Aperçu des mesures les plus significatives de la convention signée entre la France et la Grèce le 11 mai 2022. La date d’entrée en vigueur n’est pas encore fixée.
La convention fiscale, tout récemment signée par la France et la Grèce, viendrait se substituer à la convention actuellement en vigueur telle que signée en 1963 et modifiée par le MLI.
Cette nouvelle convention est, dans les grandes lignes, conforme à la convention modèle OCDE, et très inspirée du texte du MLI (instrument multilatéral visant à mettre en musique les actions issues du plan BEPS en modifiant les conventions bilatérales conclues).
Convention franco-grecque & MLI
Dès lors que la nouvelle convention fiscale a été signée postérieurement au dépôt par la France et la Grèce de leurs instruments de ratification au titre du MLI, elle ne sera pas regardée en tant que telle, comme couverte par le MLI.
En revanche, elle intègre un certain nombre de dispositions phares du MLI, à l’instar de la clause générale anti-abus du « Principal Purpose Test » (art. 7 du MLI), qui y est reprise à l’identique (art. 27).
La convention inclus, en son article 5 relatif à l’établissement stable, la nouvelle notion d’agent dépendant, susceptible de conduire à la caractérisation d’un établissement stable (personne concluant habituellement des contrats ou jouant habituellement le rôle principal menant à la conclusion de contrats, qui de façon routinière, sont conclus sans modification importante par l’entreprise étrangère). Elle comporte également la clause visant à éviter artificiellement le statut d’établissement stable par des accords de commissionnaires.
En revanche, s’agissant des exceptions en faveur d’activités spécifiques (présence d’un établissement stable écarté, par exemple, pour des activités, de stockage, d’exposition, ou de livraison de marchandises), la convention n’ajoute pas, de manière systématique pour chacune des activités listées, la condition qu’elle présente un caractère préparatoire ou auxiliaire (et retient donc « l’option B » offerte par le MLI).
La convention comprend, par ailleurs, des dispositions spécifiques aux gains en capital tirés de l’aliénation d’actions, de droits ou de participations dans des entités tirant leur valeur principalement de biens immobiliers (art. 9 du MLI). Il est ainsi précisé à l’article 13.4, que les gains qu’un résident d’un État contractant tire de l’aliénation d’actions ou de droits ou participations similaires, tels que des droits ou participations dans une société de personnes ou une fiducie (ou un trust) sont imposables dans l’autre État contractant si, à tout moment au cours des 365 jours qui précédent l’aliénation, ces actions, droits ou participations similaires tirent directement ou indirectement plus de 50 % de leur valeur de biens immobiliers situés dans cet autre État.
La convention prévoit qu’en cas de double résidence d’une personne morale, celle-ci sera considérée comme un résident seulement de l’État où son siège de direction effective est situé (art. 4.3 de la convention, inspiré de l’art. 4 du MLI, au titre duquel la France avait formulé une réserve).
Enfin, la convention comprend dans son article 9 relatif aux entreprises associées, l’ajustement prévu par le MLI dans l’hypothèse où un État contractant inclut dans les bénéfices d’une entreprise résidente, des bénéfices sur lesquels une entreprise de l’autre État contractant a déjà été imposée (art. 17 du MLI).
Points d’attention
Si la nouvelle convention franco-grecque est, dans les grandes lignes, conforme au modèle OCDE, nous attirons votre attention sur les points suivants :
- Résident (art. 4 et protocole [2]) : Si la définition de « résident d’un État contractant » est conforme à celle du modèle OCDE, la convention comporte une définition spécifique pour les sociétés de personnes ou entités analogues françaises. Ainsi, seront considérées comme résidentes de France de telles entités lorsque :
- leur siège de direction effective est en France ;
- elles sont assujetties à l’impôt en France ; et
- tous les porteurs de parts, associés ou membres sont, en application de la législation fiscale française, personnellement soumis à l’impôt à raison de leur quote-part dans les bénéfices de cette société de personnes ou de cette autre entité analogue (y compris un groupement de personnes).
- Dividendes (art. 10) : La nouvelle convention prévoit que les dividendes sont imposables dans l’État de résidence de leur bénéficiaire ainsi que dans l’État de source.
Toutefois, aucune RAS ne pourra être appliquée si le bénéficiaire effectif des dividendes est une société qui détient directement tout au long d’une période de 24 mois au moins 5 % de la société qui verse les dividendes. La RAS sera plafonnée à 15 % dans tous les autres cas (la convention actuellement en vigueur prévoit une répartition du droit d’imposer mais ne plafonne pas le montant de la RAS qui peut être appliquée par l’État de source).
La définition des dividendes est élargie (revenus soumis au régime des distributions par la législation fiscale de l’État de distribution).
- Intérêts (art. 11) : Le droit d’imposer les intérêts sera attribué à l’État de résidence du bénéficiaire et à l’État de source des intérêts. Toutefois, dans l’hypothèse où le bénéficiaire effectif des intérêts est résident de l’autre État contractant, la RAS appliquée par l’État de source ne pourra excéder 5 % (la convention actuellement en vigueur prévoit pour la France une RAS maximale de 12 % et pour la Grèce une RAS maximale de 10 %).
- Redevances (art. 12) : Les redevances provenant d’un État contractant et dont le bénéficiaire effectif est un résident de l’autre État contractant seront imposables dans cet autre État. L’État de source des redevances pourra également les imposer dans la limite d’une RAS de 5 % (même taux que la convention actuellement en vigueur).
- Elimination des doubles impositions (art. 21): On notera la disparition des crédits d’impôt forfaitaires imputables en France sur certains revenus de source grecque prévus dans l’actuelle convention (dividendes, intérêts, redevances).
- Non-discrimination (art. 22) : Le contenu de l’article est classique. On notera juste que la convention exclue spécifiquement pour la matière fiscale l’application de toutes clauses de non-discrimination ou de la nation la plus favorisée qui pourraient être inclues dans les autres accords ou traités conclus par la France et la Grèce.
- Applicabilité de dispositions françaises spécifiques (protocole [5]) : La nouvelle convention préservera la possibilité pour la France d’appliquer un certain nombre de ses dispositions de droit interne. Ainsi, demeureraient applicables les articles 123 bis, 155 A, 115 quinquies, 209 B, 212, 238 A et 238-0 A du CGI, ou d’autres dispositions analogues qui amenderaient ou remplaceraient les dispositions de ces articles.
- On relèvera enfin l’absence, dans la nouvelle convention, de clause de « participations substantielles » visant à préserver la possibilité d’appliquer l’article 244 bis B du CGI.
Entrée en vigueur de la nouvelle convention franco-grecque (art. 29)
Avant de pouvoir entrer en vigueur, la nouvelle convention doit être soumise à approbation parlementaire et ratification par la France et la Grèce, lesquelles devront ensuite mutuellement se notifier l’accomplissement de ces procédures.
La convention entrera en vigueur le 1er jour qui suit la date de réception de la dernière de ces notifications, et ses dispositions s’appliqueront [i.e. remplaceront les dispositions prévues par la convention franco-grecque de 1963, actuellement en vigueur] :
- en ce qui concerne les impôts sur le revenu perçus par voie de RAS, aux impôts dont le fait générateur intervient à compter du 1er jour de l’année civile qui suit celle au cours de laquelle la convention est entrée en vigueur ;
- en ce qui concerne les impôts sur le revenu qui ne sont pas perçus par voie de RAS, aux impôts perçus au titre, suivant les cas, de toute année civile, année fiscale ou exercice commençant après l’année civile au cours de laquelle la convention est entrée en vigueur ;
- en ce qui concerne les autres impôts, aux impositions dont le fait générateur intervient à compter du 1er jour de l’année civile qui suit celle au cours de laquelle la convention est entrée en vigueur.