1re lecture Assemblée nationale – Séance publique
Mise à jour du 14 novembre
Si le projet de loi de finances pour 2026 ne contenait aucune mesure sur le CIR, les députés ont déposé des amendements, discutés lors des séances publiques des 28 et 29 octobre 2025.
A été adopté lors de la séance du 28 octobre, l’amendement N°I-823 : visant à ajouter un 5. à l’article 199 ter B, II du CGI rédigé ainsi :
« 5. Les sociétés ainsi que, le cas échéant, leurs filiales et la société mère, qui, à compter du 1er janvier 2024, délocalisent ou transfèrent volontairement à l’étranger une partie ou la totalité de leur activité, impliquant une fermeture ou une forte réduction de l’activité de sites en France et une diminution du nombre d’emplois de l’entreprise en France, remboursent aux organismes de recouvrement le montant de la réduction perçue au titre du présent article au titre des trois exercices précédents et perdent le bénéfice de la réduction définie au présent article pour une durée de trois ans. »
Notre avis : cet amendement « anti-délocalisation » vise à ce que les sociétés transférant leur activité à l’étranger remboursent le montant du CIR octroyé les trois années précédentes et soient privées du bénéfice du CIR pour les trois années suivantes. Adopté contre l’avis du rapporteur et du gouvernement, qui soulignaient son caractère anti-(re)localisation et contraire au droit communautaire (il est interdit de récupérer des aides de manière rétroactive en cas de déplacement d’un siège social au sein de l’Union européenne – dans un sens ou dans l’autre), des erreurs de plume manifestes et une rédaction à tout le moins vague et étonnante, rendent peu vraisemblable le maintien de cette modification à l’issue du processus législatif :
- Est employé le terme « réduction » – or, le CIR est un crédit d’impôt et non une réduction d’impôt ;
- La mesure s’appliquerait à une société qui ne modifie pas son activité dès lors qu’une autre société du groupe (filiales, société-mère) délocaliserait une partie de son activité et que la société déclarante diminuerait le nombre d’emplois en France (sans précision de seuil – et donc dès le premier emploi) ;
- Enfin la mesure serait appliquée de manière rétroactive (à compter du 1er janvier 2024) ;
- A été modifié l’article 199 ter B du CGI via l’ajout d’un 5. au II de cet article et non via l’ajout d’un III. Ce faisant – vraisemblablement contre l’intention de l’auteur de l’amendement – cette nouvelle mesure s’appliquerait aux seules entreprises qui bénéficient du remboursement immédiat du CIR (PME, entreprises en difficulté). Les sociétés imputant leur CIR sur l’impôt sur les sociétés, puis en demandant le remboursement ne seraient pas concernées.
Aucun amendement sur le CIR n’a été adopté lors de la séance du 29 octobre. Deux sujets à suivre plus particulièrement dans le cadre de la navette parlementaire, et que la ministre chargée des comptes publics pourrait soutenir :
- Celui des dépenses de normalisation et leur éventuelle suppression de l’assiette ;
- Celui des dotations afférentes à des biens immobiliers – une piste serait d’exclure l’immobilier de bureaux (contrairement aux laboratoires de recherches qui resteraient éligibles).
Enfin, la ministre a indiqué être favorable à la prorogation du C3IV.
Plusieurs amendements sur le CIR ont été adoptés lors de la séance du 14 novembre :
- Réintégration d’un mécanisme « jeunes docteurs » dans le CIR (amendements n° I-2239 et n° 3996) : prise en compte des dépenses de personnel des jeunes docteurs à hauteur de 230 % de leur montant pendant les deux premières années suivant leur premier recrutement, pour les dépenses engagées à partir du 1er janvier 2026.
A noter : on aboutit in fine à une prise en charge des jeunes docteurs via le CIR pour 96,6 % i.e. 30 % * (130 – dépenses de personnel + 40 – frais généraux) vs 120 % sous le régime antérieur, en vigueur jusqu’au 14 février 2025 - Nouvelle mesure « anti-délocalisation » (amendement n° I-2947) : en complément de l’amendement N°I-823 voté le 28 octobre (cf supra), est ici prévu que le bénéfice du CIR serait subordonné, à l’absence pendant dix ans de transfert à l’étranger des activités de production ou de recherche directement liées aux projets financés par le CIR, et à l’absence de cessation substantielle d’activité sur le territoire national (incluant toute fermeture d’établissement ou licenciement de plus d’un tiers des effectifs du site compromettant la poursuite durable de l’activité économique principale de l’entreprise ou de ses filiales situées en France). En cas de manquement à ces obligations, l’entreprise devrait rembourser l’intégralité du CIR perçu durant la période.
- Intégration des dépenses en moteurs de calcul GPU et CPU dans l’assiette du CIR via la création d’un crédit d’impôt innovation pour l’intelligence artificielle (amendement n° I-2235)
A noter : la rédaction de ce nouveau CII-IA n’est pas à date efficace et devra être complétée durant les étapes ultérieures de la navette parlementaire. - Exclusion de l’assiette du CIR des frais de services facturés par des plateformes numériques d’intermédiation qui se contentent seulement de mettre en relation des chercheurs, laboratoires ou prestataires, sans mener elles-mêmes des activités de recherche (amendement n° I-2576)
D’autres amendements ont été adoptés visant à proroger les dispositifs CICo (amendement n° 1880) et C3IV jusqu’au 31 décembre 2028.
Enfin, la possibilité pour les collectivités locales d’exonérer les JEI d’impôts locaux serait prorogée jusqu’au 31 décembre 2028 (amendement n° 1881 et sous-amendement n° 3997).
Nota : les amendements relatifs aux jeunes docteurs, à l’intégration des dépenses en moteurs de calcul CPU et GPU, au CICo et au C3IV ne sont, selon leur rédaction actuelle, « applicables qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû ». Cette rédaction impliquerait donc sur ces dépenses une réduction d’impôt, et non un crédit d’impôt. Si ces amendements perdurent lors des prochaines étapes de la navette parlementaire, gageons que leur rédaction soit affinée.
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