Proposition de Directive « HOT » : Application de règles fiscales uniformes aux résultats des ES européens de PME (one-stop-shop)

Le 12 septembre dernier, la Commission Européenne a publié une proposition de directive « Head Offices Tax system for SMEs », ou directive « HOT », prévoyant, pour les ES des PME, une imposition en fonction des règles en vigueur dans le pays du siège social. Elle permettrait, sur option, aux PME exerçant des activités transfrontières par l’intermédiaire d’établissements stables (ES) situés dans l’UE d’appliquer une règle unique de détermination de la base imposable (règles fiscales du pays de son siège) et d’interagir avec la seule administration fiscale de son siège social (obligations déclaratives, estimation et paiement de l’impôt), et non plus de devoir se conformer à l’ensemble des règles fiscales des pays d’implantation des ES.

Contexte

Le système d’imposition en vigueur au sein des pays de l’UE revêt un certain degré de complexité pour les groupes réalisant des activités dans plusieurs pays, ce fardeau étant plus lourd, proportionnellement, pour les PME moins équipées que pour les grands groupes de sociétés. Ainsi, les PME consacreraient environ 2,5 % de leur CA à la conformité fiscale / aux obligations déclaratives versus 0,7 % de leur CA pour les grands groupes.

Dans ce cadre, la proposition de directive « HOT » a pour objectif de permettre aux PME réalisant des activités transfrontières par l’intermédiaire d’ES situés au sein de l’UE d’appliquer une règle unique de détermination de la base imposable (règles fiscales du pays du siège) et d’interagir avec la seule administration fiscale de leur siège (obligations déclaratives, estimation et paiement de l’impôt), et non plus de devoir se conformer à l’ensemble des règles fiscales spécifiques de chacun des pays d’implantation des ES.

Cette proposition aurait pour objectif de renforcer la sécurité et l’équité fiscales, de réduire les coûts de mise en conformité et les distorsions du marché qui influencent les décisions des entreprises, tout en minimisant le risque de double imposition et de surimposition, ainsi que les contentieux fiscaux.

Elle tendrait ainsi à mettre les PME européennes en mesure de tirer pleinement profit de la liberté d’établissement et de la libre circulation des capitaux sans être entravées par des obstacles fiscaux supplémentaires.

La directive n’aurait pas d’impact sur les taux d’impôt sur le résultat, les règles comptables applicables aux PME ni les règles de protection sociale applicables aux travailleurs, qui resteraient de la compétence de chacun des Etats dans lesquels les ES seraient implantés.

Contenu de la proposition de Directive

Champ d’application

La directive s’appliquerait :

  • aux PME autonomes,
  • établies dans un pays de l’UE sous une certaine forme juridique,
  • exerçant leur activité dans le pays de leur siège ainsi que dans d’autres pays de l’UE mais strictement sous la forme d’ES, et non sous la forme de filiales (article 2).

Les activités de transport maritime international soumises à la taxe au tonnage seraient exclues.

Eligibilité, conditions, options et exclusions

L’option serait ouverte aux PME remplissant les conditions suivantes (article 4) :

  • Être résidente fiscale du même EM depuis plus de 2 exercices fiscaux ;
  • Exercer une activité dans les autres EM exclusivement sous la forme d’ES ;
  • Avoir réalisé au titre des 2 derniers exercices fiscaux, un CA au niveau du siège qui soit supérieur à 50 % de la somme des CA des ES dans les autres EM.

Les PME éligibles pourraient, sur option, déterminer la base imposable de tous leurs ES en application des seules règles fiscales applicables dans le pays de leur siège social localisé dans l’UE. Le taux d’imposition appliqué à la base fiscale ainsi déterminée resterait celui de l’EM où l’ES est/sont situé(s).

L’option serait valable 5 ans (article 7), à moins que le siège ne transfère sa résidence fiscale (nouvelle option nécessaire si transfert dans un autre EM) ou que la somme des CA des ES vienne à atteindre le triple du CA réalisé par le siège social au titre des 2 derniers exercices (article 8) – auxquels cas les dispositions « HOT » ne seraient plus applicables.

A la fin de chaque période de 5 ans, les PME seraient autorisées à renouveler leur option pour une nouvelle période de 5 ans, pour autant qu’elles continuent de remplir les conditions d’éligibilité (article 9).

Les dispositions relatives aux conditions d’éligibilité et à la fin de l’option ont été élaborées afin de décourager tout abus ou planification fiscale, comme le transfert délibéré du siège social vers un EM dont le système fiscal présenterait des caractéristiques favorisant une taxation plus faible.

Lorsqu’une PME autonome procède à la création d’une filiale (dans l’UE ou hors UE), ou que la somme des CA réalisés par ses ES s’élève au moins au double du CA du siège social au titre des 2 derniers exercices, ou s’ils cessent d’être qualifiés ensemble de PME, le renouvellement de l’option ne peut plus être envisagé (article 10).

Procédure centralisée

Un guichet unique permettrait aux PME éligibles d’interagir avec les seules autorités fiscales de l’EM du siège social. Ce guichet unique serait ainsi destinataire de l’option de la PME pour le dispositif « HOT », de la réception des obligations déclaratives, de l’estimation et du paiement de l’impôt correspondant (articles 6, 9, 11 et 14).

L’EM du siège social appliquerait au résultat taxable déterminé selon ses propres règles d’imposition, le taux d’imposition applicable dans l’EM de l’ES et transfèrerait en conséquence, à ce dernier, les recettes perçues du contribuable (article 12).

L’entité « déclarante » pour tous les ES serait ainsi le siège social de la PME : les PME éligibles rempliraient une seule déclaration auprès de l’administration fiscale de leur siège social (article 11). Cette administration fiscale serait ensuite chargée de transférer les recettes perçues à chaque EM d’implantation des ES (article 14). Une telle approche permettrait d’éliminer la complexité, et les coûts qui y sont associés, liée aux multiples systèmes d’imposition / autorités fiscales dans l’UE.

Un échange d’informations entre les autorités fiscales concernées est également prévu à cet effet – notamment par le recours au cadre existant de la Directive 2011/16/UE du Conseil du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE (article 11 et 14).

Contrôle fiscal, recours et règlement des différends

Chaque EM demeurerait compétent pour procéder à un contrôle fiscal de l’ES situé dans sa juridiction. Il pourrait également demander un contrôle fiscal conjoint qui obligerait l’autre EM visé à l’engager (article 13).

Interaction avec la proposition de directive BEFIT ?

La proposition de directive BEFIT (également dévoilée le 12 septembre 2023) vise en tout premier lieu les multinationales opérant à travers l’UE. La proposition de directive HOT simplifie les règles applicables aux PME dans leurs premières phases d’expansion au sein de l’Europe. Si ces PME viennent à accroître leur activité, elles peuvent sortir du champ des dispositions HOT et choisir d’opter pour celles de BEFIT. Les plus petites activités auront la possibilité de choisir la meilleure option (HOT/BEFIT) en fonction de leurs propres besoins au cours du développement de leur activité.

Ces 2 directives seraient ainsi complémentaires.

Entrée en vigueur

La directive « HOT » entrerait en vigueur le 20e jour suivant sa publication au JOUE.

Les EM devraient adopter et publier les mesures nécessaires à l’application de la directive HOT au plus tard le 31 décembre 2025. De la sorte, les dispositions HOT seraient applicables dans chaque juridiction à compter du 1er janvier 2026.  

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Myriam Mouloudj

Myriam, Avocate, possède une expérience de près de 15 ans en fiscalité. Arrivée chez Deloitte Société d’Avocats en 2006, elle réintègre le cabinet en 2019 pour rejoindre le Comité Scientifique […]