Le Conseil d’Etat précise la notion de branche complète d’activité dans le secteur de la grande distribution.
Les opérations d’apport partiel d’actif peuvent bénéficier du régime de faveur des fusions (CGI, art. 210 A)sous réserve, notamment, que l’apport porte sur une branche complète d’activité. Plus précisément, il doit s’agir d’une branche d’activité susceptible de faire l’objet d’une exploitation autonome chez la société apporteuse, comme chez la société bénéficiaire de l’apport, sous réserve que cet apport opère un transfert complet des éléments essentiels de cette activité, tels qu’ils existaient dans le patrimoine de la société apporteuse et dans des conditions permettant à la société bénéficiaire de l’apport de disposer durablement de tous ces éléments (CE, 27 juillet 2005, n° 259052, Sté BL)
Dans une récente décision, le Conseil d’Etat vient préciser cette notion d’élément essentiel, eu égard à la spécificité du secteur de la grande distribution.
En l’espèce, une société exploitant un supermarché sous l’enseigne Champion, a décidé de s’affilier à l’enseigne Leclerc et a créé, à cette fin, une filiale, à laquelle elle a transféré, le 30 septembre 2006, l’ensemble des droits, biens et obligations relatifs à l’exploitation de ce supermarché (notamment les autorisations administratives indispensables à son fonctionnement).
Le contrat d’enseigne et d’approvisionnement précédemment conclu avec le groupe Champion, venu à expiration le 30 juin 2006, n’a toutefois pas été transféré. En revanche, la société bénéficiaire des apports a, elle, immédiatement conclu un nouvel accord d’enseigne et d’approvisionnement exclusif avec le groupe Leader Price.
Pour le service vérificateur, l’opération d’apport ne portait pas sur une branche complète d’activité en l’absence de transfert du contrat d’enseigne et d’approvisionnement conclu avec le groupe Champion, constitutif, selon elle, d’un élément essentiel à l’activité apportée.
Faisant preuve de pragmatisme, le Conseil d’Etat juge, au contraire, que dès lors que le contrat était arrivé à expiration préalablement au transfert, et qu’un nouveau contrat d’enseigne avait été immédiatement conclu entre la société bénéficiaire de l’apport et une autre enseigne, le contrat initial ne pouvait être regardé comme indispensable à l’exercice autonome de l’activité chez la société apporteuse, comme chez la société bénéficiaire.
Il précise toutefois expressément que cette solution est justifiée non seulement au regard de l’objectif de la loi, mais encore par la spécificité du secteur de la grande distribution.
La solution n’était pas évidente car il ne fait aucun doute qu’un contrat d’enseigne et d’approvisionnement est un élément quasiment indispensable dans le secteur de la grande distribution. Dès lors qu’au moment de l’apport, le contrat était arrivé à son terme, on voit mal comment l’Administration pouvait exiger qu’il soit apporté. Cet arrêt confirme que les contrats importants doivent être apportés mais qu’il n’est pas interdit d’y mettre fin et d’en négocier d’autres autour de la date d’apport.