Le Conseil d’État rappelle, de manière claire, qu’une société qui n’acquitte pas effectivement d’impôt dans un État ne peut se voir, par principe, dénier la qualification de « résident », et donc l’application des dispositions conventionnelles.
On sait que seuls les résidents d’un des États signataires peuvent revendiquer les avantages prévus par une convention fiscale.
La grande majorité des conventions conclues par la France prévoient, conformément en cela à la convention modèle OCDE, qu’il convient d’entendre par résident d’un État contractant « toute personne qui, en vertu de la législation dudit État, est assujettie à l’impôt dans cet État… ».
Il y a quelques années déjà, le Conseil d’État a jugé que tel n’est pas le cas des personnes exonérées d’impôt dans leur État d’établissement à raison de leur statut ou de leur activité, c’est-à-dire qui, de façon structurelle, ne peuvent être regardées comme assujetties à cet impôt au sens conventionnel (CE, 9 novembre 2015, n° 37054 LHV et n° 371132 Santander Pensiones).
Ce principe a ensuite été confirmé dans le cas d’une société libanaise exonérée de l’imposition de droit commun sur ses bénéfices, mais soumise à une imposition forfaitaire annuelle modique (CE, 20 mai 2016, n° 389994, Société EasyVista).
Le Conseil d’Etat a également jugé qu’une société bénéficiant d’une exonération temporaire et partielle d’IS (dans le cadre du régime tunisien dit « régime totalement exportateur ») pouvait, au contraire, être considérée comme résidente au sens conventionnel (CE, 2 février 2022, n° 443018 et n° 446664).
En synthèse, le juge de l’impôt a tracé une distinction entre exonération « structurelle » (exonération liée au statut ou à la nature de l’activité – par exemple, exonération d’organismes de retraite ou de fonds de pension étrangers, cf. décisions LVH et Santander Pensiones précitées) et exonération « conjoncturelle » (non-imposition pour des raisons purement conjoncturelles, telles qu’un déficit par exemple – TA Montreuil, 18 avril 2017 n° 1502977 – ou TA Montreuil, 9 juillet 2019, n° 1710812).
Aussi vient-il censurer, sans surprise, pour erreur de droit, la décision d’une CAA qui avait refusé la qualité de résident conventionnel à une société néerlandaise au seul motif qu’elle n’était pas « effectivement soumise à l’impôt sur les sociétés aux Pays-Bas » au titre des années en litige.
Il rappelle que le caractère effectif de la soumission à l’impôt sur les sociétés aux Pays-Bas de la société est sans incidence pour l’application des dispositions de la convention fiscale franco-néerlandaise (définissant la notion de résidence en conformité avec la convention modèle OCDE).
