Modalités d’application de l’exonération de RAS sur les dividendes versés à des OPC étrangers

Les nouveaux commentaires de l’administration fiscale.

Contexte

L’article 119 bis, 2 du CGI exonère de RAS les revenus distribués à certains organismes de placement collectif (OPC) étrangers – cf. article 6 de la loi 2012-958 du 16 août 2012, applicable aux revenus distribués depuis le 17 août 2012, et adopté en vue de mettre le droit français en conformité avec l’arrêt CJUE du 10 mai 2012, aff. C-338/11 à C-347/11. Ces dispositions ont notamment été commentées par l’Administration dans le BOI-RPPM-PVBMI-RCM-30-30-20-70-20130806. Depuis, ces commentaires ont fait l’objet de multiples mises à jour. La dernière datait du 12 août 2020.

Rappelons ensuite que les commentaires du titre II (sur les modalités d’application de l’exonération de RAS) ont fait l’objet d’une consultation publique jusqu’au 15 septembre 2020 afin de permettre aux personnes intéressées d’adresser leurs remarques – en dépit de leur éventuelle révision, ils étaient opposables dès leur publication.Cette dernière version, soumise à consultation publique, a fait l’objet d’une publication définitive au BOFIP, le 6 octobre 2021, après quelques ajustements.

Commentaires administratifs du 6 octobre 2021 : changements/précisions ?

OPCVM européens éligibles

Sont ajoutés les FIA établis dans un État non-membre de l’UE mais partie à l’accord sur l’EEE qui a transposé dans sa législation la directive 2011/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2011 insérée à l’annexe IX à l’accord sur l’EEE par une décision du comité mixte de l’EEE n°202/2016 du 30 septembre 2016.

Reconnaissance de la comparabilité des OPC de pays tiers 

Des critères de comparabilité similaires s’appliquent avec des conditions renforcées en ce qui concerne l’indépendance du dépositaire.

Précisions sur les conditions d’indépendance du dépositaire

Il est précisé que le dépositaire ou les prestataires assumant les missions d’un dépositaire tel que visé par le droit européen, doivent être une ou plusieurs entités tierces et sans relation d’intérêts avec l’équipe ou la société chargée de la gestion du fonds. La circonstance que le dépositaire ou les prestataires assumant les missions d’un dépositaire et l’équipe ou la société chargée de la gestion du fonds sont membres d’un même groupe de sociétés ne fait pas obstacle par principe à ce que le dépositaire ou les prestataires assumant ces missions puissent être regardés comme indépendants pour l’exercice de leurs missions. Mais dans ce cas, il doit être démontré à l’administration fiscale, par tout moyen (tels que, notamment, contrats avec le dépositaire, règlements internes relatifs à la surveillance des flux et des paiements, à la conservation des instruments financiers et au contrôle de la régularité des décisions du gestionnaire, rapports d’audit d’organismes indépendants quant à la conformité des procédures internes au regard de la législation nationale, documents émanant de l’autorité de tutelle, etc.), que cette appartenance à un même groupe ne prive pas les prestataires ou le dépositaire de l’indépendance requise, vis-à-vis de l’équipe ou de la société de gestion, pour la réalisation de leurs missions propres et qu’elle n’affecte pas la responsabilité du dépositaire ou des prestataires assumant les missions d’un dépositaire à l’égard de la société de gestion et des porteurs de parts.

Exonération immédiate de RAS sur les distributions versées à des OPC situés dans un État ou territoire tiers à l’UE

Sous l’ancienne doctrine administrative

Les revenus distribués à des OPC établis dans des États tiers à l’UE remplissant les conditions d’exonération, étaient dans un premier temps soumis à la RAS. Il incombait alors aux contribuables, a posteriori, d’adresser à l’administration fiscale une demande de restitution de l’impôt ; la décision de restitution permettant ensuite d’établir une présomption simple sur la base de laquelle, l’exonération immédiate pouvait être demandée à l’établissement payeur lors des distributions ultérieures (jusqu’au 31 décembre N+2 suivant la décision de restitution).

Avec les nouveaux commentaires

  • Il est désormais possible pour ces OPC de bénéficier de cette exonération de RAS en amont, en produisant auprès de l’établissement payeur un imprimé BOI‑FORM-000089 ou BOI-FORM-000092 (version anglaise) accompagné des documents correspondants. L’établissement payeur ne prélève pas la RAS s’il estime, au vu de l’imprimé et des documents, que les conditions d’exonération sont remplies.
    Il est par ailleurs précisé qu’en cas de doute sur le respect des conditions d’exonération de RAS une demande de rescrit (art. L 80 B, 1° LPF) peut être adressée à l’administration fiscale sur le respect des conditions d’exonération de la RAS. Lorsque dans le cadre d’un rescrit ou d’une demande de dégrèvement, l’Administration conclut à l’éligibilité de l’OPC, celui-ci pourra se prévaloir de la décision pour demander à l’établissement payeur une exonération immédiate. À cet égard, l’OPC devra fournir ladite décision accompagnée d’une attestation sur l’honneur (cf. 1re page, cadre III des imprimes BOI-FORM-000089 ou BOI-FORM-000092 – modèle d’attestation à fournir annuellement ensuite) certifiant que les caractéristiques pertinentes de l’OPC n’ont connu, depuis la décision de l’administration fiscale concluant à l’application de l’exonération de RAS, aucune modification de nature à remettre en cause cette exonération de RAS.
    Enfin, il est précisé qu’un imprimé doit être remis par l’OPC ou sa société de gestion à l’établissement payeur par compartiment ou sous-compartiment d’OPC demandant à bénéficier de l’exonération de la RAS.
  • En ce qui concerne les OPC britanniques, le Royaume-Uni ne faisant plus partie de l’UE depuis le 1er janvier 2021, ceux-ci sont soumis aux procédures prévues pour les OPC situés dans un État tiers à compter de cette date.
  • Les OPC constitués avant le 1er janvier 2021, qui ont déjà bénéficié de l’exonération de RAS avant cette date, peuvent bénéficier de cette exonération sur simple présentation, chaque année, à l’établissement payeur, de l’imprimé BOI-FORM-000089 ou BOI-FORM-000092 valant attestation sur l’honneur de leur représentant ou de leur société de gestion que l’OPC continue de remplir l’ensemble des conditions requises pour être exonéré de RAS. En cas de changement de leur situation en cours d’année, ces OPC sont responsables d’informer l’établissement payeur avant les distributions concernées par ce changement, afin que l’établissement payeur puisse prélever la RAS.
  • Lorsque les comptes de l’OPC sont gérés à l’étranger, la procédure se fait en 2 temps : (1) le gestionnaire à l’étranger transmet à l’établissement payeur en France le montant des dividendes à payer ensuite, après paiement, (2) la demande d’exonération est faite – accompagnée de certains justificatifs et d’une attestation conforme au modèle joint au BOI-LETTRE-000243. L’imprimé BOI-FORM-000089 ou BOI-FORM-000092 se substitue alors à l’imprimé BOI-FORM-000037 ou BOI-FORM-000086.

Procédure de RAS 

Pour mémoire, l’OPC n’ayant pas accompli les démarches pour bénéficier de l’exonération de RAS a priori, peut demander à l’établissement payeur la restitution de l’impôt en justifiant qu’il remplissait effectivement les conditions d’éligibilité à la date de mise en paiement des dividendes. La restitution est faite par l’établissement payeur par voie d’imputation ou de remboursement du trop-perçu. Il est rappelé que cette demande est soumise au délai prévu à l’article R 196-1, 1-b du LPF, à savoir, au plus tard le 31 décembre de la 2e année suivant celle de la RAS contestée.

L’avis du praticien : Hélène Alston

Des conditions plus strictes semblent être appliquées aux OPC de pays tiers, notamment sur la reconnaissance de l’indépendance du dépositaire. Par ailleurs, un rôle clé est confié aux dépositaires/agents payeurs d’une part dans l’appréciation des conditions d’exonération et d’autre part, dans le traitement des réclamations et remboursements des sommes en cause le cas échéant comme c’est le cas pour les réclamations conventionnelles classiques. Ce système certainement plus fluide en « régime de croisière » demandera l’adhésion et le rôle actif des agents payeurs.

Photo de Hélène Alston
Hélène Alston

Hélène est avocat spécialiste de la fiscalité financière et plus particulièrement dans le domaine de la gestion d’actifs. Elle conseille des sociétés de gestion, dépositaires et investisseurs institutionnels français et […]

Photo de Myriam Mouloudj
Myriam Mouloudj

Myriam, Avocate, possède une expérience de près de 15 ans en fiscalité. Arrivée chez Deloitte Société d’Avocats en 2006, elle réintègre le cabinet en 2019 pour rejoindre le Comité Scientifique […]