Alors que l’Agence Française Anticorruption (AFA) vient d’achever son premier plan pluriannuel (2020 – 2022) depuis sa création fin 2016, l’Agence a lancé une consultation publique, le 19 octobre 2023 afin d’établir une nouvelle feuille de route en collaboration avec « les institutions, les acteurs économiques et associatifs, les chercheurs, les professionnels de la conformité et plus largement tous les citoyens qui le souhaitent ».
Cette réflexion commune a pris fin le 19 novembre 2023 et doit alimenter le futur plan pluriannuel pour la période 2024-2027.
En tant qu’experts des sujets relatifs à la conformité et notamment des sujets d’atteintes à la probité, les équipes de Deloitte ont participé à cette réflexion commune.
L’atteinte à la probité au cœur du nouveau plan
Le projet de plan pluriannuel aborde notamment les moyens d’améliorer l’identification des secteurs à risques et la détection des atteintes à la probité par l’intermédiaire de deux axes de développement.
- La connaissance et la détection des atteintes à la probité: l’AFA rappelle que plusieurs lois successives (loi Sapin II, loi sur les lanceurs d’alerte, etc.) renforcent l’appréhension du phénomène d’atteinte à la probité par l’Agence.
- L’éventuelle adaptation des sanctions des atteintes à la probité: les infractions en matière de probité prévoient des sanctions pénales et des peines complémentaires qui concernent tant les personnes physiques que les personnes morales. L’AFA soulève la question de mettre en place des mesures additionnelles qui permettraient de réprimer et de dissuader efficacement les atteintes à la probité.
D’autre part, le nouveau plan pluriannuel pourrait être marqué par le renforcement des obligations mises à la charge des entités et des agents publics. En effet, si la loi Sapin II dans sa version actuelle ne soumet pas explicitement les acteurs publics aux mesures listées à l’article 17 de la même loi, l’AFA soulève la question d’une éventuelle modification de la loi afin de renforcer et expliciter les mesures actuelles attendues, voire d’ajouter de nouvelles mesures à destination des agents et responsables publics.
Un focus spécifique pourrait concerner les collectivités territoriales et établissements qui en dépendent, tout en maintenant une distinction pour les collectivités de plus petite taille, ainsi que sur la commande publique. Sur ce point, l’AFA rappelle les enjeux considérables soulevés par les marchés publics, qui constituent une des principales activités à risque en matière d’atteinte à la probité. Elle cite notamment en exemple l’année 2021 au cours de laquelle les marchés publics ont représenté 151,8 mds€.
Enfin, le plan pluriannuel de lutte contre la corruption 2024-2027 envisage quatre autres axes de travail afin de renforcer l’influence de l’AFA et la lutte contre les atteintes à la probité.
- Définir des priorités géographiques et sectorielles: l’AFA cherche à identifier les secteurs nécessitant une attention particulière en matière de prévention des risques de corruption pour la période 2024-2027, afin de développer des mesures adaptées pour chacun de ces secteurs.
- Protéger le secteur économique: si les enquêtes menées par l’AFA constatent une progression dans la prise en compte par les entreprises des enjeux liés aux atteintes à la probité, l’AFA semble vouloir renforcer la prise de conscience collective de ces enjeux via l’établissement de mesures complémentaires et/ou la mise en place de mécanismes permettant de professionnaliser la fonction de conformité dans les entreprises.
- Sensibiliser et communiquer en direction des plus jeunes: si le lien démocratique est renforcé par le sentiment que la probité et l’intégrité de la vie publique sont garantis, l’AFA soulève la question des mesures permettant de mieux informer et sensibiliser le public, notamment les jeunes.
- Valoriser l’action de la France au niveau international: enfin, l’AFA souhaite promouvoir davantage le rôle et l’influence de la France en faveur de la lutte contre les atteintes à la probité afin d’en faire un facteur d’attractivité économique au niveau international. L’AFA rappelle qu’à ce titre, le dispositif français se hisse parmi les standards internationaux les plus exigeants.
La consultation s’étant achevée le 19 novembre 2023, les propositions des participants seront agrégées aux travaux interministériels en cours afin de préparer le plan national pluriannuel de lutte contre la corruption.
Nous resterons donc très attentifs au contenu du plan et à la détermination des actions nouvelles qui seront portées dans le plan 2024-2027.