Convention franco-belge : Exclusion du délai de forclusion prévu par voie d’instruction administrative pour l’imposition des redevances

Le Tribunal administratif de Lille juge que les stipulations relatives à la répartition du droit d’imposer les redevances prévues par la convention fiscale franco-belge sont d’interprétation stricte. L’exonération de RAS ne peut pas être subordonnée au formalisme encadré dans un délai précis tel que prévu par les commentaires de l’administration fiscale française (formulaires n°5000 et n°5003).

Sous réserve de l’application des conventions fiscales internationales, l’article 182 B du CGI prévoit l’application d’une RAS aux produits perçus par les inventeurs ou au titre de droits d’auteurs (CGI, art. 92), ainsi qu’à tous produits tirés de la propriété industrielle ou commerciale et de droits assimilés, lorsque ces sommes sont versées par un débiteur exerçant une activité en France à un bénéficiaire, soumis à l’IR ou l’IS, qui ne dispose pas d’installation professionnelle permanente en France.

Dans ce cadre, l’article 8 § 1 de la convention fiscale franco-belge du 10 mars 1964 prévoit que les redevances et revenus assimilés ne sont imposables que dans l’État de résidence du bénéficiaire.

Toutefois, l’administration fiscale française précise, dans ses commentaires relatifs à cette convention, que pour obtenir l’exonération de la RAS relative aux redevances prévue par l’article 182 B du CGI, les bénéficiaires résidents de Belgique doivent souscrire une demande formulée sur les imprimés n°5000 et n°5003. Les imprimés ainsi complétés doivent être transmis au débiteur en France, avant la 1re échéance de l’année, sous peine de forclusion (instruction du 26 décembre 1970 reprise au BOI-INT-CVB-BEL-10-20, n°100).

L’histoire

Par application d’une convention lui octroyant le droit d’exploiter le nom, le concept et le portefeuille clients d’une société belge, une société française verse des redevances à cette société belge.

À l’issue d’une vérification de comptabilité et d’un contrôle sur pièces portant sur les exercices 2013 à 2015, l’Administration conteste l’absence de prélèvement de la RAS prévue par l’article 182 B sur les redevances ainsi versées par la société française à la société belge.

Pour obtenir la décharge des RAS mises à sa charge à l’issue du contrôle, la société française se prévaut des stipulations de l’article 8 de la convention fiscale franco-belge du 10 mars 1964 accordant le droit exclusif d’imposition desdites redevances à la Belgique.

De son côté, l’administration fiscale soulève qu’en vertu des stipulations de l’article 24 § 1 de cette convention : « Les autorités compétentes des 2 États contractants se concerteront au sujet des mesures administratives nécessaires à l’exécution des dispositions de la présente Convention, et notamment au sujet des justifications à fournir par les résidents de chaque État pour bénéficier dans l’autre État des exemptions ou réductions d’impôt prévues à la présente Convention ».

À cet égard, elle rappelle les formalités administratives requises dans ses commentaires relatifs à la convention France/Belgique pour obtenir l’exonération de la RAS relative aux redevances prévue par l’article 182 B du CGI (imprimés n°5000 et n°5003), à compléter dans les délais sous peine de de forclusion.

La décision

Le Tribunal administratif de Lille juge que les stipulations de l’article 8 de la convention fiscale franco-belge du 10 mars 1964 doivent être interprétées strictement. Dès lors qu’elles ne prévoient aucun délai de forclusion pour leur application, l’établissement par la société belge des formulaires requis, et leur transmission à la société française, après l’expiration du délai prévu par instruction administrative est sans incidence.

Le TA relève par ailleurs, que ces stipulations ont pour objet de répartir le droit d’imposer les redevances entre la France et la Belgique et ne prévoient pas une « exemption » ou une « réduction d’impôt », au sens de l’article 24 § 1 de la convention fiscale franco-belge du 10 mars 1964 – qui ne saurait en conséquence s’appliquer au cas d’espèce.

Pour mémoire, une nouvelle convention fiscale bilatérale, en attente de ratification, a été signée entre la France et la Belgique le 9 novembre 2021. Cette nouvelle convention ne modifie pas les règles d’attribution du droit d’imposition des redevances.

Voir TA Lille, 23 septembre 2021, n°1811852

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Myriam Mouloudj

Myriam, Avocate, possède une expérience de près de 15 ans en fiscalité. Arrivée chez Deloitte Société d’Avocats en 2006, elle réintègre le cabinet en 2019 pour rejoindre le Comité Scientifique […]