Après une jurisprudence favorable au contribuable rendu par la Cour de cassation le 25 mai 2022, l’amendement déposé par Monsieur Jean-René Cazeneuve le 18 juillet 2022 visant à retenir une appréciation de cette condition d’activité sur toute la durée des engagements collectifs et individuel de conservation a été adopté par l’Assemblée nationale.
Un historique mouvementé
Rappelons que le 25 mai dernier, la cour de cassation a rendu un arrêt dans lequel elle faisait une lecture littérale de l’article 787 B du Code Général des Impôts (CGI) et jugeait que l’administration fiscale ne pouvait pas exiger que l’activité éligible de la société dont les titres sont transmis continue à être effectivement exercée pendant toute la durée des engagements de conservation, car cette exigence rajouterait une condition non prévue par la loi.
Cette décision, qui remettait en cause la doctrine publiée par l’administration fiscale le 21 décembre 2021, avait suscité de nombreuses réactions des praticiens.
Retrouvez notre dernier article sur le sujet : Pacte Dutreil : une nouvelle matrice pour l’appréciation de l’activité éligible ?
Une rectification sous le signe de la clarification et de la stabilisation
L’intervention du législateur ne s’est pas faite attendre puisque l’amendement visant à retenir une appréciation dans la durée de la condition d’activité exercée par la société éligible, déposé dans le cadre du Projet de Loi de Finances Rectificatives (PLFR), a été adopté le 23 juillet lors de la première lecture du texte.
Dans cet amendement, il est ajouté un « c bis. » à l’article 787 B du CGI qui dispose que la condition d’activité doit être satisfaite à compter de la conclusion de l’engagement collectif de conservation jusqu’au terme de l’engagement individuel de conservation. Cette condition est ensuite déclinée pour l’engagement post-mortem et réputé acquis.
Bientôt gravée dans le marbre de la loi, cette condition d’éligibilité de l’activité tout au long de la période de conservation, qui était déjà prévue par la doctrine fiscale et intégrée par la pratique, sera désormais appliquée sans marge de manœuvre laissée à l’interprétation.
Notons néanmoins que l’administration admettait déjà dans sa doctrine (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10 n°25) que l’activité puisse être modifiée au cours de la période, sous la réserve que la nouvelle activité soit elle-même éligible.
Enfin, soulignons l’encadrement de l’applicabilité dans le temps de ce nouvel alinéa de l’article 787 B qui est prévu par l’amendement. Sous réserve d’une adoption définitive, cette nouvelle condition s’appliquerait pour toute transmission intervenant à compter du 18 juillet 2022, date de dépôt dudit amendement, ceci « afin d’éviter des cessions d’actifs d’exploitation ou de filiales opérationnelles entre la présentation de l’amendement et l’entrée en vigueur de la loi » ainsi qu’il est exposé dans les motifs de la mesure. En outre, cette condition s’appliquera également aux sociétés qui n’ont pas cessé l’exercice d’une activité opérationnelle et dont les titres qui ont été transmis font encore l’objet d’engagements de conservation.
Par ce nouvel ajout législatif à la construction complexe que représente le dispositif fiscal de faveur dit « pacte Dutreil », le droit positif encadrant la transmission d’entreprise semble stabilisé et offre la sécurité juridique nécessaire à de telles opérations sous réserve de l’accompagnement indispensable d’un expert pour leur mise en œuvre.