Il y a plus d’un siècle, la Cour de cassation rendait ses premiers arrêts affirmant le principe de libre révocation des administrateurs de sociétés anonymes. Personne ne sera donc surpris que la présente décision (Cass. com., 26 avril 2017, n° 15-12888), se bornant à appliquer ce principe d’ordre public, ne soit pas publiée au bulletin.
En l’espèce, deux sociétés fusionnent et un pacte extrastatutaire est conclu entre les actionnaires de la société anonyme résultante, prévoyant notamment que ladite société « serait administrée par un conseil d’administration composé par un nombre pair de membres choisis à parité parmi les candidats présentés par les titulaires d’actions ». De plus, les rédacteurs du pacte y mentionnent de manière nominative l’identité du futur président ainsi que du directeur général.
L’associé majoritaire, en assemblée générale, révoque le minoritaire de ses fonctions d’administrateur, emportant au passage son titre de directeur général. L’administrateur déchu, actionnaire minoritaire, assigne donc en violation des engagements issu du pacte ; la Cour d’appel ne fait pas droit à la demande de dommages et intérêt à l’encontre de l’actionnaire majoritaire.
La cour régulatrice, au rappel de l’ancestral principe d’ordre public selon lequel « est illicite toute stipulation ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la libre révocabilité de l’administrateur d’une société anonyme », rejette le pourvoi introduit par l’administrateur déchu. Le défendeur ne peut donc voir sa responsabilité engagée et la violation du pacte, non contestée, restera « impunie ».
Cette décision ne contribue toutefois pas à l’affaiblissement du pacte d’actionnaire car elle se borne à rappeler à l’attention des rédacteurs d’actes qu’en matière de pacte extrastatutaire, une indication nominative relative à la gouvernance d’une société anonyme est fortement périlleuse. En effet, la stipulation du pacte ne saurait recevoir exécution en cas de révocation.
Sans doute le couperet de la révocation ad nutum aura-t-il été émoussé par la jurisprudence exigeant désormais qu’elle soit non vexatoire et respecte le principe du contradictoire. Emoussée dans ses conditions de validité, la révocation ad nutum ne perd rien de son tranchant de principe … et un pacte d’actionnaire ne saurait y faire obstacle.