Pas de connexion fiscalo-comptable pour l’amortissement du fonds de commerce des petites entreprises

Dans un avis du 8 septembre 2021, le Conseil d’État juge que les dispositions de l’article 214-3, al. 5 du PCG, permettant à une petite entreprise d’amortir sur 10 ans l’ensemble des fonds commerciaux inscrits à l’actif de son bilan, sont contraires à la loi fiscale. Elles ne peuvent dès lors être invoquées par une société pour la détermination de son résultat fiscal.

On sait qu’en vertu du principe de connexion fiscalo-comptable, posé par l’article 38 quater de l’annexe III du CGI, les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le PCG, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l’assiette de l’impôt.

Au plan fiscal, un élément d’actif identifiable (notamment un fonds de commerce) ne peut donner lieu à une dotation à un compte d’amortissement que s’il est normalement prévisible, lors de sa création ou de son acquisition par l’entreprise, que ses effets bénéfiques sur l’exploitation prendront fin à une date déterminée (CGI, art ; 39,1,5° et CGI, ann. III, art. 38 sexies).

Au plan comptable, l’article 214-3, al. 5 du PCG (tel que modifié par le règlement ANC n°2015-06 du 23 novembre 2015) permet aux petites entreprises (selon la définition retenue à l’article L. 123-16 du Code de commerce, i.e ne dépassant pas 2 des 3 seuils suivants : 6m€ de total de bilan, 12 m€ de CA net, 50 salariés) d’amortir sur 10 ans leurs fonds commerciaux, sans avoir besoin de justifier de l’irréversibilité de leur déduction.

Le TA d’Orléans a adressé au Conseil d’État une demande d’avis aux fins de savoir si, en application du principe de connexion fiscalo-comptable, ces petites entreprises ont la faculté de se prévaloir des dispositions du PCG pour la détermination de leur résultat fiscal.

Le Conseil d’État répond par la négative, estimant que les dispositions du PCG sont contraires à la loi fiscale, en ce qu’elles ne subordonnent pas l’exercice de l’option qu’elles prévoient à la condition, prévue par la loi fiscale, que les effets bénéfiques sur l’exploitation du fonds commercial dont il s’agit prennent fin à une date déterminée.

Il conclut que, compte-tenu de cette incompatibilité, une petite entreprise ne saurait se prévaloir de la norme comptable pour la détermination de son résultat fiscal.

On rappelle que ce n’est pas la première fois que le Conseil d’État a été amené à se prononcer sur l’application du principe de connexion fiscalo-comptable dans le cadre d’un avis (voir notamment, CE, avis du 27 octobre 2009, n°383197, dans le cadre duquel il a admis que peuvent être déduites les provisions constituées dans le cadre de programmes de fidélisation qui nécessitent l’accumulation d’un certain nombre de points [et d’achats successifs] pour obtenir la réduction).

Le PLF 2022 propose toutefois d’autoriser, de façon temporaire (fonds acquis entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2023), l’amortissement au plan fiscal, de ces fonds de commerce.

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.