La CAA de Nantes juge que le critère fixé par l’article 119 ter du CGI, tenant à ce que la société bénéficiaire des distributions ait son siège de direction effective dans un État membre de l’UE (ou de l’EEE), ne figure pas, en tant que tel, dans la directive mère-fille et ne saurait, dès lors, conditionner le bénéfice de l’exonération de retenue à la source.
Rappel
Par application de l’article 119 ter du CGI, les dividendes distribués par une société française à une société mère ayant son siège dans l’UE ou l’EEE sont, sous certaines conditions, exonérés de RAS.
Il faut notamment que la société bénéficiaire des distributions puisse justifier qu’elle est bien le bénéficiaire effectif des dividendes, et qu’elle ait son « siège de direction effective » dans un État membre de l’UE (ou en Islande, en Norvège ou au Liechtenstein).
Dans ses commentaires au BOFiP, l’Administration indique que le siège de direction effective « qui détermine la résidence fiscale de la société mère bénéficiaire, s’entend du lieu où sont, en fait, principalement concentrés les organes de direction, d’administration et de contrôle de la personne morale. Ce critère est couramment utilisé dans les conventions fiscales pour trancher les conflits de résidence des sociétés et autres personnes morales ». Elle rappelle qu’il se distingue du siège statutaire (BOI-RPPM-RCM-30-30-20-10, 3 juillet 2019, n°110).
L’histoire
Une société française a entendu bénéficier de l’exonération de RAS prévue à l’article 119 ter du CGI au titre des dividendes versés en 2012 et 2013 à sa société mère belge.
L’Administration a remis en cause le bénéfice de cette exonération au double motif que la société française ne justifiait pas que sa société mère belge disposait de son siège de direction effective dans un autre État membre de l’UE, et qu’elle n’avait pas transmis l’attestation de résidence de sa société mère sous la forme du formulaire Cerfa 5000-FR visé par les autorités fiscales belges.
La décision de la CAA de Nantes
La Cour juge que les dispositions de l’article 119 ter du CGI doivent être interprétées à la lumière de la directive mère-fille (directive 2011/96/UE du 30 novembre 2011), dont elles assurent la transposition.
Elle relève ensuite que la condition tenant à ce que le bénéficiaire effectif des dividendes ait son siège de direction effective dans un État membre de l’UE ne figure pas dans la directive mère-fille.
Celle-ci retient, en effet, comme critère de localisation de la société bénéficiaire des dividendes, qu’elle soit considérée selon la législation fiscale de l’État membre en cause, comme y ayant son « domicile fiscal » (art. 2, a), ii) de la directive).
La Cour en conclut que la condition posée par l’article 119 ter du CGI, tenant au siège de direction effective de la société bénéficiaire des distributions, qui est autonome par rapport à la législation fiscale de l’État membre concerné, ne peut être regardée comme une déclinaison du critère de localisation fixé par la directive mère-fille, et introduit une restriction au principe d’exonération des bénéfices distribués par une filiale à sa société mère d’un autre État membre, quand bien même elle est objective.
Elle juge ainsi que pour que des dividendes soient exonérés de la RAS prévue à l’article 119 bis, 2 du CGI, la société bénéficiaire doit « avoir son domicile fiscal dans un État membre de l’UE en vertu de la législation fiscale de cet État et n’être pas regardée comme ayant son domicile fiscal hors de l’UE en vertu d’une convention conclue avec un État tiers afin de prévenir les doubles impositions ».
Enfin, la CAA de Nantes juge qu’aucune disposition n’impose, à peine de déchéance de l’exonération de RAS prévue à l’article 119 ter, le dépôt du formulaire Cerfa-5000 visé par les autorités fiscales locales.
Cette solution, qui s’inscrit à rebours de la jurisprudence en la matière (notamment, CAA Paris, 27 novembre 2024, n°23PA00449 – pourvoi non admis, CE (na), 11 juin 2025, n°500934, Sté Cofina), mériterait d’être confirmée par le Conseil d’État s’il venait à être saisi.
