Dans le cadre de la crise sanitaire, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (l’ACPR) a décidé de diligenter une enquête sectorielle relative aux assurances « pertes d’exploitation ».
Ces dernières sont censées compenser la perte de chiffre d’affaires de l’assuré en cas de ralentissement ou d’interruption de son activité. En effet, les mesures de fermetures administratives imposées aux commerces « non essentiels » à la Nation ont soulevé des interrogations sur la possibilité pour les entreprises concernées d’être indemnisées au titre de la garantie « pertes d’exploitation » lorsque celles-ci disposent d’une telle couverture. Le 23 juin 2020, l’ACPR a dévoilé le résultat de son enquête dans un communiqué de presse et a également rappelé les règles applicables aux assureurs.
L’état des lieux dressé par l’ACPR
Les données recueillies par l’ACPR permettent de constater que la garantie « pertes d’exploitation » est exclue pour 93 % des assurés dans le cadre des contrats analysés. Ainsi, dans la grande majorité des cas, la mise en œuvre de cette garantie est soit subordonnée à la survenance d’un dommage aux biens (incendie, dégâts des eaux, etc.), soit clairement exclue en cas de pandémie.
A l’inverse, l’ACPR constate qu’environ 3 % des entreprises assurées peuvent prétendre à une indemnisation et qu’environ 4 % des contrats analysés contiennent des clauses contractuelles qui « ne permettent pas de conclure avec certitude à une absence de garantie ». Pour ces derniers contrats, l’ACPR prend le soin de préciser : qu’en application de l’article 1190 du Code civil, le doute devrait s’interpréter en faveur de l’assuré.
L’ACPR met l’accent sur la bonne foi
La publication des résultats de cette étude permet également au régulateur d’inviter les assureurs à vérifier qu’ils disposent d’un niveau adéquat de provisions pour les 7 % de contrats qui couvrent explicitement ou possiblement le risque de pandémie pour les assurances « pertes d’exploitation ». L’ACPR rappelle également aux assureurs, qu’au titre de l’obligation d’exécuter les conventions de bonne foi, qu’ils doivent répondre dans des délais raisonnables aux demandes d’information relatives aux contrats d’assurance et doivent, le cas échéant, expliciter les refus de garantie qu’ils opposent aux assurés.
En conclusion, le communiqué de presse de l’ACPR fournit des précisions et recommandations importantes dans un contexte de tensions entre les entreprises impactées par la crise sanitaire et les assureurs.
Cette enquête sectorielle met surtout en lumière les difficultés réelles pour la majorité des entreprises à une indemnisation sur le fondement des « pertes d’exploitation ».
Dans ce contexte, le débat de l’indemnisation des pertes dues à la Covid-19 pourrait se déplacer sur le terrain de la reconnaissance par les pouvoirs publics d’un état de catastrophe sanitaire, ouvrant, selon certains observateurs, de nouvelles possibilités d’indemnisation pour les entreprises impactées. Une proposition de loi a été déposée le 24 mars à l’Assemblée nationale afin notamment d’ouvrir, moyennant le paiement d’une prime spécifique, le droit à une garantie des assurés contre les effets des catastrophes sanitaires dans le cadre des contrats d’assurance garantissant les dommages d’incendie ou tous autres dommages à des biens. La proposition de loi envisage également l’extension de la garantie des pertes d’exploitation des assurés aux effets des catastrophes sanitaires.
L’actualité des prochains mois révélera les réponses retenues par le législateur sur cette épineuse question de l’indemnisation des « victimes économiques » de l’épidémie de coronavirus.