La CAA de Nantes l’applique même en cas d’identité partielle des actionnaires contrôlant la cible avant et après l’opération de reprise.
Les titres d’une société, contrôlée par son fondateur et dirigeant, ont été cédés à une holding de reprise détenue à 48 % par deux Fonds communs de placement (FCP), à 45 % par le fondateur et dirigeant de la société cible et, pour le reliquat, par des cadres dirigeants. Les sociétés cible et cessionnaire ont ensuite constitué un groupe intégré.
L’Administration comme la CAA de Nantes ont considéré qu’il convenait de limiter la déductibilité d’une fraction des charges financières supportées par les sociétés membres du groupe, par application du mécanisme dit de l’amendement Charasse (CGI, art. 223 B, al. 6 ; CAA de Nantes, 4 mai 2017, n° 15NT01908, SAS Mi Développement).
La Cour relève que l’amendement Charasse, eu égard à son objet, est applicable non seulement dans l’hypothèse d’une identité entre le ou les actionnaires de la société cédante et le ou les actionnaires de la société cessionnaire, mais également dans le cas où l’actionnaire de la société cédante exerce, de concert avec d’autres actionnaires, le contrôle de la société cessionnaire.
Pour mémoire, les dispositions de l’article 223 B, al. 6, renvoient à l’article L. 223-3 du Code de commerce, relatif à la notion de contrôle. Parmi les situations visées, figure notamment l’hypothèse du contrôle conjoint, par deux ou plusieurs personnes agissant de concert et déterminant en fait les décisions prises en assemblée générale. La Cour considère qu’un tel contrôle existait en l’espèce, en se fondant, pour l’essentiel, sur le pacte d’actionnaires des associés de la société cessionnaire.
Celui-ci prévoyait notamment des interdictions temporaires de cession, des droits de préemption et des concertations lors de la cession éventuelle d’actions. Elle souligne qu’il reflétait l’intention du dirigeant de la société cible de réaliser une grande partie de son investissement dans la société cible, tout en continuant à participer activement à la poursuite du développement du nouveau groupe, en associant plus étroitement les cadres clés du groupe à son développement et ce, dans le but de les mettre ultérieurement et de manière significative en situation de reprendre un jour le groupe. Par ailleurs, il ressortait du pacte d’actionnaires que les deux FCP étaient également en accord sur les objectifs stratégiques poursuivis par les dirigeants.
La Cour s’appuie également sur les statuts, qui imposaient une majorité qualifiée des deux tiers des voix pour l’adoption des décisions en assemblée générale. Pour la Cour, cette exigence a pour effet de subordonner l’adoption des décisions concernées à la nécessité d’un accord préalable entre les deux blocs principaux d’associés.
Elle conclut donc à l’application de l’amendement Charasse, dès lors que la société cessionnaire était contrôlée par l’unique associé de la société cible, agissant de concert avec les deux autres blocs d’actionnaires lors de l’acquisition de cette dernière.
La présente décision a été rendue sur conclusions contraires du rapporteur public. Il considérait notamment, que les dispositions de l’amendement Charasse devaient faire l’objet d’une interprétation stricte par le juge de l’impôt.