Dans le cadre d’une opération de confusion de patrimoine à effet rétroactif, il ne peut être tenu compte des conséquences d’une augmentation de capital réalisée durant la période intercalaire, pour le calcul de la moins-value d’annulation des titres de la société confondue.
On sait que les sociétés parties à une fusion/TUP peuvent décider d’attribuer à cette opération un effet rétroactif fiscal par une clause spéciale inscrite dans le traité de fusion.
Toutefois, cette faculté est bornée dans le temps. Le Conseil d’État, s’appuyant sur la théorie du bilan et les règles d’annualité de l’impôt, considère que la date d’effet rétroactif ne peut être antérieure à la date d’ouverture de l’exercice de la société absorbante en cours lors de l’approbation définitive de la fusion (CE, 12 juillet 1974, n° 81753). Ces principes s’appliquent également aux opérations de dissolution sans liquidation visées à l’article 1844-5 du Code civil (BOI-IS-FUS-40-40-20181003 n° 50).
Une société avait procédé le 5 février 2010 à une augmentation de capital de sa filiale détenue à 100 % afin de combler sa situation nette négative. Le 10 février 2010, elle a prononcé la dissolution sans liquidation de sa filiale, avec effet rétroactif au 1er janvier 2010. Dans le calcul de la moins-value d’annulation des titres de sa filiale, la société avait tenu compte de l’augmentation de capital pour la détermination de la valeur brute des titres annulés.
L’Administration a estimé que cette opération intervenue en période intercalaire n’avait pas lieu d’être prise en compte pour la détermination de la moins-value d’annulation des titres.
La CAA de Versailles a, au contraire, considéré que les principes posés de longue date par le Conseil d’État en matière de rétroactivité des opérations de restructuration ne s’opposaient pas à la prise en compte de « l’ensemble des éléments constituant le prix d’acquisition des titres annulés », y compris de ceux intervenus en période intercalaire (CAA Versailles, 6 novembre 2018, n° 16VE00247, Sté Orange).
Le Conseil d’État censure cette analyse et retient une acception stricte de la rétroactivité fiscale. Après avoir rappelé les principes posés dans sa décision de 1974, il juge que la société confondante est réputée s’être substituée fiscalement à la société confondue à la date d’effet rétroactif et qu’elle doit être regardée comme ayant reçu elle-même les apports pour leur valeur à la date où l’augmentation du capital est intervenue.
En tout état de cause, désormais depuis l’adoption de l‘article 39 quaterdecies 2 bis du CGI, une telle MV ne serait plus déductible. Il faut tout de même en retenir la conception de la rétroactivité ferme une nouvelle fois retenue par le Conseil d’État.