Non-transmission d’une QPC relative à l’amende de 5 % sanctionnant le défaut de production du tableau des provisions

La CAA de Paris refuse de transmettre une QPC relative à l’amende de 5 %, réduite à 1 % dans certains cas, des sommes omises, applicable à défaut de production du tableau des provisions.

Rappel

En application des dispositions des articles 53 A et 223 du CGI, les entreprises doivent fournir, à l’appui de leur déclaration de résultat, le tableau des provisions prévu à l’article 38, II de l’Annexe III au CGI (imprimé n°2056 de la liasse fiscale).

L’absence de production de cet imprimé n’est plus une condition de déduction des provisions.

En revanche, les contribuables qui n’ont pas complété le tableau des provisions ou qui fournissent des renseignements incomplets ou inexacts sont passibles d’une amende égale à 5 % des sommes ne figurant pas sur le tableau (ramenée à 1 % si les provisions omises sont déductibles), qui est due au titre du seul exercice de la mise en évidence de l’infraction (CGI, art. 1763, I, a).

L’amende n’est pas applicable, en cas de 1re infraction commise au cours de l’année civile en cours et des 3 années précédentes, lorsque les intéressés ont réparé leur omission soit spontanément, soit à la 1re demande de l’Administration avant la fin de l’année qui suit celle au cours de laquelle le document devait être présenté.

L’histoire

Une société, qui s’est vu appliquer, en 2015, l’amende pour défaut de production du tableau des provisions a formulé une demande de transmission de QPC portant sur sa non-conformité :

  • Au principe de légalité des délits et des peines garanti par l’article 8 de la DDHC en raison de l’imprécision du « tableau des provisions » ;
  • Au principe de proportionnalité des peines, garanti par ce même article 8 de la DDHC, en ce que l’amende s’applique indépendamment de la circonstance qu’une imposition a ou non été éludée et qu’elle est calculée proportionnellement par application d’un taux fixe et sans plafonnement.

La décision de la CAA de Paris

La Cour refuse de faire droit à la demande de transmission.

Sur la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines

La Cour souligne que les rubriques du tableau du formulaire n°2056, annexé à l’article 74 de la LF pour 1984 ayant créé l’article 53 A du CGI, sont suffisamment précises (notamment s’agissant des notions de stocks de provisions à l’ouverture de l’exercice et de reprises de provisions).

Sur la méconnaissance du principe de proportionnalité des peines

La Cour écarte également l’argument.

Elle souligne, en 1er lieu, que l’amende litigieuse, en ce qu’elle a pour but de prévenir et de sanctionner certains manquements aux obligations déclaratives des contribuables dont le respect est nécessaire à la liquidation de l’impôt, poursuit un but de lutte contre la fraude fiscale, lequel constitue un objectif de valeur constitutionnelle.

La Cour relève ensuite qu’en retenant une assiette correspondant aux sommes omises dans le tableau des provisions, les dispositions de l’article 1763, I, a du CGI instituent une sanction dont la nature est directement liée à celle du manquement réprimé.

En outre, en ramenant le taux prévu de 5 % à 1 % lorsque les provisions omises sont déductibles de l’assiette de l’impôt, et en prévoyant que l’amende ne s’applique qu’au seul exercice au titre duquel l’infraction est mise en évidence, la loi a elle-même assuré, par des taux non disproportionnés, la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés.

Enfin, en introduisant le mécanisme de régularisation spontanée en cas de 1re infraction au cours de l’année civile et des 3 années précédentes, le législateur doit être regardé comme ayant assuré une modulation supplémentaire des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés.

Dans la même veine, on rappellera que le Conseil constitutionnel a déjà conclu à la constitutionnalité de l’amende de 5 %, prévue au même article 1763 du CGI, sanctionnant le défaut de production de l’état de suivi des PV de l’article 54 septies (Conseil constitutionnel, décision n°2017-636 QPC du 9 juin 2017, Société Edenred France). Le Conseil d’Etat a de son côté, refusé de transmettre une QPC relative à l’amende de 5 % [réduite à 1 % dans certains cas] des sommes omises, applicable à défaut de production de la déclaration de résultat d’ensemble et de l’état des rectifications apportées aux résultats des sociétés membres du groupe par la société mère d’un groupe intégré, également prévue à l’article 1763 du CGI (CE, 29 mars 2017, n°406590, SAS Jade).

  •  CAA Paris, 30 août 2024, n°24PA02213
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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.