Le Conseil d’État censure la CAA de Nantes d’avoir jugé que si la présence à Londres (lieu de domiciliation) d’un président d’un club de football a pu avoir des répercussions positives sur le club, ces répercussions ne sauraient justifier de la nécessité d’une présence permanente de ce dernier dans cette ville et d’avoir considéré, dans ces conditions, la non-déductibilité de ses dépenses de déplacements correspondantes sans rechercher si les déplacements en cause intervenaient pour les besoins de l’exercice par ce dernier de ses fonctions ou s’ils avaient la nature de déplacements personnels.
Par principe, les frais de voyage exposés par les personnes les mieux rémunérées de l’entreprise (i.e. frais de transport, hôtellerie et restauration exposés par une société pour les besoins des déplacements effectués par un de ses salariés/dirigeants dans l’exercice de ses fonctions) sont déductibles, en tant que charges, lorsque ceux-ci correspondent à des dépenses professionnelles et sont suffisamment justifiés.
En revanche, ces dépenses peuvent être réintégrées dans les bénéfices imposables de l’entreprise dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n’a pas été apportée qu’elles ont été engagées dans son intérêt direct (CGI, art. 39, 5).
L’Administration précise dans ses commentaires publiés au BOFiP qu’il lui revient, en 1er lieu, d’établir le caractère excessif des dépenses, ce n’est qu’à l’issue de cette 1re appréciation que les entreprises peuvent être appelées à démontrer que les dépenses litigieuses ont été exposées dans l’intérêt direct de l’exploitation (BOI-BIC-CHG-40-60-30-12/09/2012, §30).
Les frais de déplacement domicile-lieu de travail constituent des frais professionnels déductibles des revenus du contribuable, sur justificatifs, pour les déplacements de moins de 40 km (CGI, art. 83, 3°). Lorsque ces sommes sont prises en charge par l’employeur, celles-ci constituent un avantage en nature accordé au salarié/dirigeant par son entreprise. Ces avantages sont considérés comme un supplément de rémunération déductible pour l’entreprise, à moins que la rémunération totale ne soit considérée comme excessive par rapport au service rendu.
L’histoire
Dans cette affaire, la société détenant et gérant un club de football a pris en charge des frais de transport, d’hôtellerie et de restauration exposés par son président pour ses déplacements depuis Londres (où il est domicilié et où il exerce une activité professionnelle dans le secteur de la finance) vers des villes françaises – dont celle du club en question.
À l’issue d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a remis en cause la déductibilité de ces dépenses et a réintégré aux résultats de la société les sommes correspondantes.
La décision
Le Conseil d’État rappelle tout d’abord dans un considérant très pédagogue les règles précitées régissant la déductibilité en charges des frais de transport, hôtellerie et restauration exposés par une entreprise pour les besoins des déplacements effectués par ses salariés ou dirigeants dans l’exercice de leurs fonctions d’une part, et des frais de déplacement domicile-lieu de travail des salariés ou dirigeants, d’autre part.
À la lumière de ces principes, il estime les éléments retenus par la CAA insuffisants pour remettre en cause la déductibilité de l’ensemble des frais de transport, d’hôtellerie et de restauration exposés par l’entreprise pour les déplacements de son président :
- Les dépenses correspondaient pour l’essentiel à des dépenses en avion privé entre Londres et des villes françaises – dont celle du club en question ;
- L’entreprise ne justifiait pas que la présence de son président à Londres ait été nécessitée par les répercussions positives attendues pour le club.
Le Conseil d’État juge en effet que la CAA de Nantes aurait dû rechercher si les déplacements effectués par le président et pris en charge par l’entreprise intervenaient pour les besoins de l’exercice de ses fonctions de président ou si à l’inverse ceux-ci constituaient des déplacements personnels du président pour se rendre sur son lieu de travail.
Il casse donc l’arrêt d’appel pour avoir suivi la position de l’administration fiscale et renvoie l’affaire devant la même Cour.
On saluera cette décision du Conseil d’État qui prend le soin de revenir sur les règles applicables en la matière au regard des faits de l’espèce.