profondeur au cours de l’année 2014, principalement par l’ordonnance du 12 mars, son décret d’application du 30 juin, l’arrêté du 25 juillet et enfin l’ordonnance du 26 septembre.
Cette matière est en réalité devenue très complexe, voire illisible, sur les 10 dernières années notamment par la prolifération de nouvelles procédures (2 nouvelles procédures en 2014 s’ajoutant aux 6 préexistantes), de renvois et d’exceptions qui brouillent les cartes par rapport aux acquis et aux grands principes fondateurs. De nouveaux outils sont parfois même créés pour « échapper » aux anciens avec comme fil conducteur la volonté affirmée de préparer un plan de sauvetage dans un cadre amiable et confidentiel qui puisse ensuite être mis en oeuvre très rapidement dans un cadre judiciaire et coercitif en cas d’échec des négociations amiables.
La réforme de 2014 opère également une rupture avec le principe de sauvegarde à tout prix de l’activité (protégeant par la même les actionnaires) au détriment manifeste des créanciers et privilégie désormais un rééquilibrage au bénéfice des créanciers qui peuvent désormais présenter un plan concurrent à celui des actionnaires, et par la même prendre le contrôle des entreprises en difficulté en convertissant leurs créances en capital.
De même, la frontière de la cessation des paiements ne permet désormais plus de départager les différents outils de traitement des difficultés des entreprises ; l’amiable s’imbrique désormais avec le judiciaire pour devenir hybride. L’obligation de paiement comptant des fournisseurs pendant la période d’observation disparaît en partie avec la réforme. Enfin, l’obligation de déclaration de créances a été largement assouplie et la dissolution automatique de la société n’intervient plus en cas de liquidation judiciaire. Ce qui apparaissait jadis comme évident et immuable, en tout état de cause compris et identifié donc utilisable clairement, est régulièrement remis en question de manière chirurgicale par des réformes successives compliquant de manière significative la lecture et donc la compréhension du droit des entreprises en difficulté.
Cette vague de complexité et d’insécurité juridique risque pourtant de décourager plus d’un dirigeant à employer les outils de prévention pourtant efficaces mis à sa disposition pour un traitement toujours plus en amont de ses difficultés, seul moyen d’espérer réussir un rebond ou une restructuration. Sans une exigence de simplicité et de lisibilité, l’ingénierie législative, aussi imaginative soit-elle, restera stérile.
Et il est à craindre que la loi Macron, actuellement en discussion au parlement, ne poursuive ce mouvement de réforme, notamment en accentuant le rééquilibrage du droit des créanciers au détriment des actionnaires : Affaire à suivre donc !