Non-application du principe ne bis in idem en cas de poursuites concomitantes relevant de délits distincts

La chambre criminelle de la Cour de cassation juge que le délit de fraude fiscale par dissimulation et le délit d’omission d’écritures en comptabilité peuvent être sanctionnés de manière concomitante, sans méconnaître le principe ne bis in idem.

Selon la jurisprudence de la chambre criminelle, en cas de poursuites concomitantes, le principe ne bis in idem n’interdit le cumul de qualifications lors de la déclaration de culpabilité que lorsque les infractions retenues répriment des faits identiques (Crim., 15 décembre 2021, pourvoi n°21-81.864).

En l’espèce, les deux co-gérants d’une société ont été convoqués devant le tribunal correctionnel :

  • D’une part, pour s’être frauduleusement soustrait à l’établissement ou au paiement de l’IS dû au titre des exercices 2010 à 2012 en dissimulant volontairement des recettes sujettes à l’impôt et souscrit en conséquence des déclarations de résultat minorées ;
  • D’autre part, pour avoir sciemment omis de passer ou de faire passer des écritures dans les documents comptables obligatoires au titre de ces exercices.

Alors que le tribunal correctionnel avait relaxé les prévenus, les juges d’appel ont écarté le moyen de la méconnaissance du principe ne bis in idem et ont condamné les deux co-gérants pour fraude fiscale et omission d’écritures comptables.

Ces derniers ont dès lors formé un pourvoi contre l’arrêt d’appel.

Ils reprochaient à la Cour d’avoir prononcé une double déclaration de culpabilité (fraude fiscale et omission d’écriture en comptabilité) pour des faits procédant de manière indissociable d’une action unique consistant à ne pas avoir enregistré les recettes en comptabilité, ce qui caractérisait une seule intention coupable et allait à l’encontre du principe ne bis in idem.

La chambre criminelle de la Cour de cassation juge que les faits réprimés par le délit de fraude fiscale par dissimulation, d’une part, et le délit d’omission d’écritures en comptabilité, d’autre part, sont nécessairement distincts dès lors que l’article 1741 du CGI sanctionne la souscription d’une déclaration fiscale minorée, tandis que l’article 1743 du CGI sanctionne l’omission, pour tout contribuable soumis à l’obligation de tenir une comptabilité, de passer ou de faire passer des écritures dans les documents comptables obligatoires.

Elle considère ainsi que, ne méconnaît pas le principe ne bis in idem la décision de la Cour qui énonce que la minoration des résultat imposables déclarées constitue un fait distinct de l’omission en comptabilité des recettes et que les omissions comptables n’étaient pas nécessaires à la réalisation de la fraude fiscale mais permettaient à la société, si elle était contrôlée, de restreindre le pouvoir de contrôle de l’Administration.

Le pourvoi est ainsi rejeté.

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Alice de Massiac

Alice a développé depuis plus de 20 ans une large expertise en accompagnant de grands groupes en France et à l’international, tant en conseil qu’en contentieux, anticipant les impacts dans […]

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Myriam Mouloudj

Myriam, Avocate, possède une expérience de près de 15 ans en fiscalité. Arrivée chez Deloitte Société d’Avocats en 2006, elle réintègre le cabinet en 2019 pour rejoindre le Comité Scientifique […]