La directive sur le CbCR public, adoptée par le Parlement européen le 11 novembre dernier, vient d’être publiée au Journal Officiel de l’UE.
Pour mémoire, cette directive vise à contraindre les grands groupes multinationaux (i.e. ceux dont le chiffre d’affaires mondial consolidé excède 750 m€) à publier chaque année un rapport indiquant leurs bénéfices, ainsi que leurs impôts dus et payés.
Cette adoption met un terme à plus de 5 années de débats houleux et de divergences entre les Etats membres.
Le texte publié correspond à celui qui avait été approuvé par le Conseil de l’UE le 28 septembre 2021. Il comporte toutefois quelques précisions nouvelles sur le calendrier (date limite de transposition et clause de révision).
Que prévoit la directive ?
Seront concernés :
- Les groupes dont la société mère ultime est établie dans un Etat de l’UE et dont le CA consolidé excède 750 m€ sur les 2 derniers exercices (condition commune avec le CbCR entre administrations fiscales, issu de l’action 13 de BEPS) ;
- Les filiales/succursales européennes dont la société mère ultime est établie dans un Etat tiers, dès lors que les entités concernées répondent à la définition européenne d’entreprises de taille moyenne ou de grande taille, et que le CA consolidé du groupe excède 750 m€ au titre des 2 derniers exercices.
Les entités du secteur bancaire, déjà soumises à une obligation de déclaration pays par pays (en application de la directive 2013/36/UE), seront toutefois exemptées de l’obligation CbCR public.
Les informations devant faire l’objet d’une déclaration seront, pour l’essentiel, les mêmes que celles devant déjà être fournies dans le cadre du CbCR « fiscal » :
- Brève description de la nature des activités ;
- Nombre de salariés ;
- Chiffre d’affaires net :
- Dans le cadre du CbCR public, le chiffre d’affaires inclut celui relatif aux transactions avec les entités liées ;
- Dans le cadre du CbCR « fiscal », il convient de présenter de manière distincte (i) le chiffre d’affaires résultant des transactions intragroupe (ii) le chiffre d’affaires résultant des transactions avec des parties indépendantes (iii) le chiffre d’affaires total ;
- Le bénéfice ou la perte avant impôt sur les bénéfices ;
- L’impôt sur les sociétés dû (à l’exclusion des impôts différés et des provisions pour position fiscale incertaine) ;
- L’impôt sur les sociétés acquitté (incluant les retenues à la source sur paiements intragroupes) ;
- Le montant cumulé des bénéfices non distribués à la fin de l’exercice.
On observera que dans le cadre du CbCR « fiscal », il convient également d’indiquer le capital social, ainsi que les actifs corporels hors trésorerie et équivalent de trésorerie.
Ces informations seront présentées isolément pour chaque implantation dans un Etat membre de l’Union européenne ou figurant sur la liste noire européenne (ou, depuis plus de 2 ans, sur la liste grise), sous forme agrégée pour les autres Etats d’implantation. Elles devront être fournies dans un délai maximal de 12 mois à compter de la clôture du bilan.
La déclaration incombera à la société mère ultime européenne, ou aux filiales/succursales européennes des groupes non UE. Ces dernières devront collecter auprès de leur entité mère ultime les informations requises. Si l’entité mère ultime non européenne refuse de faire droit à cette demande, alors la filiale européenne devra publier les seules informations dont elle dispose, assorties d’une déclaration indiquant que la société mère ultime n’a pas mis à sa disposition les informations nécessaires.
Les entreprises auront la faculté de faire jouer une clause de sauvegarde temporaire pour reporter la publication d’informations trop sensibles (dont la publication « porterait à l’entreprise un préjudice commercial grave »). Ces informations devront être publiées dans un délai maximal de 5 ans suivant la date de son omission initiale.
La Directive prévoit que les Etats membres devront veiller à ce que les informations relatives aux Etats figurant sur la liste noire de l’UE (ou depuis plus de 2 ans sur la liste grise) ne puissent jamais bénéficier de cette clause de sauvegarde.
Calendrier (précisions nouvelles)
La directive entrera en vigueur 20 jours après sa publication au Journal Officiel de l’UE, soit le 21 décembre 2021.
Elle devra être transposée par les Etats membres au plus tard le 22 juin 2023.
Les Etats membres devront veiller à ce que leurs textes de transposition s’appliquent au plus tard à partir de la date d’ouverture du 1er exercice financier commençant le 22 juin 2024.
Enfin, on notera que la directive comprend une clause de révision. Au plus tard le 22 juin 2027, la Commission européenne devra présenter un rapport sur les modalités de mise en œuvre du CbCR public et sur l’opportunité d’en étendre le champ d’application.