Par une stricte application du 2e alinéa de l’article 720 du CGI, la Cour de cassation juge que les droits d’enregistrement afférents à une convention de successeur doivent être assis sur les sommes effectivement acquittées au titre de cette convention et non sur la valeur de l’activité transférée.
Convention de successeur : En matière de droits d’enregistrement, toute convention à titre onéreux ayant pour effet de permettre à une personne d’exercer une profession, une fonction ou un emploi occupé par un précédent titulaire (« conventions de successeur ») est en principe soumise au régime des cessions de fonds de commerce ou de clientèles (CGI, art. 720 al.1).
Par ailleurs, selon les dispositions applicables, l’assiette des droits d’enregistrement afférents à une convention de successeur est constituée de toutes les sommes dont le paiement est imposé, du chef de la convention, sous quelque dénomination que ce soit, au successeur, ainsi que de toutes les charges lui incombant au même titre (CGI, art. 720 al.2 et BOI-ENR-DMTOM-10-20-10-20120912 § 80).
Cession de fonds de commerce ou de clientèle : Le régime des cessions de fonds de commerce ou de clientèle est régi, quant à lui, par l’article 719 du CGI. Le second alinéa de l’article 719 du CGI précise que l’assiette des droits d’enregistrement afférents à une cession de fonds de commerce ou de clientèle est constituée par le prix de la vente, de l’achalandage, de la cession du droit au bail et des objets mobiliers ou autres servant à l’exploitation du fonds (CGI, art. 719 al.2).
En application de l’article L. 17 du LPF, en matière de droits d’enregistrement, l’Administration peut rectifier le prix ou l’évaluation d’un bien ayant servi de base à la perception d’une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations.
À titre de précision, l’Administration retient dans ses commentaires au BOFIP concernant l’assiette des droits afférents aux cessions de fonds de commerce et de clientèles que si la valeur vénale réelle des biens est supérieure au prix augmenté des charges, le droit de mutation doit, en application de l’article L17 du LPF, être calculé sur la valeur vénale réelle des biens transmis (BOI ENR-DMTOM-10-20-10-20120912 § 10).
L’histoire
Deux sociétés ont regroupé leurs activités de gestion d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) au sein de l’une d’elles moyennant une contrepartie financière. À cet effet, une convention de successeur et une convention de partage de bénéfices ont été conclues entre les deux sociétés. A ce titre, le successeur a rétrocédé au prédécesseur la quote-part du résultat d’exploitation réalisée au titre de la gestion des portefeuilles d’OPCVM transférés. Cette quote-part du résultat d’exploitation rétrocédée par le successeur a été soumise aux droits d’enregistrement en application de l’article 720 du CGI.
À la suite d’une vérification de comptabilité, l’Administration a remis en cause l’assiette des droits d’enregistrement et mis en recouvrement des droits supplémentaires au motif que les sommes ainsi rétrocédées ne correspondaient pas à la valorisation de l’activité transférée – en considération notamment des différentes transactions sur titres intervenues au sein du groupe.
La décision
La chambre commerciale de la Cour de cassation confirme la décision de la Cour d’appel selon laquelle en application de l’article 720 du CGI et de la doctrine fiscale, l’assiette des droits d’enregistrement afférents à une convention de successeur porte sur toutes les sommes dont le paiement est imposé, du chef de la convention, au successeur, sous quelque dénomination que ce soit, ainsi que sur toutes les charges lui incombant au même titre. Aussi, elle juge que, c’est à bon droit, que cette dernière a retenu que les droits de mutation à la charge du successeur devaient porter sur les sommes rétrocédées, effectivement acquittées en exécution de la convention de successeur, et non sur la valeur de l’activité transférée, telle que déterminée par l’administration fiscale.
La Cour de cassation fait donc prévaloir l’alinéa 2 de l’article 720 du CGI qui fixe la base imposable aux droits d’enregistrement des conventions de successeurs. Elle rejette ainsi le moyen selon lequel les dispositions combinées de l’article L. 17 du LPF et des articles 666, 719 et 720 du CGI donneraient à l’Administration, en matière de droits d’enregistrement, un « droit général de rectification » de la valeur déclarée des biens cédés qui serait transposable aux conventions de successeur, dès lors que le prix ou l’évaluation correspondant paraîtrait inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations.