Précisions sur le champ d’application de l’obligation de déclaration des comptes bancaires étrangers

Le Conseil d’Etat juge que l’obligation de déclaration des comptes bancaires à l’étranger (CGI, art. 1649 A, al 2) concerne les comptes que le contribuable a utilisés, quel qu’en soit le titulaire – y compris si ce titulaire est une société commerciale.

Rappel

Pour mémoire, les personnes physiques, les associations et les sociétés n’ayant pas la forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes bancaires ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger (CGI, art. 1649 A, al 2).

L’Administration a précisé – en ligne avec les dispositions de l’article 344 A de l’annexe III au CGI – que cette obligation déclarative concernait non seulement les contribuables titulaires d’un compte bancaire étranger, mais également ceux qui sont bénéficiaires d’une procuration sur un tel compte (BOI-CF-CPF-30-20, n°10, 8 mars 2017).

Ce défaut de déclaration est notamment sanctionné par l’application d’une amende forfaitaire d’un montant de 1 500 € (pouvant être porté à 10 000 € lorsque le compte est situé dans un Etat n’ayant pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative permettant l’accès aux renseignements bancaires). Surtout, les sommes, titres ou valeurs transférés à l’étranger ou en provenance de l’étranger par l’intermédiaire d’un compte bancaire non déclaré, constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables en France.

L’histoire

Une société française exerçant une activité d’achat-revente a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2011 à 2013, à l’issue de laquelle l’Administration a constaté que son dirigeant avait créé une société de droit chypriote, à laquelle il avait confié une mission d’agent commercial intermédiaire entre la société française et ses fournisseurs.

La société chypriote refacturait à la société française les achats effectués avec une majoration moyenne d’environ 30 %.

Les factures adressées à la société française avaient été réglées par virement au crédit d’un compte bancaire ouvert en Lettonie au nom de la société chypriote, sur lequel le dirigeant détenait une procuration lui donnant tous pouvoirs et depuis lequel les sommes en question avaient ensuite été transférées vers les comptes bancaires personnels du dirigeant et des membres de sa famille.

L’Administration a considéré, sur le fondement des dispositions de l’article 1649 A du CGI, que le solde créditeur du compte bancaire letton de la société chypriote provenant de la facturation de ses prestations d’intermédiaire devait être regardé comme un revenu taxable entre les mains du dirigeant dans la catégorie des RCM.

Le contribuable arguait, lui, qu’il n’était pas concerné par les dispositions de l’article 1649 A, dès lors que le titulaire du compte était une société commerciale non établie en France – la société chypriote – et qu’il n’avait lui-même agi qu’en qualité de mandataire social de cette société.

La décision du Conseil d’Etat

Dans un considérant de principe très clair, le Conseil d’Etat juge qu’entre dans le champ de l’obligation déclarative de l’article 1649 A du CGI tout compte bancaire ouvert, utilisé ou clos à l’étranger par une personne physique, une association ou une société n’ayant pas la forme commerciale, domiciliée ou établie en France, quel que soit le titulaire de ce compte, y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale. Rappelons qu’au cas d’espèce, le contribuable était associé à 50 % de ladite société, avait tout pouvoir sur le compte bancaire qu’elle avait ouvert en Lettonie, et que ce compte avait été débité sur son ordre.

Il complète ici sa jurisprudence selon laquelle un contribuable doit déclarer non seulement les comptes dont il est titulaire, mais également ceux sur lesquels il détient une procuration (CE, 30 décembre 2009, n°299131, Lisiak).

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Clara Maignan

Clara Maignan, avocat, a rejoint les équipes de Deloitte Société d’Avocats en 2011. Elle exerce au sein du Comité Scientifique Fiscal.