Introduite par la loi n° 2007-211 du 19 février 2007, la fiducie reste un outil peu utilisé encore eu égard à ses caractéristiques (notamment sécurité et flexibilité) pour les opérations complexes et à forts enjeux financiers. Début 2020, seuls 208 actes relatifs à des fiducies étaient enregistrés, dont 59 actes enregistrés au cours de l’année 2019 au registre national des fiducies.
La fiducie est définie par l’article 2011 du Code civil comme une opération par laquelle un, ou plusieurs, constituants transfèrent des biens, droits ou sûretés à un fiduciaire, qui les tient séparés de son propre patrimoine et agit dans un but déterminé pour le bénéfice de tiers.
La fiducie immobilière est particulièrement utile pour garantir des engagements tels que le paiement d’une dette ou d’un emprunt bancaire. En effet, en transférant la propriété d’un bien au fiduciaire dans un patrimoine d’affectation, celui-ci est isolé du patrimoine du débiteur, le mettant hors de portée des autres créanciers du débiteur ainsi que des créanciers du fiduciaire et du bénéficiaire.
Si la dette est remboursée, le bien retourne dans le patrimoine du débiteur, sauf convention de rechargement. L’opération est neutre. En cas de défaut, le fiduciaire transfert le bien au créancier bénéficiaire, ou le vend et verse les fonds correspondants au prix de vente au créancier. Lorsque le fiduciaire est aussi le créancier, il conserve la propriété du bien ou le met en vente à son profit.
La différence fondamentale avec les sûretés classiques tient dans le fait que la propriété du bien immobilier ou des titres de la société qui le détient peut-être transmise au fiduciaire dès la mise en place de la fiducie, contrairement à la situation du créancier hypothécaire qui n’est pas propriétaire du bien hypothéqué. Le créancier hypothécaire dispose certes, mais uniquement, d’un droit de préférence sur la valeur du bien, assiette de l’hypothèque. En outre, les titres de la société ne peuvent pas constituer l’assiette d’une hypothèque, et il faut alors avoir recours à une sûreté mobilière (nantissement de parts sociales ou nantissement de compte d’instrument financier).
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Aussi, contrairement aux autres sûretés, la fiducie-sûreté immobilière peut porter directement sur un bien immobilier ou sur les titres de la société détenant l’actif immobilier, ce qui offre une plus grande flexibilité par rapport, notamment, à l’hypothèque. C’est la convention de fiducie, elle-même, qui va régir les droits et les pouvoirs du fiduciaire, et elle peut laisser un pouvoir de gestion aux mains du débiteur tant que la sûreté n’est pas mise en œuvre. Par ailleurs, elle encadre aussi les conditions dans lesquelles les titres ou le bien immobilier peuvent être mis en vente en cas de défaut du débiteur constituant.
De plus, il est possible de prévoir une mise à disposition de l’immeuble au profit du débiteur au titre d’un bail, par exemple, alors même que l’immeuble est transféré au fiduciaire en garantie des engagements du débiteur. Il convient, toutefois, d’examiner avec soin les conséquences de cette solution car elle affaiblit la force de la fiducie sûreté.
Que se passe-t-il en cas d’ouverture de liquidation judiciaire à l’encontre du débiteur ?
Dans le cas de l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre du débiteur, le créancier bénéficiaire de la fiducie est à l’abri de tout concours, à l’exception des autres créanciers de la fiducie. En effet, le bien est sorti du patrimoine du débiteur lors de la constitution de la fiducie et ne peut donc pas être saisi dans le cadre de la procédure collective.
Le fiduciaire peut alors réaliser la fiducie à tout moment, sauf si le constituant a conservé l’usage et la jouissance des actifs transférés en fiducie dans le cadre d’une convention de mise à disposition. En effet, dans ce dernier cas, les biens qui sont laissés à la disposition du constituant par le fiduciaire sont réputés nécessaires à l’exercice de l’activité de l’entreprise placée en sauvegarde, ou en redressement, et ne peuvent être saisis, en application des dispositions propres à ces procédures.
Pour aller plus loin :
– Sûretés immobilières, volume 1 : la mise en œuvre des sûretés immobilières classiques
– Sûretés immobilières, volume 3 : fiducie immobilière ou hypothèque, quelle sûreté choisir ?